Si le style est assez proche de Fauve : même discours nihilisme, même son minimaliste, il semble y avoir un décalage entre les paroles et l'attitude. Comme si Gwendoline avait déjà dépassé le stade de la colère (guerre, capitalisme, écologie) pour une certaine résignation. Nous quittons quand même la scène après 20 minutes, persuadés d'en avoir entendu assez. On passe subrepticement devant le concert de Jenny Beth, ancienne chanteuse du groupe Savages et présentatrice d'une excellente émission live sur Arte "Echoes with Jenny Beth". Si la jeune femme a des goûts très assurés en terme musical, sa musique à elle m'ennuie un peu. On est dans une vaine démonstration de force. Les muscles plus que le cerveau. On file donc très vite devant la grande scène pour attendre la prestation de l'énigmatique néo-zélandaise Aldous Harding. Après 45 minutes, le mystère n'est pas levé : toute de noir vêtue, pas d'échange avec le public, un visage impassible ou plutôt carrément ailleurs, comme si elle aurait préféré ne pas être là. Pour la musique, impeccable. Pour autant, pas sûr qu'elle s'attire beaucoup de sympathie en snobant ainsi l'assistance. On enchaine direct avec les new-yorkais de DIIV, aux guitares tout en reverb. Les chanteurs alternent mais là n'est pas l'essentiel. Les guitares reprennent rapidement le dessus. Si leur premier album, "Oshin" m'avait bien plu, j'ai décroché dès le suivant. Pas désagréable, cela manque quand même de chansons marquantes, hormis peut-être la dernière, assez fulgurante, "Blankenship". Dommage qu'ils n'aient pas commencé par là.
On repart ensuite à la grande scène voir nos perpignanais de Liminanas et là, c'est de suite, la baffe dans les oreilles. Attention, ça va saigner, le son est lourd, très lourd et psyché. La batterie est mise clairement en avant de la scène. Là encore, les voix, n'ont qu'un aspect décoratif - pas de Bertrand Belin à l'horizon, donc. C'est le son et quel son ! Il y aura même deux reprises, le légendaire "Mother Sky" de Can qui aura fait tourner la tête de nombre de musiciens - n'est-ce pas Geoff Barrow ? - et "Teenage kicks", classique éternel des Undertones. Si le premier morceau est bien dans l'esprit des Liminanas, le choix du second est plus étonnant, car sec, rageux et expéditif. Après ça, il nous faut carrément parcourir tout le site pour rejoindre la scène du Bosquet pour écouter les charmantes filles de Los Bitchos, formation Erasmus, car mélangeant une sud-américaine, une britannique, une suédoise et une australienne. Leur musique est un cocktail instrumental bien rafraîchissant et on peut dire qu'elles savent mettre l'ambiance. Elles terminent par une bien jolie reprise du "Tequila" de The Champs, classique de...1958.
Cette fois, pas grand chose à se mettre sous la dent, après ça. Un petit creux dans la programmation qui nous permet de... manger évidemment. On essaie quand même d'aller voir London Grammar mais rapidement on file se positionner et récupérer nos lunettes 3D pour assister à un des deux concerts tant attendus de la soirée. Les allemands de Kraftwerk balancent un set diablement bien rodé qui parcourt le meilleur de leur discographie. Ils réussissent l'exploit de moderniser leurs différents hymnes. La version de "Radioactivity" est incroyablement dansante. C'est simple, Kraftwerk est à l'électronique ce que les Beatles sont à la pop. On les avait vus à la Philharmonie de Paris il y a quelques années pour quasiment le même spectacle mais c'est dans le cadre d'un festival que leur musique prend toute son ampleur. Et puis on ne se passe pas de voir voitures, trains ou autres numéros filer droit sur nous grâce à nos lunettes 3D.