Le domaine du « corporate banking » est un étrange mélange de modernité et d'archaïsme. D'un côté, depuis longtemps, ses outils de gestion de trésorerie permettent de connecter des comptes détenus dans différents établissements et offrent des facilités d'automatisation de paiements en volume. De l'autre, les mécanismes sous-jacents reposent sur des technologies d'un autre temps, telles que le recours à des transferts de fichiers, préparés sous un format propriétaire, pour les ordres de virements.
C'est justement dans ce dernier registre que deux jeunes pousses se positionnent aujourd'hui afin de bousculer le secteur : la française Numeral et la suédoise Atlar. La mission qu'elles se donnent est simple à résumer, puisqu'il s'agit de fournir aux entreprises une interface à l'état de l'art pour l'exécution de leurs paiements de masse, où que soient hébergés leurs comptes en Europe. Concrètement, il s'agit de fournir un jeu d'API standardisé masquant la complexité et la diversité des dispositifs existants.
Au-delà de la transmission normalisée des opérations, des fonctions complémentaires autorisent en outre l'optimisation de la gestion comptable. Il est par exemple possible, en amont, de prendre en charge les demandes de validation (généralement soumises à un responsable habilité), ou, en aval, de collecter les confirmations de règlement en temps réel et d'orchestrer ensuite les réconciliations, sans intervention manuelle.
Les deux startups affirment que leur cible prioritaire réside dans les petites structures qui, à l'inverse des grands groupes, n'ont jamais eu les moyens d'automatiser les processus autour des services historiques de leurs banques. Leur adoption d'un modèle par API devrait certes réduire l'obstacle, entre autres grâce aux plates-formes de développement sans code (ou presque) capables de les exploiter sans programmation, mais il ne l'élimine pas totalement. La véritable révolution ne surviendra que si les éditeurs des logiciels financiers qui leur sont destinés en assument la pré-intégration.
La banque d'entreprise se trouve maintenant dans un moment clé, qui n'est pas sans rappeler celui qui a agité le marché des particuliers ces dernières années. La pression va progressivement croître pour une meilleure accessibilité de ses données et services, de manière à les assimiler au cœur des activités, par souci de productivité autant que de performance. Le choix qui s'ouvre alors aux institutions est de laisser des acteurs tiers accaparer ce rôle, et potentiellement prendre une position de premier plan dans la relation avec leurs clients, ou bien le conserver pour elles-mêmes… Mais, dans cette hypothèse, il faudrait probablement d'abord que l'industrie fixe ses normes d'interface.