Pour elle, c'était un signe: son acte s'inscrivait dans la durée, les chats noirs allaient se multiplier et rendre son geste éternel dans la mémoire de tous.
Dans ce roman, deux histoires se déroulent parallèlement, mais n'en font qu'une, finalement. L'une commence en 1926 à Gallipoli, dans les Pouilles, province de Lecce, l'autre en 2018, à Lausanne, canton de Vaud:
La date n'a pas d'importance. Les pendules ne se sont pas arrêtées. C'est arrivé. C'est tout.
Le point, et lieu, commun de ces deux histoires? Une église de Gallipoli, Santa Maria della Puritâ. Comme deux cours d'eau, elles y font leur jonction, et l'ésotérique y joue son rôle, sans que l'avenir soit déterminé.
Renonçant à la médecine, il a consacré toute sa vie à l'histoire de l'architecture. Ce 3 septembre 2018, alors qu'il examine une diapositive de l'église de Gallipoli pour préparer son cours, deux policiers l'interrompent.
Ils sont venus lui annoncer la terrible nouvelle et l'emmènent là où le corps de son fils repose sous une bâche, après avoir été renversé par un camion, afin qu'il le reconnaisse: ce jour-là, il franchit les portes de l'attente.
Ce 24 juillet 1926, Francesca Badolati suit Giuseppe Barba, dit Beppe, dans le cortège, où il conduit, comme les autres, la statue de Santa Cristina, patronne des pêcheurs, jusqu'à la jetée, où elle sera chargée sur un bateau.
Pour Francesca, qui, dix-sept ans plus tôt, a été trouvée à l'aube, emmaillotée devant Santa Maria della Puritâ, l'église de la grande plage aux pieds des remparts, et pour Beppe, qui se sont vus, c'est le début de l'amour.
Ce que ni l'un ni l'autre ne sait, c'est que ce sera un amour fatal. C'est le récit de cet amour et de son influence sur le professeur qui est la trame de ce roman de Laurent Koutaïssoff, où la vie et la mort sont les protagonistes.
À Tina, la diseuse d'avenir, pour ce qui concerne Francesca, Beppe, les enfants qu'ils auront, deux cartes se sont imposées. L'une représente la chance, l'autre la prudence, une invitation à regarder le monde différemment.
Peut-être faut-il donc voir dans ce roman un apologue. Certes personne ne maîtrise complètement sa vie, mais, pour bien agir, il faut saisir la chance qui se présente et ne pas être esclave de la prudence [ni] de la solitude.
Francis Richard
Les Chats noirs de Gallipoli, Laurent Koutaïssoff, 304 pages, Bernard Campiche Editeur
Livre précédent:
Atlas (2020)