Par Foundation for Economic Education.
J’ai récemment eu l’occasion de relire le Manifeste communiste de Karl Marx. Près de vingt ans s’étaient écoulés depuis ma première lecture du texte à l’université et je ne me souvenais guère que des antagonismes de classe, du matérialisme de Marx et de l’exploitation du prolétariat.
Mais la crise actuelle au Venezuela m’a conduit à réfléchir une fois de plus à la philosophie socialiste et communiste qui se cache derrière la crise en cours.
Ce que j’ai trouvé
Avec ses 60 pages seulement, le Manifeste est étonnamment léger par rapport à la plupart des textes philosophiques canoniques. Après avoir exposé le rôle historique des antagonismes de classe et la nature formatrice de la production au sein de la société, Marx entre dans les détails de ce qu’il faut faire pour former une nouvelle société socialiste.
C’est dans la deuxième section du Manifeste que Marx note dix mesures nécessaires à l’instauration d’un État socialiste. Parmi celles-ci figurent l’abolition de la propriété privée et l’abolition des droits de succession. Marx appelle ensuite à la centralisation de la production et du crédit entre les mains de l’État.
Plus encore, il demande que l’État exerce un « monopole exclusif » sur tous les crédits et tous les moyens de production. Le point six de la liste affirme que toutes les communications et tous les « transports » doivent être centralisés et contrôlés par l’État. Enfin, la mesure huit note qu’il y a une « obligation égale de tous à travailler » avec des « armées industrialisées » établies pour l’exécution du travail nécessaire.
Marx reconnaît que ces mesures ne peuvent être réalisées pacifiquement :
« Bien sûr, au début, cela ne peut être réalisé que par des atteintes despotiques aux droits de propriété ».
En d’autres termes, par la force. La force est concentrée dans les mains de l’État, puis utilisée pour instaurer un nouvel ordre socialiste.
Là où Marx se trompe
Quels sont les droits dont disposent les individus pour les protéger de tout le pouvoir qu’exerce l’État socialiste de Marx ?
Au-delà du rejet du droit à la propriété, du droit à la liberté d’expression, du droit à l’information non contrôlée par l’État, du droit de choisir son travail ou de l’accumulation de la richesse individuelle, Marx ne dit rien sur les droits dont disposent les citoyens de ce nouvel État.
Il n’offre qu’une vague allusion à une « vaste association de toute la nation » qui, d’une certaine manière, nie la nécessité de droits garantis par la Constitution ou de processus démocratiques.
Le pire est que l’État socialiste de Marx est si singulièrement puissant qu’il n’existe aucun recours pour les citoyens une fois que le pouvoir a été centralisé. L’attente de Marx concernant l’abandon du pouvoir à cette « vaste association » n’est pas accompagnée d’un mécanisme par lequel cela est censé se produire. L’étape cruciale par laquelle le pouvoir socialiste de Marx devient celui du peuple plutôt que celui de l’État n’est même pas décrite sur papier.
Pourquoi c’est important
Les rapports inquiétants sur les violations importantes et généralisées des droits de l’Homme au Venezuela ne sont pas le résultat d’une mauvaise application, d’une mauvaise exécution ou d’une mauvaise compréhension du socialisme.
C’était, étape par étape, la mise en œuvre de l’État socialiste de Marx tel que préconisé par Marx lui-même. Depuis les premières attaques contre la propriété privée et la redistribution des richesses jusqu’à la nationalisation des communications, de l’énergie, des finances et de l’industrie, nous voyons l’appel de Marx à centraliser le pouvoir dans l’État. La conviction de Marx que l’État socialiste n’exercerait pas ce pouvoir simplement pour le plaisir du pouvoir était une grave erreur de calcul.
L’appel de Marx à centraliser tant de fonctions clés au profit de l’État donne tellement de pouvoir à celui-ci qu’il n’existe aucun contrôle ou équilibre à ce pouvoir. Nous ne pouvons pas être surpris que l’État de Marx n’exerce pas ce pouvoir au profit de quelqu’un d’autre que lui-même. Il n’y a pas d’idéologie qui puisse protéger un peuple des abus d’un pouvoir incontrôlé. L’histoire tend à montrer que l’idéologie n’est pas pertinente. Là où le pouvoir a été amassé et incontrôlé, il a abusé. Ce sont des faits de la nature humaine tellement ancrés dans l’histoire qu’ils sonnent plus vrais que tout autre.
L’appel du Venezuela au travail forcé dans les fermes n’est pas une réponse imprévisible à des pénuries alimentaires imprévisibles. La famine et l’appel au travail forcé, les « armées industrielles » de Marx, sont tous deux explicites dans le texte, intégrés dans l’idéologie.
Tant que nous continuons à pointer du doigt toutes les causes au-delà de la philosophie elle-même, nous permettons à la société de poursuivre son idylle avec l’idéologie socialiste et communiste. Nous ne voyons pas où les idées elles-mêmes préparent le terrain pour la rétraction, plutôt que l’expansion, de la liberté et de l’épanouissement humains. Nous ne voyons pas le Venezuela avant que le Venezuela ne se produise.