Encore réservé à quelques niches d'activité, le développement logiciel sans code (« no-code ») ou presque (« low-code ») attire sérieusement l'attention des institutions financières. La récente prise de participation de trois grands noms de Wall Street dans Genesis Global illustre la dimension stratégique que le mouvement est en train de prendre.
Entre besoins quasiment infinis dans une industrie qui dépend toujours plus des technologies et tensions sur le marché des talents, il est évident que les solutions susceptibles d'accroître la productivité des informaticiens, voire de permettre à des non professionnels de créer des applications complètes, ont de quoi faire rêver, même si les réticences persistent largement à leur adoption dans des domaines critiques. Leur niveau de performance et leur maturité laissent désormais entrevoir un point d'inflexion.
Le financement, à hauteur de 20 millions de dollars, qu'apportent Bank of America, BNY Mellon et Citi à Genesis Global constitue un des signaux de cette évolution en cours, confirmée, en outre, par la volonté concomitante clairement affichée des trois établissements de renforcer de la sorte leur collaboration opérationnelle avec la jeune pousse, afin, notamment, d'accélérer leurs démarches d'innovation et mieux répondre aux attentes de leurs clients, dans les métiers de banque commerciale et d'investissement.
Mais, au fait, pourquoi ce choix de Genesis Global ? L'entreprise possède un atout essentiel par rapport aux leaders, pourtant déjà bien implantés, de son marché : elle s'est fortement spécialisée sur le secteur spécifique de ces acteurs. Présentée comme un couteau suisse, capable aussi bien de remplacer (avantageusement) des macros Excel complexes que de générer des applications de trading ultra-sensibles, sa plate-forme est pré-intégrée avec les outils standards en vigueur dans l'univers de la finance.
Cependant, derrière cette supériorité indéniable, l'insistance des uns et des autres à souligner la possibilité de développer facilement et rapidement des solutions riches s'appuyant sur les socles historiques (le « legacy ») de la banque, grâce aux connecteurs disponibles, soulève une certaine inquiétude. En effet, le risque est immense, dans ces circonstances, de multiplier les adhérences avec des couches logicielles déjà obsolètes, qui deviendront ainsi de plus en plus difficiles à remplacer.
Il faudrait envisager une remise à plat de l'architecture globale du système d'information, et, en particulier, de ses mécanismes d'isolation logique, de manière à écarter le danger. Malheureusement, la tâche est extrêmement ardue, elle requiert une expertise de haute volée et une parfaite connaissance de l'existant : les nouveaux adeptes du « low-code » assumeront-ils l'effort nécessaire (en auront-ils simplement les moyens)… ou se contenteront-ils d'une approche superficielle, quitte à hypothéquer leur avenir ?