Carmen Campo Real a mis en épigraphe à son recueil Hubris cette citation de Christopher Gérard, tirée de son livre La Source Pérenne, publié à L'Âge d'Homme en 2007:
La faute suprême est ce que les Grecs, nos maîtres, appelaient l'hubris, la démesure. [...] Le plus terrible exemple d'hubris contemporain ce sont les totalitarismes modernes qui, à force de vouloir "changer l'homme" ne font que l'avilir.
Le monde actuel, vu du futur, ne donne pas envie:
L'éternel n'était plus qu'un trépas
Danse de l'attaque et de la fuite ici-bas
Comme conséquence de la rencontre de deux vies
Encéphalogramme plat et hagard
L'espèce était sa suprématie
Le service équitable de sa patrouille de crevards.
Dans ces conditions le repli devient urgent. Car l'ombre se propage, et la sensation d'abandon. La vie ralentit. Comment en sortir?
L'insatiabilité de la tête
Est la vertu suprême
Camoufler sa nature
Accepter l'incertitude noble et pérenne
N'est-ce pas l'attitude à adopter dans ce monde global?
Géographie de robots galériens
Le monde est un moulin
La politique s'est plantée de chemin. Il ne faut pas compter sur les journalistes souverains, ricanant et incultes pour le lui dire:
Il n'y a plus guère que quelques libelles palpables
Dans cette Hubris foisonne la misère et le culte.
La misère, c'est le champ de ruines des vies; le culte, c'est la prosternation, comme on assassine:
Production artificielle d'atmosphère
Stagnation de notre société qui prolifère
Comme lieu de l'antigravitation
Le poète constate la victoire des leçons
Du brio, du bluff et de la misère
Et chante, Ô témoignage sommaire.
Plutôt que d'affronter le pouvoir,
Agir en abandonnant le complexe de toute puissance
Préférer à la révolte, la passive désobéissance.
Autrement dit:
Partir d'un calcul pour décider pour soi
Ou partir de soi-même, hors-la-loi
L'action n'est plus affaire de rengaines
Mais d'expérimentations hors-système
Comprendre c'est admettre d'être vu.
Francis Richard
Hubris, Carmen Campo Real, 144 pages, Slatkine