Bien que cette présentation officielle des grandes orientations retenues à moyen terme paraisse anecdotique, plutôt destinée à éclairer (ou rassurer) les investisseurs et les analystes qu'ils écoutent, elle revêt une importance cruciale aussi pour les collaborateurs, qui n'ont souvent que ces éléments exposés publiquement pour comprendre l'environnement et le contexte dans lequel ils exercent leurs talents. Elle constitue de la sorte la boussole qui guide de loin leurs activités et leur motivation.
Selon cette logique, que traduisent les trois principales priorités partagées par la quasi totalité des institutions financières pour la période 2022-2024 (ou 2025), à savoir la croissance des revenus, la transformation digitale et le développement durable ? La première est fréquemment associée à l'efficacité opérationnelle (autrement dit, la réduction des coûts) et n'est pas perçue comme très positive par les salariés, la deuxième est généralement déléguée aux départements informatiques et focalisée sur la technologie, et la dernière évite encore trop rarement la dérive du « greenwashing ».
En résumé, ces stratégies sont extrêmement auto-centrées et transmettent un message implicite de poursuite des modèles de fonctionnement existants. Voilà pourquoi quand CaixaBank titre la sienne « proche de nos clients » et définit la qualité de service comme un des piliers majeurs de son avenir, à travers une proposition de valeur optimisée et un alignement de l'expérience utilisateur sur les attentes des consommateurs et des professionnels, elle adopte une posture nouvelle, loin d'être anodine.
Ne soyons pas naïf. En arrière-plan, le groupe espagnol porte exactement les mêmes ambitions que tous ses concurrents. Cependant, en les plaçant sous l'étendard d'une focalisation sur les besoins des clients, qu'il s'agisse de développer les ventes ou de soutenir les efforts en faveur de l'environnement, il change tout. Il fournit ainsi une autre manière d'aborder les questions et d'engager les projets. Dans une large mesure, il pose en réalité les fondations d'une véritable révolution de la culture d'entreprise.
Le tournant engagé par CaixaBank a ceci d'intéressant qu'il met en lumière les lacunes du reste de l'industrie. Certes, tous les acteurs vantent leur attachement aux préoccupations de leurs clients et évoquent, sous une forme ou une autre, leur désir de mieux les satisfaire (quoique certains se contentent de vouloir accroître leur NPS, ce qui n'est pas pareil). Mais en les reléguant au second rang, ils révèlent que ces prétentions ne figurent pas au cœur de leur stratégie… Pourquoi alors les employés s'en inquièteraient-ils ?