Me Amungwa Tanyi, l’un des avocats du présumé séparatiste Ayuk Tabe, a été inculpé pour la deuxième fois pour une même affaire. Il dénonce l’acharnement judiciaire et accuse les autorités de violer les principes de base relatifs au rôle du Barreau.
Me Amungwa Tanyi, avocat au barreau du Cameroun a été inculpé pour tentative de corruption le 28 septembre 2022 par le tribunal militaire de Yaoundé. L’avocat d’Ayuk Tabe et de plusieurs autres présumés séparatistes, avait été inculpé, une première fois le 10 mars 2022, par un juge d’instruction militaire pour « sécession » dans la même affaire qui remonte au 31 mai 2021. Elle consiste en la fouille illégale du téléphone portable de Me Amungwa dans les locaux du groupement territorial de gendarmerie de Yaoundé, où l’avocat assistait un de ses clients. Me Amungwa s’était alors retrouvé face à un confrère qui l’avait injustement accusé de filmer l’audition. Après son interpellation, Me Amungwa avait été conduit au Service Central des recherches judiciaires, sous prétexte que les images de propagande sécessionnistes avaient été découvertes dans son téléphone portable, alors que cela n’était pas fondé.
Lire aussiHermine Adeline Ngo Ndjébayi : «Le Coronavirus nous permet de développer l’entraide entre amis»« Pendant l’enquête préliminaire Me Amungwa a fait usage de son téléphone portable pour filmer. L’enquêteur s’en est aperçu et a récupéré son téléphone pour exploitation. En exploitant le téléphone c’est l’hécatombe qui y a été découverte », rappelle Me Bertrand Nzouango, avocat adversaire du mis en cause. Il lui était reproché de détenir dans son téléphone des vidéos de propagande en faveur des séparatistes. L’avocat d’Ayuk Tabe avait été libéré deux semaines après son interpellation. Me Amungwa Tanyi affirme continuer à vaquer sereinement à ses occupations malgré sa nouvelle inculpation. Il dit être victime de son engagement à défendre les personnes dont les droits sont violés dans le cadre de la crise anglophone.
Il dénonce un harcèlement judiciaire qui, selon lui, viole les Principes de base relatifs au rôle du barreau, dont le 18ème article concernant les mesures que l’Etat doit prendre comme garanties liées à l’exercice de la profession d’avocat : « Les pouvoirs publics veillent à ce que les avocats puissent s’acquitter de toutes leurs fonctions professionnelles sans entraves, intimidation, harcèlement ni ingérence indue ».
Une source rencontrée au tribunal militaire de Yaoundé n’a pas voulu réagir pour justifier cette seconde inculpation de l’avocat.
Avocats en danger
Me Hyppolite Meli, l’avocat de Nicodemus Amungwa dénonce l’attitude du tribunal militaire et les autorités judiciaires qui, depuis plusieurs mois sont à l’origine des actes d’intimidation des avocats qui assistent leurs clients dans les brigades de gendarmerie, commissariats et les tribunaux.
Depuis 2020 à 2021, le Barreau du Cameroun a dénoncé au moins huit cas de violation des droits des avocats. A cause de ces multiples cas de violation, les avocats avaient décidé de suspendre leur présence dans les tribunaux pendant une semaine pour faire entendre leur courroux. Ces violations sont perpétrées par les forces de maintien de l’ordre et d’autres autorités judiciaires. En 2021, deux avocats ont été interpellés à Douala dans la salle du tribunal avant d’être écroués à la prison. Ils assistaient leurs clients lorsqu’ils ont été accusés d’outrage à magistrats. En octobre 2020, un avocat avait affirmé avoir été violenté par les policiers du commissariat central N°4 de la ville de Yaoundé. Le 12 octobre 2020, Me Sother Menkem avocat au barreau du Cameroun affirmait avoir été humilié au secrétariat d’Etat à la Défense.