Le voilà l'article sur l'audience. Audience, audimat, audimétrie : quel terme définit quoi ? Comment calculent-ils l'audience ? Que représente l'audience ? Les séries médiatisées sont-elles supérieures aux séries moins médiatisées ?
Toutes les réponses à ces questions dans l'article.
Et évidemment on commence par les définitions. Quand on parle d'audience, on parle avant tout de l'intérêt que suscite un produit commercial sur les personnes à qui il est destiné, donc le public dans le cas des séries. L'audience est donc un chiffre représentant l'impact qu'engendre tel événement chez le public. Dans le domaine des séries, on calcule l'audience hébdomadairement et donc épisode après épisode pour témoigner clairement de l'évolution (ou de la dégression) de la popularité d'un projet : le nombre de téléspectateurs augmente ou diminue et ce sont ces chiffres qui sont cruciaux puisqu'ils permettent de définir le futur d'une série. Si l'impact est limité, la série est annulée.
L'audimat/audimètre est un appareil permettant de mesurer l'audience alors que l'audimétrie représente tous les moyens utilisés afin de calculer l'audience qu'entrainent une série, un film…
Mais déjà : comment calcule-t-on l'audience ? Nielsen Media Research (NMR) s'occupe de cela. C'est la société qui se charge de calculer l'audience (que ce soit dans le domaine télévisuel, ou cinématographique, radio etc…) des produits américains. C'est Médiamétrie en france. La société fait une sélection détaillée des familles dont elle aimerait analyser le visionnage des habitants et installe des audimètres de deux types à l'intérieur des foyers. Les foyers sont évidemment choisis selon des critères très variés : l'âge, la position géographique, l'appartenance éthnique, les moeurs etc... De cette manière, les statistiques sont plus variées et permettent d'avoir un aperçu diversifié de l'impact qu'a un programme sur la population américaine globale. À noter qu'il n'est pas possible pour une famille de se tenir volontaire pour faire partie de l'analyse : la sélection est purement d'ordre statistique.
Nielsen utilise donc deux types d'audimètres : l'audimètre du poste (set meter en anglais) permet de récolter les informations relatives au poste de télévision donc sur la chaîne qui est en train d'être suivie et l'audimètre individuel réunit des informations sur les membres du foyer qui suivent le programme en question. L'audimètre individuel (people meter en anglais) est une boîte accrochée au poste de télévision qui est accompagnée d'une télécommande. Chaque membre d'une famille habitant sous le même toit possède un bouton sur cette télécommande qui correspond à leur sexe et âge. Chaque fois que la tv est allumée, une lumière s'allume sur l'audimètre, rappelant l'habitant d'appuyer sur le bouton qui lui correspond pour envoyer l'information à l'appareil et donc indiquer qu'il ou elle suit la télévision à ce moment précis. Une fois que le membre de cette famille décide de quitter la tv, il appuie sur le bouton indiquant qu'il lâche la télévision. De cette façon, l'audimètre du poste sait quelle chaîne a été suivie et l'audimètre individuel sait qui a regardé la télévision.
Il existe d'autres boutons sur la télécommande qui permettent aux invités de participer à la statistique en insérant leur âge et sexe.
Ce procédé permet donc d'emmagasiner l'information démographique.
Les informations sur qui regarde quoi sont stockées dans le système avant d'être automatiquement envoyées chaque nuit au Centre d'opérations en Floride, puis sont délivrées le matin qui suit sous forme de chiffres et pourcentages. Plus tard dans la journée, les chiffres définitifs (il peut y avoir des différences avec les chiffres initiaux à cause des programmes en direct) sont publiés sur des sites comme le New York times, LA Times ou USA Today.
Comme le procédé dépend beaucoup de ces appareils, la société a recours à des audits pour vérifier la validité de cette statistique et compare les résultats avec d'autres groupes d'analyses. Tout cela recouvre seulement le calcul fait sur le plan national et donc correspond à 30,34% des foyers ayant une télévision aux USA. Les 69,66% restants sont inclus sur le plan local (plus précisément les marchés en opposition au pays entier pour la statistique précédante). Les télévisions choisies pour le calcul local sont juste équipées d'un audimètre plus générique permettant de définir quelle chaîne est en train d'être suivie (et donc n'ont pas un people meter qui permet d'évaluer les informations démographiques).
Du coup on a bien plus que le nombre de téléspectateurs comme information d'audience. Prenons l'exemple de l'audience qu'a fait un épisode de My Name is Earl dont on voit les résultats sous la forme suivante (nombre total de téléspectateurs mis à part) et analysons chaque chiffre/pourcentage :
"My Name Is Earl" (households: 4.4/8, #9; adults 18-49: 2.7, #T4). (household : foyer avec une TV)
- Le 4.4 signifie que 4.4% de tous les foyers aux USA ont suivi cet épisode de My name is Earl
- 8 signifie que 8% de tous les foyers aux USA où la télévision était allumée au moment où l'épisode était diffusé ont suivi l'épisode
- #9 est la place qu'occupe la série dans le classement de la soirée en tenant compte des statistiques précédantes (s'il y a un T cela indique un ex-aequo)
- 2.7% de tous les adultes entre 18 et 49 ans aux USA ont suivi cet épisode (pour la saison 2007/2008, NMR a estimé un nombre de 131 050 000 personnes aux USA ayant entre 18 et 49 ans donc 2.7% de cela donnerait environ 3,54 millions d'adultes entre 18 et 49 si cet épisode était diffusé l'année passé, chose que j'ai la flemme de vérifier) :)
Il est donc difficile de calculer exactement le nombre de personnes ayant suivi l'épisode en tenant compte de ces statistiques puisqu'il faudrait savoir le nombre exact de personnes sous un toit ayant regardé l'épisode en question (considérant qu'un foyer compte au moins une personne).
Maintenant qu'on sait comment l'audience se calcule, on peut facilement se poser la question suivante : les séries les plus mises en avant (qui font une audience assez convaincante et qui font vendre assez pour qu'on les renouvèle chaque année) sont-elles les plus réussies?
Il faut déjà faire la distinction entre le chiffre d'audience et la médiatisation. Les deux vont souvent ensemble (2004 a été l'année des révélations avec des blockbusters comme Lost qui a attiré l'attention de 18,65 millions de téléspectateurs pour son épisode pilote.) Les couvertures de magazine avec les acteurs de Lost se sont succédées et son arrivée en France a été annoncée comme un réel événement puisqu'il s'agissait d'une des séries les plus originales lancées il y a 4 ans aux USA. Dans le même registre, on peut citer Desperate Housewives, un succès gigantesque et pas seulement qu'en Amérique. La série, soutenue par des critiques positives et une large promotion, a été lancée deux semaines après Lost et a rassemblé 21,3 millions de téléspectateurs sur ABC pour son pilote, devenant ainsi le premier épisode de saison le plus vu de la saison 2004/2005 et la meilleure entrée en matière pour une série d'ABC depuis Spin City en 1996. Depuis, la série est diffusée dans beaucoup de pays, doublée dans beaucoup de langues et se plante parmi les francs succès de ces dernières années.
Pour la comparaison, une des autres grosses séries d'ABC Grey's Anatomy qui bénéficie toujours d'un continuel bouche-à-oreille, a tourné autour des 18 millions pour sa première saison qui a lancé le phénomène.
Mais la popularité médiatique ne nécessite pas forcément d'avoir de hauts scores d'audience. Gossip Girl est une des séries dont on parle le plus en ce moment, pourtant ses scores sont faibles. La promotion faite avant la diffusion du pilote a payé : le premier épisode a été suivi par 3,65 millions de téléspectateurs et elles sont tombées bien bas pour les épisodes suivants, naviguant entre les hauts et les bas des 2 millions de téléspectateurs alors que les frères Scott a fait une moyenne d'un peu plus de 3 millions de téléspectateurs pour sa cinquième saison la même année (pour prendre une série qui vise la même cible d'âge et qui est diffusée sur la même chaîne) Et les couvertures de magazines avec les actrices de Gossip Girl se multiplient, et même si les audiences baissent, on parle de Gossip Girl parce que ça plaît et que c'est stylé. Les votants des Teen choice awards ont récompensé Gossip Girl (6 récompenses début août 2008) et je suis prêt à parier que la vente des bouquins dont la série est basée a augmenté depuis la diffusion de la saison 1 sur la CW.
Parle-t-on aussi souvent de Brothers and Sisters qu'on parle de Prison Break ou Lost dans les rues ? Je ne sais pas si c'est vrai, mais je me souviens avoir lu il y a pas mal de temps une interview de Kristen Bell révélant qu'elle discutait de la saison 1 de Heroes alors qu'elle tournait la saison 3 de Veronica Mars : encore une preuve qu'on parle toujours des mêmes séries. L'arrivée de Heroes sur tf1 l'été dernier était un événement qu'il ne fallait pas louper disaient les sites internet. Ils se sont bien ridiculisés puisque la série a fait un bide complet. Heroes a débarqué sur NBC en 2006, tf1 commande les deux saisons. Brothers and Sisters a débarqué au même moment que Heroes et pourtant tf1 n'a toujours pas diffusé un seul épisode de cette première. Et la série est de bien meilleure qualité mais on sait que le public appréciera toujours plus les Prison Break et Lost que les Brothers and Sisters et Friday Night Lights puisque leurs concepts tapent à l'oeil, sont alléchants et addictifs.
On aimerait presque dire qu'une série familiale, un poil sentimentale ne fera jamais un carton en France (mettons de côté les succès inexpliqués style 7th Heaven qui ne vont pas dans la logique des succès de PB, Desperate Housewives et autres). Les séries touchent avant tout un public relativement jeune en France et il faut que les ingrédients plaisent aux jeunes : de l'adrénaline, une touche de drame, un concept original et un mélange efficace des genres. Brothers and Sisters et Desperate Housewives ne sont pas si différentes dans les grandes lignes (si on enlève le côté familial de BS, les deux séries suivent le même schéma : montrer le quotidien (mouvementé) des personnages). Mais Desperate Housewives a un côté plus scandaleux, plus over the top qui plaira rapidement à la tranche d'âge ciblée et qui manque à Brothers and Sisters ou Friday Night Lights, pourtant je les considère comme de meilleure qualité. Dirty Sexy Money, par exemple, est à mi-chemin entre un Desperate Housewives et un Brothers and Sisters.
On peut alors dire que le public français friand de télévision pop-corn est très exigeant : pour qu'une série fasse un carton, il faut que le pitch de départ soit novateur et que le ton de la série soit poussé à l'extrême, passant à côté du réalisme ou de la logique.
C'est pourquoi beaucoup avaient hâte de l'arrivée de The Nine en octobre 2006 puisque sur papier le pitch avait l'air extrêmement intéressant. Certains prévoyaient même un succès à la Lost alors que la série a été annulée après 13 épisodes et que la déception était de mise : la série qui tournait initialement autour d'une prise d'hôtages a pris un tournant soap et est devenu une série un peu gentillette pour le goût du public, se permettant de simplement suivre le quotidien des survivants de ce drame. Je pense que c'est un exemple que je garderai toujours en tête puisque c'est une série qui montre exactement ce que cherche le fan de tv français : de l'action, du rythme et un peu de drame ce que promettait la série en question mais ce qu'elle n'a pas offert. Et elle était diffusée aux Etats-Unis puis tard le soir sur france 2 l'année passée.
Pour ceux qui ne le savent pas, The Nine est une courte série se focalisant sur un cast assez large ayant subi une prise d'otages dans une banque pendant 52 heures. Le pilote nous montre seulement le début de la prise d'otages et la zappe complètement, nous promettant de montrer à chaque début d'épisode un extrait de la prise d'otage. Ce qu'elle fait mais beaucoup trop discrètement. 90% de la série se concentre sur ce qui se passe après la prise d'otage: comment un groupe d'étrangers se découvrent et le rythme alors promis comme rapide devient facilement lent et le développement des épisodes (à quelques exceptions près) laborieux. Il y a donc deux facettes totalement antithétiques à cette série qui expliquent son échec. Je me souviens avoir lu sur un forum une personne qui a bien expliqué l'échec de The Nine : elle était présentée comme une série tape-à-l'oeil avec beaucoup d'action donc les amateurs du genre ont regardé mais ont été déçu et les autres qui préfèrent les séries plus "lentes" sont passé à côté alors que la série allait les combler puisque c'est ce qu'elle a proposé. Bon évidemment il y a d'autres éléments mais pour ma part, The Nine illustre parfaitement le problème traité et les attentes du public francais : l'opposition entre un Prison Break qui marchera ou un Brothers and Sisters qui ne marchera pas.
Je dis public français parce que la majorité des séries diffusées en France sont des grandes séries aux USA. Brothers and Sisters marche plutôt bien aux Etats-Unis (moins en saison 2) mais on sait qu'elle ne fera jamais un carton en France comme Lost en saison 1. On peut donc dire que le public américain est plus indulgent que le public français. Il n'y a qu'à à voir les séries américaines qui sont diffusées en France (je ne parle pas de succès) : la trilogie du samedi sur m6 avec Kyle XY il y a quelques mois, Prison Break, Heroes, Lost, Desperate Housewives, House, Supernatural, Grey's Anatomy, Ugly Betty, Ghost Whisperer, les Experts, One Tree Hill... Bref, toutes des séries plus au moins atypiques ou un poil superficielles avec soit un côté soap qui peut plaire aux ados (DH, GA, UB, OTH...) soit du fantastique (Heroes, Supernatural, Ghost Whisperer, Kyle), un ton plus virulent (Prison Break, les Experts) etc... Ce qui peut expliquer l'échec de FNL sur NRJ12. Des séries où la dimension familiale est plus importante (Newport Beach, Everwood) sont passées inapercues (il y a aussi la programmation foireuse de france 2 qui joue un rôle). Alors qu'elles ont toutes les deux bénéficié de 4 saisons aux USA. Il y a quand même une grosse différence d'exigences entre les deux pays.
Et là j'en viens au sévère problème de la qualité entre les deux groupes de séries : les séries trop médiatisées se font bouffer par leur succès. Lost, Desperate Housewives, Heroes, Prison Break, ... Toutes les séries mises sur le podium relâchent le niveau à un moment ou à un autre. Certes aucune série n'est parfaite mais c'est presque un reflexe qu'ont les séries médiatisées à se reposer sur leurs lauriers et proposer des épisodes tantôt improvisés tantôt transitoires. On s'en fout : le bouche-à-oreille perpétuel fonctionne et du moment qu'on parle de leur série, la qualité c'est pas important. Un sentiment de laisser-aller qu'on ne retrouve pas dans les séries moins connues et pour cause.
Mais évidemment il ne faut pas cracher sur les séries médiatisées. Si la qualité disparaît, ça veut bien dire que le niveau était haut en premier lieu. Ainsi, la première saison de Prison Break était géniale, l'idée de génie était bien exploitée et le tout était hautement addictif. Son succès était mérité. Pourtant ce que j'ai vu de la troisième saison ne m'a absolument pas plu et a réussi à me faire décrocher d'une série que je décrivais comme imbattable il y a longtemps (et ce, en trois épisodes). Idem pour Desperate Housewives et Lost dans une moindre mesure.
Le problème avec Desperate Housewives c'est que c'est une série extrêmement bancale. Elle peut offrir des trucs bien comme elle peut offrir des trucs beaucoup moins bien (un peu comme Lost). Faut juste que les scénaristes s'y donnent un peu. Mais voilà le problème : les scénaristes ne font aucun effort, ne prennent aucun risque et profitent de leur succès. En un sens, ils sont gagnants partout : la série fonctionne donc leur boulot l'année prochaine est garanti. Et Marc Cherry s'assure que ses débuts de saison sont bons pour qu'il n'ait pas à s'excuser comme l'a fait Tim Kring. Et il y a tout simplement des succès inexpliqués où les séries sont ratées dès le départ, j'ai cité The Secret Life of the American Teenager (plus grand succès pour ABC Family pour un pilote et a remporté le Teen choice award du meilleur show d'été récemment).
On peut aussi parler des séries du câble : Dexter, Damages, Dirt, Californication, ... Où les classer ? Si on met les deux dernières de côté, on peut quand même dire que Dexter et Damages ont des pitchs accrocheurs et dont on peut envisager un succès en France, l'aspect violence et choc négligé. Certes le sujet du serial killer est tout sauf nouveau (Twin Peaks, Oz, Heroes, les films Se7en et Mr Brooks) mais le traitement est différent et surtout le choix d'intrigues est à la fois risqué et extrêmement engageant pour le téléspectateur. À la hauteur de l'adrénaline que pouvait provoquer Prison Break en première saison. Et on peut facilement dire la même chose pour Damages. C'est surtout sur le cable qu'on trouve les bonnes séries et qui le restent sur le long terme. Maintenant, allez savoir pourquoi The Secret Life of the American Teenager et One Tree hill fonctionnent alors qu'on avait Veronica Mars sur UPN.
On peut aussi prévoir que telle série sera un succès en avance, ou presque. Qui a déjà entendu parler de Gary Umarried ou de This might hurt, toutes les deux des séries prévues pour la saison 2008/2009 ? Personne. Mais qui a entendu parler de Fringe, Dollhouse, True Blood, 90210 ? Tout le monde. Parce que Fringe est créée par JJ Abrams, Dollhouse par Joss Whedon, True Blood par Alan Ball et 90210 est le spin-off de Beverly Hills 90210. Les gens attendent à l'avance des projets dans lesquels ils savent que tel acteur fera partie du casting ou que tel showrunner fera partie de l'équipe de production. C'était le cas notamment de Pushing Daisies l'an passé avec son créateur Bryan Fuller. Ce qui explique la promotion excessive faite autour de Fringe ou de l'attente pour le pilote de Dollhouse.
Bref, un article pour démontrer que le succès atteint les séries d'une manière ou une autre. Certaines en profitent trop, d'autres doivent l'atteindre et d'autres encore l'ont déjà avant même d'avoir un épisode de diffusé. Tout un processus qui peut même déteindre sur la qualité d'une série. Je vous laisse proposer votre avis dans les commentaires !
Sources principales : Nielsen Media Research / the futon critic