François Pitavy est décédé en mai de cette année. Il fut un formidable traducteur du plus terrible des romans de William Faulkner, If I forget Thee, Jerusalem/ Si je t’oublie, Jérusalem. Il avait repris l’ancienne traduction due à Maurice-Edgar Coindreau (1952) et en a produit une vive révision. Avec une nette lucidité des enjeux et justifiant une tentation d’époque (1952), tentation « de classiciser Faulkner, de rendre sa langue plus conforme au ‘génie ‘ de la langue française. Les phrases longues ont été parfois coupées, reponctuées, d’innombrables virgules ont été ajoutées et certaines structures grammaticales complexes ont été réorganisées et mieux hiérarchisées. » (Si je t’oublie, Jérusalem, L’imaginaire / Gallimard, Préface). Or, François Pitavy a su lire que « la syntaxe et la ponctuation de Faulkner sont loin d’être orthodoxes – elles sont faulknériennes ». Sa traduction va donc « s’approcher au plus près de la syntaxe particulière » de l’écrivain dont elle restituera certaines phrases ou périodes immenses mêlant ou alternant langues classique, vernaculaire et de poésie.
Le titre du roman (que ses premiers éditeurs avaient écarté) provient du Psaume 137, son verset 5. Traduction en anglais : « If I forget Thee, O Jerusalem, let my right hand forget her cunning”. En français : « Si je t’oublie, Jérusalem, Que me tombe ma main droite ». Relisant le roman et sa traduction par François Pitavy on ne dira pas comme le font les New-Yorkais Forget it (« Laisse tomber ! »)
Claude Minière