Björk so far | Part I : 1993-2011 ~ Björk so far | Part II : 2015-2017
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Depuis Biophilia, qui, à mon avis, marque un tournant dans la façon de créer des albums, pardon, des œuvres chez elle, Björk est définitivement entrée au Panthéon de la musique comme l’a fait une certaine Madonna ou comme sont en train de le faire progressivement des artistes telles Beyoncé ou Lana Del Rey.
Dès lors, pas étonnant que l’un des plus célèbres musées du monde lui aient consacré toute une rétrospective lui étant totalement consacrée. De même, l’artiste ne serait-elle pas, en partie tout du moins, à l’origine de l’attrait de l’Islande pour tellement d’artistes qui viennent y enregistrer leur musique, voire s’installe sur l’île pour y résider, à l’instar d’un ou, encore plus symbolique à mon avis, Damon Albarn (dont les groupes Blur et Gorillaz sont assurément deux phénomènes historique pour le premier, et toujours en pleine expansion pour le second, dont un nouvel album est annoncé pour février prochain).
Retour sur les deux derniers albums de l’artiste islandaise par excellence, alors que Fossora arrive dans quelques semaines seulement et que toute une série de podcasts consacrés à chacun de ses albums studios intitulée Sonic Symbolism vient de voir le jour, en commençant par le prophétique Debut qui aura bientôt 30 ans.
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Premières notes. Un certain Homogenic semble présent dans l’ambiance des sept minutes de « Stonemilker », un son très familier, et presque nostalgique donc. Plus exactement, et quand on sait que Homogenic était empli de l’influence de ce que Björk avait pu écouter toute petite, il est évident que ce premier titre est tout simplement islandais. Ensuite, « Lionsong » débute, lui, à la Medúlla pour ce qui est des voix ou plutôt des chœurs, avant de nous rappeler Vespertine et ses cliquetis par milliers. Six nouvelles jolies minutes telles qu’on les aime ! Pour autant, ses deux morceaux d’ouverture possèdent une personnalité mixte : au-delà de la simple nostalgie, ils nous ouvre une nouvelle ère pour l’Islandaise qui, bien que ses derniers albums étaient très bons, avait donné l’impression de ne plus pouvoir nous surprendre réellement. Une erreur que Vulnicura répare aisément. Et puis je n’oublie pas à quel point j’avais tout d’abord dédaigné Volta avant de le comprendre enfin. Il me reste à percer le mystère de Biophilia, auquel je suis tellement hermétique. Vulnicura m’aidera assurément à combler le fossé entre lui et Volta. « History of touches » vient, en trois petites minutes, clore cette ouverture, puisque les trois premiers morceaux sont sous-titrés respectivement 9, 5 et 3 months before.
La seconde partie de l’album est à nouveau un triptyque, cette fois-ci de l‘après. L’épique « Black lake », sous-titré 2 months after, en dix minutes soit le plus long morceau publié sur un de ses albums à ce jour, me rappelle encore des moments d’Homogenic. Pourtant, encore une fois, il s’y attache autant qu’il s’en éloigne. Oui, Björk réussit une prouesse énorme, avec une montée d’adrénaline ébouriffante ! À ce moment-là, je ne peux dire qu’une chose : Vulnicura a déjà tout de l’album de l’année. Et je n’ai même pas l’impression ni d’exagérer ni de manquer d’objectivité. 6 months after ou « Family » nous prolonge dans la longueur, et même dans la langueur. Il me faudra le réécouter pour mieux le comprendre celui-là. Tant mieux ! « Notget » redescend un peu sur terre, en six minutes et 11 months after. Tiens, je ne vous ai toujours pas dit de quoi il s’agit : avant quoi ? Après quoi ? Le triptyque final étant lui sans sous-titre, on commence à deviner un peu mieux la construction de l’album. Pour le reste, j’espère que vous comprenez un peu l’anglais pour cerner plus exactement tout ça. Car je ne vais quand même pas tout dévoiler, surtout pas dès la première écoute. D’ailleurs, je vais m’arrêter là. Je ne dirai rien de plus sur « Notget » si ce n’est qu’il ressemble à du Vulnicura.
Passons ainsi au duo avec Antony Hegarty « Atom dance », encore en huit minutes. Je me souviens encore de sa voix sur Volta, par la même occasion ma découverte de l’artiste anglais. En 2010, le duo « Flétta » sur Swanlights m’avait, à l’inverse, plutôt déçu. Alors ? Eh bien, c’est exactement ce que Björk et Antony pouvaient nous offrir de mieux pour 2015 ! En attendant un nouvel album studio d’Antony And The Johnsons qui se laisse attendre depuis cinq ans déjà… Je place pour l’instant « Mouth mantra » dans le même panier que « Notget » car il n’est pas immédiatement accessible. Enfin, « Quicksand » termine en moins de quatre minutes un album finalement long avec au total six titres dépassant les six minutes, dont deux de huit minutes et un de dix minutes !
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Vous l’aurez compris, il s’agit là d’une rétrospective complète de l’icône contemporaine sous la forme de cinq volumes, 192 pages au total, un poster, pour un total de 224 illustrations en couleur ou en noir et blanc.
La couverture de chacun des livres II à V est parée des tablatures et paroles de quatre chansons écrites et composées par Björk : ainsi, « Pagan poetry », « All is full of love », « Aurora » et « Cover me » succèdent au livre et sa frise chronologique allant de sa naissance en 1965 à Reykjavík à l’annonce en 2014 de la rétrospective lui étant consacrée.
Le tout, dans un coffret qui – une seconde fois – fait un clin-d’oeil au huitième album avec les tablatures et paroles de « Black lake », ce qui n’est pas un hasard puisque le clip avait, justement, été montré en avant-première lors de l’exposition. Une exposition qui a été très critiquée et restera donc comme un échec ; ce qui n’est, heureusement, pas le cas de ce coffret qui, lui, mérite les éloges qu’on lui attribue.
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Revoici donc Björk avec un neuvième album studio (si l’on excepte ses bandes originales pour des films), dont il est évident qu’il doit être écouté dans la continuité direct du précédent. Sans revenir sur l’aspect personnel et curatif de Vulnicura, Utopia ouvre un champ totalement libre à l’optimisme, au rêve, à un futur nouveau. L’incontournable artiste vénézuélien(ne) Arca n’y est probablement pas étranger non plus, lui qui avait déjà grandement participé au succès du précédent album il y a deux ans.
Personnellement, si j’appréciais tout ses albums jusqu’à Volta inclus, je n’ai découvert enfin réellement Biophilia que dernièrement, tant il m’avait toujours paru hermétique dans son entièreté. Idem pour son successeur Biophilia, dont les échos avec Homogenic sont de surcroît d’une troublante évidence. Dès lors, que dire du nouveau sans paraître des plus subjectifs ? En cette fin d’année 2017, je me tairais et vais donc de ce pas laisser se développer, à son rythme, cet Utopia sans concession au visuel clinquant et horriblement esthétique.
Assurément, Björk ne semble pas prête à se reposer avec Utopia puisqu’il s’étend sur plus de 70 minutes. Et dire que son tout premier disque, alors qu’elle n’était qu’une enfant, remonte à 1977… bien avant les années 90 et le cultissime Debut.
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(in Heepro Music, le 05/09/2022)
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