Tandis que, partout dans le monde, le rythme de fermeture des agences s'accélère, l'américaine JPMorgan Chase programme la disparition à terme de la dernière activité qui requérait impérativement une (lourde) installation physique : la location de coffres-forts. Une fois cette étape franchie, la banque pourra devenir intégralement virtuelle.
La transition sera douce pour un des vestiges emblématiques du secteur mais elle paraît irréversible. En effet, à ce stade, et en attendant une probable accélération dans quelques mois, l'établissement annonce uniquement ne plus accepter aucune nouvelle ouverture, ce qui, incidemment, signifie aussi que les clients qui disposent actuellement d'un coffre dans une implantation condamnée par une restructuration ne pourront transférer leur contrat existant (ni leurs précieux objets et documents) vers une autre succursale.
Comme pour tout ce qui touche à la transformation des réseaux, ce sont des considérations de coûts qui conduisent vraisemblablement JPMorgan Chase à une telle décision. Non seulement l'aménagement d'une salle sécurisée (le dernier lieu à protéger dans la banque, de nos jours) est-elle onéreuse mais le personnel qui l'opère représente également une charge importante, que le surcroît de revenus, directs et indirects, générés par les utilisateurs, estimé à 14% en moyenne, ne parvient pas à justifier.
Apparemment, la crainte de froisser une clientèle plutôt aisée (et de plus de 50 ans, donc certainement ancienne) n'entre pas en ligne de compte. La stratégie sous-jacente est claire : après le mouvement généralisé vers la délégation de la gestion des espèces, en particulier dans les distributeurs automatiques, l'institution veut se débarrasser d'un autre métier encombrant, peu (voire pas du tout) rentable, aux contraintes insupportables, dont sa dimension matérielle, ressentie comme un anachronisme au XXIème siècle.
L'initiative est finalement logique dans la perspective d'une transition voulue du rôle de la banque de proximité vers le conseil, en écartant systématiquement toutes ses fonctions transactionnelles. Le principe soulève tout de même deux problèmes majeurs. D'une part, l'exécution des opérations du quotidien reste un puissant facteur d'attraction et de fréquentation de l'agence : le risque de désaffection croît à chaque abandon de service.
D'autre part, le modèle cible n'a guère besoin d'interactions en face à face, surtout quand celles-ci sont essentiellement centrées sur la vente indifférenciée de produits, qui, il ne faut jamais l'oublier, sont totalement dématérialisés. Le client est alors de plus en plus enclin à basculer sur les outils « digitaux », et entretient ce faisant un cercle vicieux qui tend automatiquement vers la superfluité d'une présence physique…