(Dans cette rubrique « Visites d’ateliers », je parle d’ambiance, je dis ce que je vois, entends et ressens, mais ce n’est pas vraiment un article sur l’artiste lui-même et son travail. Rappelons-le.)
C’est un atelier à Dijon…qui ne montre rien! Du moins…au début! Quand j’arrive chez Lucile Pattar, elle me fait entrer dans la partie de son appartement dédié à son travail de peintre. Une alcôve où tout est propre et sagement rangé, livres, dossiers, cartons, matériel divers.
Et une salle avec grande table sur tréteaux devant la baie vitrée. Rien dessus. Rien non plus aux murs, ni au sol. Aucune œuvre en cours, en attente ou terminée.
Bon! Ce n’est pas comme ça que Lucile Pattar fonctionne!
J’en conclus que son atelier quasiment vierge est une promesse. « J’aime déballer peu à peu! » dit-elle en parlant du moment où elle débute une peinture. Elle explique que, d’abord, elle laisse venir…Regarde le ciel et les arbres depuis la fenêtre. Fait quelques pas dans l’atelier, qu’elle n’a pas voulu trop exigu. « J’aime avoir de l’espace » glisse-t-elle en esquissant presqu’un pas de danse et un large geste de peintre! (Est-ce le grand miroir encadré, posé par-terre contre le mur, qui m’évoque ainsi la danse?) « Je choisis mes couleurs en premier, puis mon papier, et enfin mes pinceaux! »
Depuis quelques temps, elle réalise des encres petit format. Qu’elle organise et égrène à la manière d’un journal intime. Une (ou deux) par jour. Datées. Qui expriment cette petite musique intérieure, infime, éphémère, indescriptible… perçue à un moment donné. Et qui peut éventuellement résumer une journée de façon très personnelle.
Mais Lucile Pattar n’a pas toujours travaillé ainsi.
Et c’est là qu’elle me fait la surprise de descendre quelques cartons des rayonnages. Elle les ouvre. Elle déballe.
L’atelier s’anime. Des œuvres émergent. S’empilent. Se posent par terre. Étonnements réciproques. Elle avait presque oublié ses périodes « Moyen-Age », « Esquimaux », « Bible », « Afrique », « Bresse », « Exil » … Années 90, 2000… Elle extrait de sa bibliothèque les livres qui l’avaient inspirée. Les feuillète. Me les montre. Nous parcourons ainsi un bout de chemin de Lucile Pattar. Un peu de son histoire d’artiste. Jusqu’à aujourd’hui. Et voici qu’arrivent tout naturellement l’actuelle période « Journal ». Une collection de chemises où dorment ses petits paysages intérieurs. Elle les survole. En choisit deux ou trois. Les place sous passe-partout. Hoche la tête. Elle les verrait bien en exposition ceux-là, bientôt sans doute. Mais, avant, il faudra les vernir.
Ma rencontre avec Lucile Pattar s’achève. L’atelier, cette fois, est bien dérangé! Il frémit des créations de l’artiste. Elle me dit encore sa préférence pour les papiers lisses, sans trop de grain. « Il faut que ça glisse! Souvent, j’ai envie d’un truc fluide! ». Elle décrit son jeu avec l’encre, entre laisser-faire et maîtrise, « si elle fuse trop, je la stoppe avec un pinceau sec. ». Et l’on rappelle encore ses premiers travaux à l’huile, sur bois, avec incrustation, métal doré, ponçage, oxydation etc…Autre chose! Plus proche de sa formation de peintre décorateur, mais tellement intéressant aussi.
Je repars avec son petit livre sous le bras « Nos jours », réalisé avec une amie poète.
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