Trou de memoire

Je n'ai pas la mémoire des visages et pas plus celle des noms. J'oublie bien trop vite, les gens que je fréquente ; La solitude est un bien désagréable sentiment.Je n'ai pas la mémoire des visages. Ce qui me fait marcher avec un sourire béat, pour ne pas offenser celui que je ne reconnaîtrai pas. Quand on me regarde, avec insistance, je souris, j'opine, il m'arrive même de faire signe. Ceux qui ne me connaissent pas doivent me trouver bien folle, je dois susciter des interrogations : « Mais d’où je la connais… » J'ai la mémoire qui flanche. Fuis-je donc un souvenir traumatisant ? Un désir d'effacer quelque chose qui s'est passé ? Envie d’aller de l’avant sans me retourner ? Ma mémoire a choisi d'oublier les gens que j'ai connus et je perds ainsi les visages et les noms. J'aimerais pourtant bien, retenir tous ces bouts de vécu. C'est mission impossible, car il se sont enfuis.   Mes trous de mémoire et moi, formons un couple étrange. Je simule, je bise et je souris, le regard absent, je laisse parler l'autre à l'affut d'une indication. Je pars en me demandant : "mais c'est qui ?" Parfois, pendant les jours qui suivront, je me tracasserai en vain car quand un visage part, il le fait pour de bon. J'ai le souvenir aussi léger que le vent sans doute est-ce d'avoir souffert de trop de séparations, de ruptures de repères, d'urgence d'intégration. Pour ne pas souffrir du manque de familiers, je m'empresse d'oublier ceux que j'ai appréciés. Proverbe créole : Vant plen, korosol si (C'est une fois qu'on a le ventre rempli qu'on trouve le corossol acide) Se dit quand une personne critique un repas après avoir pourtant tout mangé.