Florence Dupont, Histoire littéraire de Rome. De Romulus à Ovide. Une culture de la traduction, Paris, Armand Colin, 2022, Bibliogr., 684 p.
"Ce livre n'est pas une Littérature latine, mais l'histoire de ce que les Romains dénommaient litterae latinae, "lettres latines" en français, c'est à dire des textes écrits en latin, édités et commentés par des grammairiens (grammatici)". Ces lettres latines imitent, bien sûr, le modèle grec (grammata hellenika).
Florence Dupont conçoit son travail comme une remise en question radicale des Littératures latines : en fait, il s'agit de reconstituer une histoire plus réaliste des litterae latinae, "inséparables de la Res publica au même titre que ses conquêtes militaires ou ses institutions politiques". Cette histoire rompt donc avec le canon des belles lettres promu par l'âge classique européen ; elle s'arrête à la fin du règne d'Auguste avec l'institutionnalisation du bilinguisme de l'Empire romain.
Pour accéder aux oeuvres de l'empire romain, Florence Dupont recommande, afin d'accéder aux textes, de passer par une ethnopoétique, "une anthropologie des litterae latinae comme événement culturel". Pour cela, il faut "que soient manifestes dans les textes latins les textes grecs qu'il traduisent ou plus exactement auxquels ils font allusion". Donc il faut "retrouver la pragmatique sociale des énonciations politiques et philosophiques à Rome". C'est donc l'objet du livre de Florence Dupont que de "reconstruire un objet historique, les litterae latinae comme processus culturel singulier", et nous voilà débarrassé-e-s des histoires littéraires bien encombrantes, et bien peu claires, que nous avons rencontrées au cours de nos études. L'objet de l'ouvrage de Florence Dupont est " de retrouver le dispositif, chaque fois différent, qui rend compte de sa pragmatique ancienne et de son appartenance aux litterae latinae. Et donc de sa singularité".
Rome fut pluri-ethnique, et l'Italie préromaine utilisait une vingtaine de langues avant que ne triomphe, l'une d'entre elles, le latin qui deviendra l'autre langue ("utraque lingua"). Et l'auteur de conclure (p.192) : "Rome fut une perpétuelle traduction".
La seconde partie de l'ouvrage, - plus de 450 pages ! - est consacrée aux auteurs romains, de Caton à Ovide : Plaute et Térence, Catulle, Lucrèce et Cornélius Népos, puis Cicéron, Salluste, César, puis Horace, Poperce et Tibulle et, enfin, Virgile, Tite-Live et Ovide.