Les grands cerfs

Par Belzaran

Titre : Les grands cerfs
Scénariste : Gaétan Nocq
Dessinateur : Gaétan Nocq
Parution : Août 2021


« Les grands cerfs » est une adaptation du roman éponyme écrit par Claudie Hunzinger d’après sa propre expérience. En effet, l’autrice vit isolée dans la forêt alsacienne et s’est prise de passion pour les cerfs qui y vivent (y vivaient ?). Gaétan Nocq, marqué par le roman, décide donc de l’adapter. Le tout pèse 220 pages et est publié aux éditions Daniel Maghen.

Un ouvrage qui manque d’enjeu

La narratrice vit perdue dans la forêt avec son mari. Romancière, elle apprend alors que sa maison est au milieu du territoire des cerfs. C’est un photographe animalier qui le lui apprend. À ses côtés, elle va essayer de les observer, prenant conscience de comment ils vivent, se déplacent, afin de pouvoir les surprendre. Mais à s’intéresser aux cerfs, on finit forcément par s’intéresser aux chasseurs…

L’autrice ayant fait le choix de vivre au milieu de la nature, complètement isolée, « Les grands cerfs » est forcément porteur d’un message écologique. L’adaptation l’est tout autant. Les « prélèvements » des chasseurs sont questionnés, autant sur les quotas attribués que sur leurs comptes réels. L’ouvrage présente une vision de cet univers au niveau de la narratrice. Cela pourrait être intéressant, ça l’est parfois, mais les personnages manquent de substance. Ils n’ont pas d’histoire, pas de passé, leurs motivations sont floues. Mention spéciale au mari complètement inexistant.

À vouloir bien expliquer la vie des cervidés ou les principes de la chasse, le livre se fait didactique. Mais il n’a pas la rigueur scientifique ou documentaire d’un ouvrage du genre. Il manque clairement un côté romancé à cet ouvrage, un peu de drame. Tout se passe loin de nous. Quand un cerf est tué, on l’apprend dix jours après, rien ne se passe dans l’instant. Et alors que l’on pourrait imaginer des montées de tension entre la narratrice et les chasseurs, des rencontres fortuites dans la forêt, du militantisme, rien ne vient. À trop observer, on s’ennuie. C’est dommage, car il y a de beaux moments poétiques et sensibles, mais ils sont noyés au milieu du reste.

Le parti pris du dessin est au premier abord intéressant. Hélas, il tourne en rond. Le choix des couleurs aurait pu être très pertinent, mais on reste quasiment tout le temps dans le bleu (avec de rares touches de rouge). Tous les univers sont traités de la même façon. Si le bleu convient parfaitement aux nuits passées par la narratrice à chercher les cerfs, ce n’est pas le cas des moments en journée ou en ville. Le côté flou du dessin se marie bien avec certaines scènes, oniriques ou dans le flou nocturne, beaucoup moins pour d’autres.  Ainsi, les personnages manquent cruellement d’expressivité. Dommage.

« Les grands cerfs » souffre de l’obsession des cervidés. Factuel sans être documentaire, il manque clairement une dramatisation pour rendre l’ensemble digeste. Le long des 200 pages, le lecteur finit par se désintéresser du sujet et attend un point chaud qui ne viendra jamais. Sans doute que ce livre souffre du syndromes « tiré d’une histoire vraie ».