Le dispositif est peu connu du grand public mais l'évaluation de toutes les structures réalisant un chiffre d'affaires supérieur à 750 000 euros, sur la base d'entretiens (parfois) et d'une analyse minutieuse de leurs documents comptables, leur situation financière, leurs éventuels incidents de paiement, leur contexte, leur marché et son évolution…, et matérialisée par une note synthétique s'étageant (dorénavant) sur 21 paliers, est un instrument de mesure de leur capacité à honorer leurs engagements universellement adopté par les établissements de crédit pour leur qualification des risques.
Ses enjeux sont donc considérables, puisque l'avis émis par la Banque de France conditionne en grande partie les possibilités de financement de la plupart des acteurs économiques de l'hexagone. Et l'annonce d'une modification des facteurs retenus pour le calcul du sésame déclenche automatiquement une petite révolution, d'autant plus que les délais de mise en œuvre envisagés sont très courts et laissent peu de de temps à la préparation : les premières publications affectées devrait porter sur les exercices 2023.
Les dirigeants concernés ont certainement de quoi s'inquiéter, n'ayant à ce stade aucune information précise sur les éléments factuels qui seront pris en compte pour attribuer une appréciation sur l'impact écologique de leur activité, sur la manière dont ils seront combinés afin de produire un résultat cohérent, ni sur la pondération appliquée à ce dernier dans la valeur finale. Difficile de se projeter vers le moyen terme avec une telle incertitude. À l'inverse, une clémence excessive dans l'exercice serait dangereuse pour la prise au sérieux de la démarche orchestrée par la Banque de France.
C'est que les experts chargés de plancher sur les mécanismes d'analyse sous-jacents et de mettre au point les nouvelles règles s'aventurent en territoire largement inconnu, comme le rappellent les multiples polémiques et différends touchant toutes les tentatives de définition de labels verts. Entre autres obstacles, se poseront d'emblée les questions de l'accès aux données pertinentes, en particulier pour les PME ou encore de l'homogénéisation des approches au travers de secteurs extrêmement divers…
Bien sûr, par l'incitation qu'il créera nécessairement, le principe de l'intégration des considérations environnementales dans la cotation des entreprises est une excellente nouvelle pour la lutte contre le réchauffement climatique (on pourrait toutefois s'interroger sur l'absence du volet sociétal qui leur est normalement associé dans les politiques responsables). Il restera tout de même à voir comment la Banque de France mènera à bien cette mission extraordinairement délicate… et exigeant une transparence absolue.