Magazine Société

Éloge funèbre de Guillaume Tell, de François Cherix

Publié le 08 octobre 2022 par Francisrichard @francisrichard
Éloge funèbre de Guillaume Tell, de François Cherix

Que l'histoire de Guillaume Tell soit vraie ou qu'elle soit légendaire n'a au fond pas d'importance. Ce qui importe, c'est la signification qu'on lui donne et sur laquelle il ne devrait pas y avoir polémique.

Guillaume Tell n'a pas voulu s'incliner devant le chapeau, placé en haut d'un mât, du bailli des Habsbourg, Hermann Gessler. Il n'a donc pas voulu rendre hommage à l'effigie d'un oppresseur par délégation.

Guillaume Tell symbolise sans conteste la liberté, la résistance à l'oppression. Cependant François Cherix a une autre version. Il voit en effet dans son histoire comme l'inverse d'un isolationnisme craintif.

Son raisonnement est le suivant: l'Union européenne ferait comme Tell, en ne s'inclinant pas devant des régimes autoritaires ou des marchés sans contrôle. Refuser de la rallier serait tuer Guillaume Tell.

Le 26 mai 2021, chose aurait été faite. Ce jour-là, pourtant, la Suisse ne s'est pas inclinée devant l'Union européenne et n'a pas signé, pour accéder à son marché, son projet d'accord institutionnel contraignant.

François Cherix, dont la plume est talentueuse, peut dès lors prononcer l'Éloge funèbre de Guillaume Tell. Mais c'est un tour de passe-passe, parce que l'Union européenne n'est pas du tout ce qu'il prétend.

L'Union européenne n'est pas la construction voulue à l'origine, p.ex., par un Robert Schuman. Pour faire la paix entre les pays membres de l'Union, il souhaitait seulement qu'ils commercent entre eux.

Par idéologie, un Jean Monnet, lui, a voulu bâtir son unité politique. L'idéal de liberté originel a alors été abandonné pour faire place à un monstre technocratique multipliant lois, normes, réglementations.

Au lieu que le droit naturel soit défendu, un droit positif ne respectant pas les libertés individuelles a été élaboré et imposé d'en haut avec pour résultat de réduire l'autonomie des membres et leur soumission.

Cette idéologie, qui donne un pouvoir exorbitant à des dirigeants non élus, plaît à l'auteur, qui ne rêve que de mutualisation des dettes, de relance keynésienne, de green new deal et de régulation numérique.

Rien n'est moins suisse que cette idéologie interventionniste, à des années-lumières du fédéralisme et de la prospérité suisse, qu'elle doit à une grande liberté et notamment dans le domaine économique1.

Les échanges libres, bien que relatifs en raison des obstacles bureaucratiques dressés par Bruxelles, ont permis aux pays membres de se développer et non pas les aides, qui sont oreillers de paresse.

Aujourd'hui le danger pour l'Europe ne vient pas des nationalismes mais du super-étatisme bruxellois, qui a remplacé désavantageusement les Habsbourg et dont l'un des baillis s'appelle von der Leyen.

Francis Richard

1 - La Suisse n'est donc pas repliée sur elle-même. Si, comme le dit l'auteur, elle représente les beaux quartiers européens, elle le doit aux libertés individuelles qu'elle défend chez elle et à son ouverture sur le monde qui ne se réduit pas à l'Europe.

Éloge funèbre de Guillaume Tell, 160 pages, Éditions de l'Aire


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Francisrichard 12008 partages Voir son profil
Voir son blog

Magazine