L’altercation entre le sous-préfet et le maire révèle l’âpreté de la bataille pour le contrôle politique du Noun, par le Rdpc et l’Udc.
Depuis ce week-end, une vidéo devenue virale sur la toile présente le sous-préfet et le maire de cette commune du Noun, à l’Ouest, en train de s’invectiver. L’autorité administrative, saisissant son arme personnelle de protection, parle même de tirer sur l’édile, au cas où… Dès le lendemain, les soutiens de l’ordre se sont opposés aux adversaires déclarés de la dictature, ces derniers aux traditionalistes, au point où les spéculations ont brouillé la compréhension de l’incident. Les chefs traditionnels de Njimom (chefs des groupements Njinka et Mayat, villages Mabouo, Koussam, Manki, Foyett, Mato, Folap, Makam, Makouotou, Maloure, Manson et Makouetvu) ont exprimé leur « consolation » et surtout leur soutien au sous-préfet.
Ils condamnent « un acte de barbarie inouïe qui traduit un mépris inacceptable à l’endroit du sous-préfet qui incarne, selon eux, la plus haute autorité de l’Etat dans sa circonscription ». Pile. « En matière de prise de parole, expliquent ces chefs apparentés au pouvoir, les chefs sont libres de désigner une élite ou un autre fils, dans un esprit inclusif ». Et de condamner ces mandats, qui dans le Noun, mettent certains élus au-dessus des populations. Ils condamnent avec la dernière énergie la multiplication des cas d’agression envers les autorités administratives dans le Noun. « La présente déclaration met en exergue l’interpellation des pouvoirs publics sur la crise de l’autorité de l’Etat de plus en plus bafouée et les attaques récurrentes contre les institutions traditionnelles (…) dans le Noun en général, abandonnées aux affres d’une dangereuse confusion entretenue autour de la politique de décentralisation ».
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A son tour, l’Udc à travers sa présidente nationale, Hermine Tomaïno Ndam Njoya a répliqué, dans un communiqué du 12 décembre 2022, signé à partir de Yaoundé. En plus de sa version des faits, elle attire l’attention sur des « faits graves et récurrents dans le Département du Noun ». Au cœur de la dispute, la volonté du sous-préfet de retirer la parole au maire Udc pour la donner à une « élite », en fait un cadre du parti au pouvoir, à l’avant-dernière étape de sa tournée. « Le moment venu, et après accueil du Sous-préfet, exécution de l’hymne national et installation, la surprise viendra de la présentation au micro, du programme de la cérémonie.
Alors que dans les 12 étapes parcourues, dont les trois premières avec la présence personnelle du maire et neuf avec son représentant, notamment le 3ème Adjoint au maire, l’ordre du jour adopté avait toujours prévu quatre interventions à savoir : 1- Mot de bienvenue du Chef de village hôte ; 2- Mot du président du comité de développement du Village hôte ; 3- Mot du Maire de la Commune de Njimom ; 4- Discours du Sous-préfet suivi des échanges, l’étape du village Njimom-centre, a curieusement changé comme suit : 1/ Mot de bienvenue du Chef de village, 2/ Mot d’une élite, 3/ Mot du président du comité de développement et 4/ Discours du Sous-préfet suivi des échanges. L’Elite qu’on prévoit faire parler en lieu et place du maire, est un cadre du Rdpc, adversaire politique du maire.
Celui-ci s’y oppose et dit qu’il peut à la rigueur accepter qu’il n’y ait que trois interventions à savoir le Chef du village, le président du comité de développement et le Sous-préfet ; mais ne peut accepter qu’en ses lieu et place, on fasse parler « une élite ». Ce qui n’est point pris en considération par le Sous-préfet qui fait commencer les interventions. Après le mot du Chef du village, lorsque l’« élite » malgré la désapprobation du maire par l’impresario commandé par le Sous-préfet, est appelé au micro, le maire s’y oppose. La réaction du Sous-préfet ne se fait pas attendre : il demande au Commandant de brigade de Gendarmerie de Njimom d’arrêter le maire, bien plus : de lui mettre les menottes… Ordre que, ni le Commandant, ni les éléments de gendarmerie eux aussi, sagement, n’acceptent d’exécuter », raconte la présidente de l’Udc. D’où l’escalade et cette scène surréaliste.
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Le patron du parti de feu Adamou Ndam Njoya affirme que Roger Tanefo Ligpa, le chef de terre, est « en mission » à Njimom pour aider le Rdpc à prendre la mairie lors des prochaines élections. De plus, le comportement de l’autorité administrative vis-à-vis des élus de l’Udc n’est pas un cas isolé. L’on se souvient que le 12 Janvier 2021, lors de la cérémonie d’installation du Préfet du Noun par le gouverneur de l’Ouest, la population avait été surprise par une tentative de suppression par le gouverneur, du mot d’accueil du maire, comme le veut le protocole, au profit d’une « élite », baptisée porte-parole des populations. Mme le maire s’y était opposé avec détermination, presque pour rien. De même, le 7 décembre 2021 à la Commune de Njimom, quand le Minddevel, accompagné du directeur général du Feicom et du gouverneur de l’Ouest, était venu présider la cérémonie d’inauguration du réseau local d’adduction d’eau, une élite du même cru avait été infiltrée pour intervenir.
Lire aussiCameroun - Nécrologie : Nkotti François a tiré sa révérenceDes faits et d’autres qui font parler d’ostracisme vis-à-vis de ce parti. « Il est clair que tout est fait et entretenu pour perdurer les crises et saper l’harmonie et la cohésion sociales dans le Noun. (…) L’Udc (…) engage désormais ses élus et la population, à prendre la responsabilité pour ne laisser passer aucun abus de leurs droits et libertés quels que soient les auteurs de ces abus, de défendre leurs droits et libertés face à toutes les autorités qui, s’écartant de leurs missions régaliennes et de leur devoir de neutralité politique, instrumentalisent la puissance étatique en faveur des adversaires politiques qu’ils entendent ainsi aider à avoir des victoires électorales non méritées », menace la présidente.