« Ce qui manque dans mes carnets, ce sont les journées : tout ce temps passé à vivre, à vaciller et à hésiter ; ce qui y figure, ce ne sont que des moments de sécurité, infiniment courts, déjà périmés à l’instant où je les note, que je n’ai griffonnés que pour les renier ensuite avec volupté.
Les fragments les plus faibles sont ceux que j’ai écrits en tant que fragments : fermés d’avance, retenus, affûtés, afin de respecter dès l’origine la brièveté prescrite. Les meilleurs, quant à eux, sont extraits d’une masse de poèmes sans valeur, qui sont (littéralement) arrachés à leur contexte pour être conservés en tant que fragments réussis. Mais ils n’étaient pas destinés à cette indépendance.
Qu’est-ce qui est donc à la racine d’un fragment réussi ? Le changement de destination — le renoncement — l’abus. »
Poezibao remercie Nathalie Quintane qui s’est faite la passeuse de ces extraits de carnets de l’écrivain serbe Bojan Savić Ostojić, une journée qui prend des jours, fragments, traduits du serbe par Laurent Perez et l’auteur .
Ces extraits sont ici proposés au format PDF, à ouvrir d'un simple clic sur ce lien.
Bojan Savić Ostojić, né en 1983, a publié plusieurs livres de poésie (Stéréorama, Datif hérétique, Gicleur), recueils de fragments (L’Aléatoire et Les psaumes mesquins) et trois romans (Punkt, Il n’y a pas d’oasis, Rien n’est à personne). Il a traduit en serbe une trentaine d’ouvrages du français (auteurs comme Antonin Artaud, Emmanuel Bove, Agota Kristof, Henri Michaux, Georges Perec, Alain Robbe-Grillet, Raymond Roussel…). Fondateur de la revue de poésie contemporaine Agon (agoncasopis.com, 2008-2016), il vit, comme traducteur littéraire, entre Belgrade et Stara Pazova, en Serbie.