De la convergence dans l’air !

Publié le 16 octobre 2022 par Jean-Emmanuel Ducoin

Le succès de la marche parisienne, ce dimanche, à l’appel de la Nupes, en témoigne. Le rapport de forces est entamé. 

L’histoire de Prométhée, toujours recommencée, nous instruit sur notre volonté autant qu’elle nous incite à la prudence. Et pourtant. Si chaque mouvement social possède sa logique propre et s’adosse toujours à son époque, la bataille en cours pour l’augmentation des salaires et contre la «vie chère» s’avère désormais si puissante, partout dans le pays, qu’elle dit quelque chose d’essentiel sur notre société et les crises cumulées. Alors que, dans le tréfonds des foyers, une colère de moins en moins sourde se propage à la vitesse des fins de mois difficiles sinon impossibles, la grève des travailleurs des dépôts et raffineries, entamée voilà trois semaines, a servi de détonateur dans un contexte social déjà éruptif. En vérité, tout était en place pour que cette mobilisation, en apparence sectorielle, devienne l’affaire de tous les salariés. Et que ces derniers s’en emparent, prennent le relais.

Les inquiétudes et les ras-le-bol fonctionnent comme une poudrière, tandis que, malgré les injustices flagrantes et les inégalités, le duo Macron-Borne continue d’imposer les pires régressions sociales. La situation internationale anxiogène se mêle aux obstacles de la vie quotidienne, qui laminent les familles populaires de l’intérieur. Comment payer son loyer ? Comment remplir son chariot de courses, bien avant les fins de mois ? Et, d’ores et déjà, comment ne pas subir l’angoisse de ne plus pouvoir honorer ses futures factures d’énergie ? La flambée des prix pèse comme une menace existentielle, se transformant en une « obsession » qui écrase tout sur son passage, sachant que le niveau de la chute de l’indice du salaire mensuel de base continue de s’effondrer…

Le succès de la marche parisienne, ce dimanche, qui a réuni plus de 100.000 personnes à l’appel de la Nupes, en témoigne: il y a de la conjonction et de la convergence dans l’air ! Et nous ne pouvons que souhaiter l’élargissement vers une mobilisation générale pour obtenir une hausse des salaires. Mardi 18 octobre, les grèves toucheront cette fois tous les secteurs, la pétrochimie, le privé, le public. Le rapport de forces est entamé. Pour l’heure, le gouvernement refuse d’augmenter les salaires, avec tous les leviers dont il dispose: le Smic, le point d’indice, l’indexation sur l’inflation, la taxation des superprofits pour redistribuer les richesses. L’y contraindre n’est plus impossible – juste à portée de luttes.

[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 17 octobre 2022.]