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Discours de politique générale d’Élisabeth Borne le 6 juillet 2022 à l’Assemblée Nationale (vidéo et texte intégral)

Publié le 06 juillet 2022 par Sylvainrakotoarison

Avertissement: version provisoire établie à 20:07
Séance unique
Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet

Mme la présidente.
En application des articles 29 et 30 de la Constitution, je déclare ouverte la session extraordinaire convoquée par décret du Président de la République par décret du 28 juin 2022.
2 * Requêtes en contestation d'opérations électorales

Mme la présidente.
En application de l'article 34 de l'ordonnanceno 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, j'ai reçu du Conseil constitutionnel communication des requêtes en contestation d'opérations électorales dont il est saisi. Déclaration du Gouvernement

Mme la présidente.
L'ordre du jour appelle la déclaration du Gouvernement suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution.
La parole est à Mme la Première ministre. (Les députés des groupes RE, Dem et HOR se lèvent et applaudissent longuement.)

Un député du groupe LR.
Ils sont quand même un peu moins nombreux qu'avant !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, en m'adressant à vous, c'est à la France que je parle. Chacune de vos circonscriptions porte une parcelle de notre histoire et des défis qui surgissent devant nous. Chacun de vos territoires...

Un député.
Ah les territoires !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
...exprime une réalité de notre pays, de ses craintes et de ses espoirs.
Nous mesurons tous l'ampleur de la tâche : les Français à protéger, la République à défendre, notre pays à rassembler,...

M. Ugo Bernalicis.
Ce ne sera pas pour aujourd'hui !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
...la planète à préserver. C'est le sens de l'action du Président de la République depuis cinq ans ; c'est notre mission collective au Gouvernement comme sur ces bancs. Avec vous, avec tout le Gouvernement, avec nos concitoyens, nous réussirons ; j'y suis déterminée.
Ces dernières semaines, à quatre reprises, les Françaises et les Français se sont exprimés. Par le résultat des urnes, ils nous demandent d'agir, et d'agir autrement. Par leur message, ils nous demandent de prendre collectivement nos responsabilités. Nous le ferons.
Ensemble, nous répondrons à l'écho de l'abstention. Elle est le signe d'une démocratie malade, d'un désarroi de la jeunesse, d'une perte de confiance dans notre capacité à changer les vies.
Ensemble, nous répondrons à la demande d'action. C'est elle qu'exprime le plus fortement le vote des Français. Nous ne pouvons pas décevoir.
Ensemble, nous répondrons à l'exigence de responsabilité. Les Français ont élu une assemblée sans majorité absolue. Ils nous invitent à des pratiques nouvelles, à un dialogue soutenu, à la recherche active de compromis.
Le contexte nous oblige. La guerre en Ukraine, aux portes de l'Europe, nous rappelle combien la paix est fragile. Les prix de l'énergie augmentent et nous devons continuer à protéger les Français. L'épidémie est toujours là et notre vigilance doit rester totale. L'urgence écologique se fait chaque seconde plus pressante et nous avons un devoir d'action. L'insécurité inquiète nos concitoyens et brise encore des vies et des destins.
Nous devons en convenir aussi : dans les dernières semaines, du fait de la guerre qui dure, notre situation économique s'est assombrie. Nos perspectives de croissance se dégradent et les taux d'intérêt augmentent. Quant à nos finances publiques, elles doivent reprendre le chemin de l'équilibre. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Maxime Minot.
La faute à qui !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Face à de tels défis, le désordre et l'instabilité ne sont pas des options. Nous ne sommes peut-être pas d'accord sur toutes les solutions,...

M. Maxime Minot.
Ça, c'est sûr !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
...mais nous avons toutes et tous conscience de l'urgence et de la nécessité d'agir. Les Français nous demandent de nous parler plus, de nous parler mieux, et de construire ensemble. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

M. Fabien Di Filippo.
Ils sont vraiment moins nombreux qu'avant à applaudir !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous répondrons présents. Ensemble, je veux que nous redonnions un sens et une vertu au mot compromis...

M. Pierre Cordier.
Vous n'avez pas le choix !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
...depuis trop longtemps oublié dans notre vie politique. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Le compromis, ce n'est pas se compromettre ; c'est accepter chacun de faire un pas vers l'autre. Cela ne signifie nullement l'effacement de nos différences ou le renoncement à nos convictions - les clivages existent et ils continueront à exister.
Bâtir ensemble ne signifie pas renoncer à son identité. Vous le savez, la mienne a pour socle inaltérable les valeurs de notre République : la liberté, l'égalité, la fraternité, la laïcité. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

M. François Cormier-Bouligeon.
Excellent !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Mon identité, c'est une France plus forte dans une Europe plus indépendante ; c'est l'égalité entre les femmes et les hommes, toujours, tout le temps ; c'est le respect de la laïcité sans accommodement ni compromission ; c'est le refus d'opposer les uns aux autres et de désigner des boucs émissaires ; c'est le courage de dire la vérité aux Français. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR - M. Maxime Minot s'exclame.)

M. Michel Herbillon.
Il était temps !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
C'est forte de ces convictions, des valeurs que je chéris et protège, comme femme, comme citoyenne, comme élue, comme Première ministre, que je crois souhaitable et possible que chaque conviction, chaque idée puisse être défendue, débattue et, s'il le faut, combattue.

M. Fabien Di Filippo.
Vous allez nous expliquer comment faire !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Trop longtemps, notre vie politique n'a été faite que de blocs qui s'affrontent. Il est temps d'entrer dans l'ère des forces qui bâtissent ensemble. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Une majorité relative n'est pas, et ne sera pas, le synonyme d'une action relative. (Mêmes mouvements.)

M. Erwan Balanant.
Bravo !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Elle n'est pas, et ne sera pas, le signe de l'impuissance.
Rappelons-nous qu'en 1958, les gaullistes ne sont pas majoritaires à l'Assemblée nationale quand, aux premières heures de la Ve République, ils créentles CHU, les centres hospitaliers universitaires, et l'assurance chômage.

Un député.
De Gaulle, il est loin !

M. Jean-Paul Lecoq.
On voit la référence aux CHU !

Mme Mathilde Panot.
Alors, pourquoi ne pas demander la confiance !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Je ne corresponds peut-être pas au portrait-robot que certains attendaient. (Sourires.) Cela tombe bien : la situation est inédite. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Je n'ai pas le complexe de la femme providentielle. J'ai été ingénieure, femme d'entreprise, préfète, ministre. Mon parcours n'a suivi qu'un fil rouge : servir. (Mêmes mouvements.)
Je ne suis pas une femme de grandes phrases et de petits mots. Je suis convaincue que de telles habitudes ont nourri les postures, la défiance et la crise de notre démocratie. Pour ma part, je crois en trois choses : l'écoute, l'action et les résultats. (Mêmes mouvements.)

M. Fabien Di Filippo.
Quels résultats ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Je n'ai qu'une boussole, qui sera celle de mon gouvernement : bâtir pour notre pays.

M. Aurélien Pradié.
On verra !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Mon gouvernement ne sera jamais celui des clivages factices et des idées toutes faites,...

M. Stéphane Peu.
Oui, oui, oui...

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
...car je crois fermement au dépassement entamé il y a cinq ans par le Président de la République. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

Plusieurs députés du groupe LR.
On a vu les résultats !

M. Michel Herbillon.
Il serait temps de le reconnaître !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous devons laisser des marges de manœuvre aux territoires, car c'est dans les solutions différenciées que se trouvent les résultats concrets et la vraie égalité. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Je ne crois pas que notre école ou notre santé soient confrontées aux mêmes défis dans le centre de Paris, dans les quartiers de Cayenne ou dans un village au bord de la Vire.

M. Stéphane Peu.
Et en Seine-Saint-Denis ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous consulterons plus encore les corps intermédiaires, les forces vives de notre pays, les Françaises et les Français dans chaque territoire. Plus que jamais, nous mènerons chaque réforme en lien étroit avec les organisations syndicales et patronales - nous avons besoin d'elles, et elles savent qu'elles trouveront en moi une interlocutrice franche, constructive et déterminée.
Associer toutes les forces vives du pays dans un dialogue renouvelé et en partageant les opportunités comme les contraintes, c'est le sens du Conseil national de la refondation voulu par le Président de la République. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR - Exclamations sur divers bancs - Mme Raquel Garrido mime un joueur de pipeau.)

M. Marc Le Fur.
Le machin !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Les Français nous attendent.

M. Fabien Di Filippo.
Ça fait plusieurs années !

M. Sébastien Jumel.
Levez-vous !

M. Sébastien Jumel.
Et les spéculateurs de guerre ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous vous proposerons de prolonger le bouclier tarifaire sur les prix du gaz et de l'électricité, d'augmenter les revenus du travail, de mieux partager la valeur en baissant les charges des indépendants et en triplant le plafond de la prime de pouvoir d'achat. Nous vous proposerons également de revaloriser les retraites et les prestations sociales, notamment les allocations familiales, la prime d'activité, les aides personnalisées au logement (APL), l'allocation aux adultes handicapés (AAH) et les bourses sur critères sociaux,...

M. Fabien Di Filippo.
Les bourses au mérite !

M. Jean-Paul Lecoq.
En fait, vous avez déjà tout décidé !

M. Thibault Bazin.
Échec depuis cinq ans !

Un député du groupe LR.
Éric Woerth a des idées précises sur le sujet !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
C'est un devoir vis-à-vis des générations futures. Une déclaration de politique générale est un moment de vérité, mais aussi un moment de partage des contraintes auxquelles nous faisons face. Les données sont claires : du fait de la guerre qui dure et comme partout en Europe, notre croissance économique sera plus faible que prévu, l'inflation sera plus forte et la charge de la dette continuera d'augmenter.

Un député du groupe LR.
Éric Woerth l'avait prévu !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nos objectifs sont clairs eux aussi : en 2026, nous devrons commencer à faire baisser la dette ;...

M. Patrick Hetzel.
À partir de 2026 !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
...en 2027, nous devrons ramener le déficit sous les 3 % du PIB. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. - Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Michel Herbillon.
C'est la fin de l'argent magique !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Ces objectifs, nous les atteindrons en bâtissant les conditions d'une croissance forte et durable, qui créera les emplois, en menant les réformes nécessaires, en prenant des mesures de bonne gestion et en accentuant la lutte contre les fraudes.

Mme Mathilde Panot.
Fiscales !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
L'équilibre de nos finances publiques est une question de souveraineté. Je sais que beaucoup y sont attachés sur ces bancs - j'en ai parlé notamment avec le président Marleix. (Rires et mouvements divers.)

M. Jean-Paul Lecoq.
Olivier, envoie-lui ton 06 !

Mme la présidente.
S'il vous plaît, mes chers collègues !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Enfin, notre troisième principe est le respect ferme de l'engagement pris par le Président de la République devant les Français : pas de hausse d'impôts. Nous devons cesser de croire qu'une taxe est la solution de chaque défi. Pas de hausse d'impôts ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Nous sommes crédibles car nous avons supprimé la taxe d'habitation et baissé l'impôt sur le revenu. (Exclamations sur les bancs des groupes LR et LFI - NUPES.)

M. Raphaël Schellenberger.
Vous avez augmenté la taxe sur l'essence et le gazole !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Au total, nous avons diminué les impôts des Français et des entreprises de plus de 50 milliards pendant le précédent quinquennat. Dès cet été, nous tiendrons parole. La suppression de la redevance audiovisuelle permettra de faire économiser 138 euros à plus de vingt millions de foyers. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Cette mesure ira de pair avec la réforme du financement de l'audiovisuel public, lequel garantira son indépendance et des moyens pérennes. Nous y travaillerons ensemble. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
La fiscalité sera l'un de nos terrains de débat, mais elle peut aussi être un sujet de consensus - nous en avons parlé ensemble, monsieur le président Mattei. (" Ah ! " sur divers bancs.)

Plusieurs députés du groupe Dem.
Bravo !

M. Patrick Hetzel.
Bientôt ce sera le président Chassaigne !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
J'ajoute que le pouvoir d'achat est un combat collectif. Chacun doit y prendre sa part, notamment les entreprises qui dégagent des marges. Au moment où l'inflation est forte, j'attends des employeurs qui le peuvent qu'ils prennent leurs responsabilités. Nous pouvons, nous devons, aller plus loin en la matière.
Notre deuxième défi est de bâtir ensemble la société du plein emploi. C'est une conviction qui m'anime profondément, une conviction nourrie par mon parcours, par deux ans passés comme ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, par nos échanges et par ceux que j'ai avec nos concitoyens. Nous devons changer notre rapport au travail. Le cœur de ce changement est le plein emploi et le bon emploi.

M. Jean-Paul Lecoq.
De bons salaires, de bonnes conditions de travail !

M. Jean-Paul Lecoq.
Avec un bon nombre de radiations à Pôle emploi !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous avons amélioré et intensifié la formation des demandeurs d'emploi en investissant 15 milliardsdans la formation professionnelle.

M. Patrick Hetzel.
Tout va très bien, madame la marquise !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous avons mieux accompagné les jeunes grâce au plan " 1 jeune, 1 solution " et au contrat d'engagement jeune. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

M. Sylvain Maillard.
Eh oui !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
C'est grâce à ce bilan que nous pouvons désormais viser le plein emploi.

M. Pierre Cordier.
C'est grâce à ce bilan que tu as perdu cent députés !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
J'ai la conviction profonde que notre pays doit et peut sortir du cercle vicieux du chômage de masse. Aujourd'hui, la situation de l'emploi a changé en France. De nombreuses entreprises, dans toutes les filières, dans tous les métiers et dans tous les territoires, cherchent à recruter. Cette situation a des vertus. Elle impose aux employeurs d'améliorer les conditions de travail, de questionner leur de mode de management et d'œuvrer à l'attractivité de leur métier.

Mme Clémentine Autain.
Et les salaires ?

M. Fabien Di Filippo.
C'est une révolution !

M. Thibault Bazin.
Quel bricolage !

M. Sébastien Jumel.
Supprimer Parcoursup !

M. Stéphane Peu.
Créer un numéro vert !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
...permettre aux étudiants de choisir et de se lancer dans une voie en fonction du métier qu'ils veulent exercer.

M. Jean-Paul Lecoq.
C'est quasiment impossible !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Grâce à la formation tout au long de la vie, ils devront se sentir libres d'en changer et de saisir de nouvelles occasions. Grâce à elle, nous pourrons, au cours des prochaines années, former un million de jeunes dans les métiers d'avenir, dont la moitié dans le secteur du numérique. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Enfin, grâce au plein emploi, nous créerons de la richesse et nous pourrons financer notre modèle social. Vous le savez, nous avons toujours dit les choses clairement aux Françaises et aux Français.

Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES.
Non !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
En la matière, la transparence est une exigence et les faux-semblants un manque de respect pour nos concitoyens. Notre modèle social est un paradoxe : à la fois l'un des plus généreux et l'un de ceux dans lesquels on travaille le moins longtemps. (Protestations sur les bancs des groupes LFI - NUPES et GDR - NUPES.)

Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES.
C'est faux !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Notre système de retraite est une exception : on part plus tard à la retraite en France que dans les autres pays européens. Je le dis donc : pour la prospérité de notre pays et la pérennité de notre système par répartition, pour bâtir de nouveaux progrès sociaux, pour qu'aucun retraité ayant accompli une carrière complète ne touche une pension inférieure à 1 100 euros par mois, pour sortir de situations dans lesquelles le même métier ne garantit pas la même retraite, oui, nous devrons travailler progressivement un peu plus longtemps. (Vives protestations sur les bancs des groupes LFI - NUPES, SOC et GDR - NUPES.)

Mme Marie Pochon.
Non !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Notre pays a besoin d'une réforme de son système de retraite. Elle ne sera pas uniforme et devra prendre en compte les carrières longues et la pénibilité.

Mme Raquel Garrido.
Ça ne marchera pas !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Elle devra veiller au maintien dans l'emploi des seniors. Mon gouvernement la mènera dans la concertation avec les partenaires sociaux (Mêmes mouvements) ...

M. Alexis Corbière.
Mettez au vote ce que vous dites !

Mme la présidente.
Je vous en prie, chers collègues, laissez Mme la Première ministre poursuivre !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
...et en associant les parlementaires le plus en amont possible. Elle n'est pas ficelée, elle ne sera pas à prendre ou à laisser, mais elle est indispensable. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
J'ajoute que je ne peux pas, que nous ne pouvons pas nous résoudre à la pénibilité de certains métiers. Par l'innovation, par la technologie, par l'évolution des carrières, nous pouvons, nous devons améliorer les conditions de travail et faire en sorte que nos compatriotes ne finissent plus leurs carrières brisés. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

Un député du groupe RE.
Très bien !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Alors oui, le travail est une valeur essentielle ; le travail, c'est la clé de l'émancipation (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE) , c'est la création de richesse, la liberté d'entreprendre, le partage de la valeur ; ce sont des ressources complémentaires pour notre modèle social (Protestations sur les bancs du groupe LFI - NUPES) et une ambition plus forte en matière de responsabilité sociale et environnementale des entreprises. Nous avons tous à y gagner. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

M. Jean-René Cazeneuve.
Très bien !

M. Aurélien Pradié.
Et l'eau, ça mouille !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Mesdames et messieurs les députés, bâtir ensemble, c'est apporter des réponses radicales à l'urgence écologique. Devant de tels défis, il n'est plus question d'opposer les radicaux aux partisans d'une écologie des petits pas. Tous, nous avons conscience des enjeux et des risques ; tous, nous devons faire bloc. (Protestations sur les bancs du groupe LFI - NUPES.) Ce mot de radicalité, je le prends donc à mon compte : nous engagerons des transformations radicales dans nos manières de produire, de nous loger, de nous déplacer, de consommer.

M. Bastien Lachaud.
Lesquelles ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Mais je l'affirme, je ne crois pas un instant que cette révolution climatique passe par la décroissance. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Au contraire, la révolution écologique que nous voulons mener, ce sont des innovations, des filières nouvelles, des emplois d'avenir ;...

Une députée du groupe LFI - NUPES.
Ça ne marche pas, madame !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
...c'est un modèle social préservé car sans activité, nous ne pourrions plus le financer.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Au cours des cinq dernières années, nous avons accéléré la baisse des émissions de gaz à effet de serre, mais nous devons faire plus. Sous l'impulsion de la France, l'Europe s'est fixé l'objectif d'être neutre en carbone en 2050 et de réduire ses émissions de 55 % d'ici 2030. Ces objectifs, nous devons les atteindre ; ensemble, nous gagnerons la bataille du climat. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

Une députée du groupe LFI - NUPES.
Inaction climatique !

Mme Mathilde Panot.
Condamnés deux fois !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Pour y parvenir, tout mon gouvernement est mobilisé. Le Président de la République m'a chargée de la planification écologique ; chaque ministre aura une feuille de route " climat et biodiversité ".

M. Jean-Paul Lecoq.
En quelle année ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous allons définir ensemble un plan d'action, un plan de bataille ; dès le mois de septembre, nous lancerons une vaste concertation en vue d'une loi d'orientation " énergie et climat ". Filière par filière, territoire par territoire, nous définirons des objectifs de réduction d'émissions, des étapes et des moyens appropriés.

M. Patrick Hetzel.
Et quand vous avez fermé Fessenheim ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
La transition écologique est l'affaire de tous : les dirigeants des grandes entreprises doivent montrer l'exemple et leur rémunération dépendra de l'atteinte des objectifs environnementaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous avancerons avec les élus locaux : ils ont la charge de l'aménagement du territoire, des transports, de l'habitat, des déchets. Nous avons besoin d'eux et c'est le sens même de la création d'un ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Ils seront également source d'inspiration, d'initiatives et d'idées. Bien souvent, dans leurs territoires, ils ont montré le chemin.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Mesdames et messieurs les députés, nous voulons être - nous serons - la première grande nation écologique à sortir des énergies fossiles. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

Mme Farida Amrani.
C'est une blague ?

Un député du groupe LR.
Vous allez rouvrir les centrales à charbon !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
C'est la garantie de notre souveraineté énergétique ; c'est la préservation de notre pouvoir d'achat ; ce sont des filières industrielles nouvelles et des emplois créés. Car je le dis et je le répète : notre écologie est une écologie de progrès. (" Ah ! " sur les bancs du groupe LFI - NUPES.) Je le sais, cette transition peut parfois provoquer des craintes, émanant notamment des salariés des secteurs en mutation. Madame la présidente Chatelain, monsieur le président Bayou, nous en avons parlé et nous y tenons comme vous. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. - Rires sur les bancs LFI - NUPES. - Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

M. Philippe Gosselin.
Bon, il n'y a pas que Marleix !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous ne laisserons personne sur le bord de la route. Nous avons retenu les leçons du textile et de l'acier : chaque transition ira de pair avec un accompagnement pour la formation et la reconversion. Pour sortir du carbone, nous nous doterons d'un mix énergétique équilibré autour des énergies renouvelables et du nucléaire (M. François Ruffin proteste vivement) ; nous accélérerons le déploiement des énergies renouvelables ; nous investirons dans le nucléaire avec la construction de nouveaux réacteurs et des innovations...

Mme la présidente.
Monsieur Ruffin !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
...pour le nucléaire du futur. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La transition énergétique passe par le nucléaire ; je sais que c'est une conviction largement partagée sur ces bancs. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR - Protestations sur les bancs des groupes LFI - NUPES et Écolo - NUPES.)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
C'est une énergie décarbonée, souveraine et compétitive.

M. Erwan Balanant.
Chassaigne est d'accord !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Réussir la transition énergétique, c'est pouvoir la piloter. Je le disais il y a quelques instants, l'urgence climatique impose des décisions fortes, radicales. Nous devons avoir la pleine maîtrise de notre production d'électricité et de sa performance. Nous devons assurer notre souveraineté face aux conséquences de la guerre et aux défis colossaux à venir. Nous devons prendre des décisions que sur ces bancs mêmes, d'autres ont pu prendre avant nous, dans une période de l'histoire où le pays devait aussi gagner la bataille de l'énergie et de la production. C'est pourquoi je vous confirme aujourd'hui l'intention de l'État de détenir 100 % du capital d'EDF. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. - Plusieurs députés du groupe LR se tournent vers les bancs du groupe GDR - NUPES et, s'adressant à M. André Chassaigne, scandent : " André, André ! ")

M. Stéphane Peu.
Le diable se cache dans les détails !

M. Sébastien Jumel.
Le cheval de Troie, on connaît !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Cette évolution permettra à EDF de renforcer sa capacité à mener dans les meilleurs délais des projets ambitieux et indispensables pour notre avenir énergétique.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Réussir la transition énergétique, c'est ensuite consommer moins. Si nous sommes moins dépendants du gaz russe que nos voisins, nous ne pouvons pas croire ou faire croire que les décisions unilatérales de la Russie nous épargneraient. Si la Russie venait à couper ses exportations de gaz, nous serions touchés nous aussi. Dès maintenant, nous devons envisager tous les scénarios concrets, même les plus difficiles, et faire connaître leurs conséquences à tous les acteurs concernés et à tous les Français. Nous pouvons tenir, mais chacun devra agir.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Plus largement, nous devons éviter toutes les consommations inutiles dans le domaine du logement. Nous amplifierons le succès de MaPrimeRénov' pour rénover 700 000 logements par an. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI - NUPES.)

M. André Chassaigne.
C'est dans le programme, ça ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous voulons permettre à chacun d'avoir accès à des transports propres ; cela vaut partout, en ville comme dans la ruralité. Le ferroviaire est et restera la colonne vertébrale d'une mobilité propre.

M. François Ruffin.
Vous l'avez bousillé, le ferroviaire !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous continuerons les investissements consentis ces dernières années pour les transports du quotidien, pour les petites lignes. Je veux ici rendre hommage à l'action de Jean Castex, infatigable voix des territoires (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR) et qui s'est engagé personnellement pour le ferroviaire.

M. Patrick Hetzel.
Et Édouard Philippe, vous n'en parlez pas ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Partout, des solutions alternatives à l'usage individuel de la voiture thermique devront être construites ; partout, nous devons continuer à soutenir les mobilités propres et actives. Nous souhaitons permettre aux Français d'avoir accès à une voiture à zéro émission ; pour y parvenir, nous prolongerons les aides à la conversion et nous instaurerons un système de location de longue durée à moins de 100 euros par mois. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) C'est un projet écologique et c'est une ambition industrielle, car nous construirons ces voitures électriques en France. (Mêmes mouvements.)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Au-delà des transports, nous allons décarboner partout. C'est vrai notamment dans l'industrie, où nous nous appuierons sur les 50 milliards d'investissements de " France 2030 ", dont la moitié au moins sera consacrée à ces enjeux. Cela vaut aussi pour l'agriculture, puisque nous continuerons à transformer notre modèle agricole - j'y reviendrai.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Protéger l'environnement, c'est enfin préserver la nature et la biodiversité face au risque d'une sixième grande extinction. Nous accentuerons notre politique de préservation des espaces naturels - forêts, montagnes, littoraux, océans - et nous aurons une attention toute particulière pour nos outre-mer, dont la biodiversité est un trésor inestimable. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

M. Jimmy Pahun.
Très bien !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous devrons enfin poursuivre notre sortie de la société du gaspillage et du tout-jetable. Il faut du réemploi, de la réparation, du recyclage (Mêmes mouvements) ; cela créé de l'activité, du pouvoir d'achat. Des outils ont été créés lors du précédent quinquennat ; il faut maintenant pleinement s'en emparer.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Vous le voyez, derrière les mots, derrière les engagements, l'urgence nous impose des actes rapides. Tout ne viendra pas de l'État seul, chacun devra y prendre sa part ; c'est la condition de la réussite.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Mesdames et messieurs, au cours de nos échanges, j'ai vu se dégager une autre volonté commune : bâtir la République de l'égalité des chances.

M. Sébastien Jumel.
Pas un mot sur l'hôpital !

M. Patrick Hetzel.
Il faudra redresser l'école ! Et là aussi, il y a de la marge !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous refusons une société dans laquelle la vie et les destins sont tracés selon le quartier où l'on est, selon le lieu où l'on vit, selon la couleur de sa peau ou la profession de ses parents. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Alors, au cœur de l'engagement du Président de la République et de mon gouvernement, se trouve une volonté de briser les inégalités de destin, de n'accepter aucune assignation sociale ou culturelle, de permettre à chacun de choisir son avenir, de tracer les chemins de l'émancipation. (Mêmes mouvements.) La République de l'égalité des chances se construit dès la naissance. L'enfance sera une priorité de ce quinquennat, dans la droite ligne du chantier des 1 000 premiers jours. Nous répondrons à ce qui est aujourd'hui la première préoccupation des parents : le manque de solution de garde pour les enfants, et notamment ceux de moins de trois ans. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) Pour réussir, mon gouvernement souhaite bâtir, avec les collectivités, un véritable service public de la petite enfance ; il permettra d'offrir les 200 000 places d'accueil manquantes. Nous voulons des solutions proches des domiciles, accessibles financièrement.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous viendrons en aide en priorité à ceux qui en ont le plus besoin : les parents qui élèvent seuls leurs enfants, le plus souvent des femmes. Pour eux, pour elles, nous continuerons à bâtir un accompagnement global. Avec les pensions alimentaires désormais directement versées sur les comptes en banque, nous avons franchi une étape majeure (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR) ; nous continuerons et nous accorderons une aide aux familles monoparentales pour la garde des enfants jusqu'à douze ans. (Mêmes mouvements.)

Mme Marie-Pierre Rixain.
Très bien !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Bâtir la République de l'égalité des chances, c'est agir en priorité pour l'école et pour la jeunesse. C'est un chantier essentiel ; c'est là que tout se joue. Nous continuerons la refondation de l'école entamée lors du dernier quinquennat.

Mme Sophia Chikirou.
Catastrophe !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Notre école, c'est celle qui conforte les savoirs fondamentaux. (Protestations sur les bancs du groupe LFI - NUPES.)

M. Fabien Di Filippo.
Vous l'avez abîmée, l'école !

M. Patrick Hetzel.
Vous avez dégradé l'école.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Notre école, c'est celle qui conforte les savoirs fondamentaux - lire, écrire, compter, respecter autrui - et qui s'empare des nouveaux savoirs comme le codage informatique. Notre école, c'est celle qui garantit l'égalité et ne renonce jamais à l'excellence.

M. Fabien Di Filippo.
C'est faux ! Baccalauréat à plusieurs vitesses ! Catastrophe !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous devons pousser chaque élève à se dépasser ; dans notre école, nous devons aider les jeunes à faire éclore leurs talents et les adultes à les déceler, même s'ils ne sont pas dans le moule. Former des millions de jeunes et s'adapter aux personnalités de chacun, c'est le défi auquel font face chaque jour les professeurs. Notre école doit donc être celle qui offre aux enseignants la reconnaissance et la place qu'ils méritent. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. - Protestations sur les bancs du groupe LFI - NUPES.)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Les enseignants sont le cœur battant de la République et, grâce à leur mobilisation durant la crise sanitaire, ils ont permis à notre école de rester ouverte.

Un député du groupe GDR - NUPES.
Est-ce que vous allez les payer ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous devons mieux les associer à la transformation de l'école : nous revaloriserons leurs salaires et construirons avec eux les évolutions de leur profession. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

Mme Farida Amrani.
C'est faux !

Mme Élisabeth Borne.
Avec eux, nous devrons bâtir un nouveau pacte, répondre à la question des remplacements,...

M. Patrick Hetzel.
C'est la catastrophe, les remplacements !

Mme Élisabeth Borne.
...avancer pour l'aide individualisée,...

Mme Sophia Chikirou.
Augmenter les salaires !

M. Fabien Di Filippo.
C'est un atelier de bricolage, cet après-midi !

Mme Élisabeth Borne.
L'avenir de notre jeunesse, c'est aussi accompagner toutes les voix de l'émancipation. Assumons d'être une grande nation culturelle. La culture sauve, grandit, fait l'âme et le rayonnement de notre pays. Rendons la culture accessible à toutes et tous, dès la jeunesse. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, HOR et sur quelques bancs du groupe Dem.)
C'est pourquoi nous proposerons détendre le pass culture dès la sixième et d'amplifier l'éducation artistique et culturelle. (Mêmes mouvements.) Soutenons la création dans l'espace physique comme numérique, prolongeons notre action pour sauvegarder le patrimoine. C'est notre identité, notre héritage, notre histoire.

M. Fabrice Brun.
Et les déserts médicaux ?

Mme Élisabeth Borne.
Ensuite, nous devrons soutenir les soignants. (Exclamations sur les bancs des groupes RN, LFI - NUPES, SOC, Écolo - NUPES, GDR - NUPES et LR. )

M. Patrick Hetzel.
Tous les exclus du Ségur !

Mme Élisabeth Borne.
Le covid-19 a mis à jour les fragilités de notre système de soins. Il a aussi montré l'engagement exceptionnel de nos soignants, et je veux leur rendre hommage. (Les députés des groupes RE, Dem et HOR se lèvent et applaudissent. - " Hypocrites ! " scandent les députés des groupes LFI - NUPES, SOC, Écolo - NUPES et GDR - NUPES. ")

Mme la présidente.
Mes chers collègues, s'il vous plaît, pas de telles manifestations dans l'hémicycle. (Protestations sur les bancs du groupe LFI - NUPES, dont plusieurs membres montrent les bancs du groupe RE en criant " Adressez-vous à eux ! ".) Poursuivez, madame la Première ministre.

Mme Élisabeth Borne.
C'est d'abord grâce à nos soignants que notre pays a tenu. Notre devoir est de continuer à agir. Le Ségur de la santé a permis des revalorisations sans précédent des rémunérations des soignants et dégagé des moyens inédits pour notre hôpital. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Pourtant, tout n'est pas réglé, loin de là. Nous avons pris des mesures d'urgence pour cet été. L'heure est maintenant aux solutions structurantes. Nous devons renforcer l'attractivité des métiers. Nous devons permettre aux soignants de passer plus de temps auprès des patients en allégeant la charge administrative et en renforçant la coopération entre les professionnels de santé.

M. François Ruffin.
Baratin !

Mme Élisabeth Borne.
Nous devons investir dans l'innovation pour moderniser notre système de soins. Dans chaque territoire, nous devons construire une offre de santé adaptée.
Je suis convaincue que les solutions viendront des professionnels, des élus, des patients et du terrain. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)
Dès septembre, des concertations seront lancées partout en France avec un objectif clair : lutter contre les déserts médicaux par une meilleure coordination entre les acteurs, entre la ville et l'hôpital, entre le public et le privé. (Exclamations continues sur les bancs du groupe LFI -NUPES.)
Nombreux m'en ont parlé, notamment le président Vallaud, (" Ah ! " sur les bancs de divers groupes), nous pouvons construire des consensus sur ce sujet-là aussi. (M. Cyrille Isaac-Sibille applaudit.)
Je veux ici aussi rappeler que l'épidémie de covid-19 n'est pas finie, mais qu'elle reprend même nettement ces derniers jours. Si notre système de santé est actuellement préservé, nous devons rester vigilants et prêts à agir.
Bâtir la République de l'égalité des chances, c'est faire de la France un pays où l'on vieillit bien, qui favorise l'espérance de vie en bonne santé, qui assure une prise en charge de qualité à domicile ou en maison de retraite. Notre première mission : donner aux personnes âgées la capacité de vieillir sereinement chez elles.
Nous y parviendrons grâce au dispositif MaPrimeAdapt' leur permettant d'aménager leur logement. Nous y parviendrons en améliorant la qualité des services à domicile. Mais il nous faut aussi améliorer la vie de nos aînés en maison de retraite. Les scandales récents sont révoltants. Nous avons renforcé les contrôles pour qu'ils ne puissent plus survenir. Nous devons maintenant inventer des établissements de demain à la fois plus ouverts, plus humain et mieux médicalisés.

Mme Farida Amrani.
Non lucratifs !

M. François Ruffin.
Ça nous manquait !

Mme Élisabeth Borne.
Le handicap concerne 12 millions de Français. Un conjoint, un parent, un enfant : toutes nos familles sont concernées. Offrons-leur une société qui accepte, qui inclut, qui respecte. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. - Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Une conférence nationale du handicap se tiendra début 2023.

M. Aurélien Pradié.
On a vu le résultat de la dernière ! On s'en fout des conférences ! " Déconjugalisez " l'AAH, vous serez concrète !

Mme Élisabeth Borne.
Nous agirons pour l'accessibilité universelle pour l'autonomie - notamment financière - des personnes handicapées, pour la transformation des structures médico-sociales et pour une meilleure reconnaissance des personnels de l'accompagnement. Nous devons améliorer l'inclusion par le travail dans le milieu ordinaire d'abord, et aussi dans les établissements ou services d'aide par le travail (ESAT) ou en entreprises adaptées.
Je vous annonce que mon gouvernement réformera l'allocation aux adultes handicapés (AAH) avec vous et les associations. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et Horizons. - Exclamations sur les bancs des groupes RN et LR.)

M. Sébastien Jumel.
La mauvaise foi incarnée !

M. Fabien Di Filippo.
Avalez votre chapeau !

Mme Élisabeth Borne.
Il s'agira d'une réforme en profondeur. Nous partirons du principe de la " déconjugalisation ". ( " Ah ! " sur les bancs des groupes RN et LR. - Exclamations sur les bancs des groupes LFI - NUPES, SOC, Écolo -NUPES et GDR - NUPES.) C'est une question de dignité et une avancée très attendue. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et Horizons.)

M. Stéphane Peu.
Mais vous aviez voté contre !

Mme Élisabeth Borne.
Bâtir la République de l'égalité des chances, c'est réussir la cohésion des territoires. Avec les territoires et leurs élus, nous voulons une relation fondée sur le respect, le dialogue et l'action. C'est une préoccupation partagée. Nous en avons beaucoup parlé ensemble, monsieur le président Marcangeli, monsieur le président Chassaigne. (" Ah ! " sur divers bancs.)
Je veux saluer l'engagement et la détermination des élus locaux. Je l'ai dit, les politiques publiques doivent se construire avec eux. La crise sanitaire l'a montré : quand nous travaillons main dans la main, nous pouvons tout surmonter.

Les cinq dernières années ont permis de commencer à réduire les fractures de notre France. Nous avons créé plus de 2 000 Maisons France Services.

M. Patrick Hetzel.
Ça ne fonctionne pas !

Mme Élisabeth Borne.
Nous avons investi pour redynamiser les centres-villes et les centres-bourgs et pour accélérer le renouvellement urbain. Mon gouvernement poursuivra la logique de différenciation partout où elle répond aux attentes. Monsieur le président Pancher (" Ah ! " sur divers bancs) , nous l'avons évoqué ensemble : la règle commune doit pouvoir s'adapter en fonction des spécificités de chaque territoire.
Nous voulons donner plus de poids aux élus locaux, plus de lisibilité dans leurs compétences, plus de cohérence dans leur action. Le conseiller territorial peut être un moyen d'y parvenir et de construire les complémentarités indispensables entre départements et régions. Cela passera naturellement par les concertations approfondies que nous lancerons l'an prochain.

M. François Ruffin.
Dans la concertation !

Mme Élisabeth Borne.
Pour mener à bien leurs missions, les collectivités ont besoin de visibilité et de stabilité dans leurs compétences. C'est l'enjeu de l'agenda territorial que nous devons bâtir ensemble : État et collectivités doivent se donner une lecture commune des défis à relever, des leviers à activer, des moyens nécessaires.
En Corse, le cycle des discussions engagé avec les élus et les forces vives sera relancé dans les prochains jours. (MM. Bruno Millienne et Jean-Paul Mattei applaudissent.) Il doit aboutir à des solutions concrètes pour tous les Corses, notamment la jeunesse, en matière de travail, de logement, de transition écologique, de développement économique et de sécurité. Nous sommes prêts à aborder tous les sujets, y compris institutionnels.

M. François Ruffin.
Dans la concertation !

M. Matthias Tavel.
3,5 points, c'est trop peu !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Je veux aussi avoir un mot particulier pour nos compatriotes des outre-mer, des territoires qui représentent une chance inestimable pour notre pays. Ce sont des terres de jeunesse et d'espoir, les places fortes de notre souveraineté. Plus que jamais, nous avons besoin de nos outre-mer.
Pourtant, ces derniers mois, vous avez dit vos doutes, vos craintes et vos colères.

M. Jean-Paul Lecoq.
À juste titre !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Il y a quelques jours, toutes les collectivités d'outre-mer se sont rassemblées pour lancer l'appel de Fort-de-France. Nous leur répondrons. Mon gouvernement les accompagnera pour soutenir leur développement économique et créer de l'emploi, pour renforcer la présence des services publics et assurer la sécurité, pour améliorer, avec les collectivités, la distribution d'eau potable, l'assainissement et le traitement des déchets et pour agir sur toutes les causes de la vie chère, comme dans l'Hexagone.
Nous devons avancer sur toutes ces questions et placer les outre-mer aux avant-postes de la transition écologique. Je demande à tout mon gouvernement la plus grande attention pour les territoires ultramarins.

Mme Mathilde Panot.
Avec le GIGN (Groupe d'intervention de la gendarmerie nationale) et le RAID (recherche assistance intervention dissuasion), par exemple !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Ce quinquennat sera également celui d'une nouvelle page de notre histoire républicaine avec la Nouvelle-Calédonie.
Nous aurons à écrire l'avenir de notre relation au terme du processus politique défini par l'accord de Nouméa.

Un député du groupe LFI - NUPES.
Vous avez failli !

Mme Natalia Pouzyreff.
Eh oui !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
C'est pourquoi j'ai envers elles la plus grande exigence. Et je le dis sans détour : honte à ceux qui attaquent systématiquement nos policiers et nos gendarmes, honte à ceux qui tentent de dresser les Français contre ceux qui les protègent. (Les députés des groupes RE, Dem et HOR applaudissent et se lèvent - De nombreux députés du groupe LR et plusieurs députés du groupe RN applaudissent également.)

M. Sylvain Maillard.
Oui, honte à eux !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous voulons une gendarmerie et une police républicaine au plus près des Français, qui attendent des réponses fortes pour leur sécurité du quotidien. Nous en parlions ensemble, madame la présidente Bergé. (" Ah ! " sur les bancs du groupe RN.) Les cinq dernières années ont permis de donner des moyens exceptionnels à nos forces de sécurité intérieure.

Un député du groupe LR.
Ça n'a servi à rien !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous avons recruté 10 000 policiers et gendarmes supplémentaires. Nous avons fortifié notre sécurité civile et agi pour nos sapeurs-pompiers. Nous avons renforcé notre lutte contre le terrorisme et les moyens de nos services de renseignement en prolongeant l'effort entamé depuis les attentats de 2015. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Le quinquennat qui s'ouvre doit nous permettre d'amplifier cet effort autour d'une vision globale et de moyens pour notre sécurité.

Un député du groupe LFI - NUPES.
Et le Stade de France ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
C'est pourquoi mon gouvernement vous proposera une loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur. Les défis sont nombreux : contre l'insécurité du quotidien, contre la cyberdélinquance et contre les trafics. Nous renforcerons encore les moyens de notre sécurité.
Élue d'une circonscription rurale, j'ai aussi été préfète d'une région largement rurale. Je sais ce qu'est le sentiment d'abandon de certains territoires et la crainte de voir la sécurité s'éloigner. Il ne doit pas y avoir de zone blanche en matière de sécurité.

M. Jean-Yves Bony.
Vous avez humilié les ruraux !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Aussi, nous engageons la création de 200 nouvelles brigades de gendarmerie. Ces dernières années ont montré la nécessité de mieux assurer l'ordre républicain.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Nous créerons onze nouvelles unités de force mobile. Cependant, chacun le sait sur ces bancs - et les Français nous le disent -, les solutions ne se trouvent pas uniquement dans des effectifs supplémentaires.

M. Jean-Paul Lecoq.
C'est vrai !

Mme Sophia Chikirou.
Il faut de la police de proximité !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
J'entends la colère des Français et l'exaspération des forces de l'ordre face aux multirécidivistes. La réponse, c'est le refus de l'impunité.

M. Jean-Paul Lecoq.
Et la prévention ?

M. Thibault Bazin.
Vous êtes bien en retard !

M. François Ruffin.
Et McKinsey ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Elle est à la fois profondément française et profondément européenne.

M. Sébastien Jumel.
Renoncez au traité de libre-échange !

M. Patrick Hetzel.
Vous n'avez plus aucune crédibilité sur ces questions !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Cela passe aussi par la souveraineté industrielle et numérique. Nous sommes sur la bonne voie. Grâce aux baisses d'impôts, à la réforme du marché du travail et à l'attractivité retrouvée, nous avons mis un coup d'arrêt à quarante ans de désindustrialisation. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe FI - NUPES.)
Maintenant, accélérons, tout d'abord en continuant à attirer les entreprises et les industries.

M. Fabien Di Filippo.
Vous êtes embourbés !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Comme le Président de la République l'a annoncé, nous vous proposerons de baisser encore les impôts de production et de supprimer la CVAE, la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises, dès la loi de finances pour 2023. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE - Exclamations sur plusieurs bancs du groupe FI - NUPES.)
Concrètement, près de 8 milliards permettront de renforcer la compétitivité de nos entreprises - il s'agit, pour les trois quarts, de PME et d'ETI, les entreprises de taille intermédiaire.

M. Hubert Wulfranc.
Ces milliards permettront aussi de renforcer le grand capital !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Tout aussi concrètement, nous compenserons cette perte de ressources auprès des collectivités.
Accélérons ensuite en investissant massivement dans les secteurs d'avenir comme l'alimentation, l'énergie, le spatial, les biomédicaments ou l'électronique. Bâtissons des filières d'excellence française et européenne. C'est le sens des 50 milliards d'investissements de France 2030 pour l'innovation, pour la recherche et pour la réindustrialisation.
Plus largement, nous investirons dans nos sites universitaires et nos organismes de recherche. Nous continuerons à revaloriser et à simplifier le métier de chercheur. La recherche, quel qu'en soit le domaine, inspire et fait la force de notre pays. Je veux rendre hommage à l'excellence de nos universités et laboratoires. En disant ces mots, je veux féliciter, au nom du Gouvernement, le mathématicien Hugo Duminil-Copin, dont la médaille Fields fait la fierté de toute notre recherche. (Applaudissements sur tous les bancs.)
Accélérons encore en protégeant et en promouvant notre culture et notre création mais aussi en tenant notre rang de grande nation numérique, une nation qui soutient sa French Tech , une nation capable d'apprendre à ses jeunes les bons usages et de lutter, à travers la régulation, contre le cyberharcèlement et la haine en ligne. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Une France plus forte dans une Europe plus indépendante, cela suppose aussi la garantie de notre souveraineté alimentaire. Le constat est édifiant : près de la moitié des agriculteurs prendront leur retraite d'ici à 2030. Nous devons assurer l'avenir de la filière agricole. La représentation nationale a montré, autour de la question des retraites, qu'elle pouvait s'unir pour nos agriculteurs. Dès lors, bâtissons ensemble une loi d'orientation et d'avenir pour l'agriculture.

M. Sébastien Jumel.
C'est énorme !

Mme la présidente.
La parole est à Mme Aurore Bergé.

Mme Aurore Bergé (RE).
Madame la Première ministre, à travers votre nomination, c'est une certaine idée de la République qui s'affirme, dans laquelle les parlementaires peuvent, je le crois, se reconnaître largement par-delà leurs convictions et leurs engagements. Une République du travail, celui qui a permis votre parcours. Une République de l'engagement, celui qui n'a jamais cessé de vous animer dans toutes vos fonctions. Une République de l'égalité, celle qui s'adresse à toutes les petites filles de notre pays. C'est donc avec beaucoup émotion que je prends la parole après vous, sous l'œil bienveillant de la première femme élue à la présidence de l'Assemblée nationale. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Ce sont encore deux femmes qui me succéderont à cette tribune. Quel symbole au regard de l'histoire de France et des combats qui nous ont précédés, au regard du mépris et des quolibets qu'ont dû, ici, supporter tant de femmes parlementaires et ministres ! Le temps des femmes est venu et c'est historique. Le temps des femmes est venu et il durera. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) Soyez assurés que nous saurons user de nos nouvelles responsabilités avec bienveillance mais surtout avec pugnacité. Ce qui nous intéresse, ce n'est pas d'être les premières mais de nous inscrire dans le temps long.
Madame la Première ministre, vous venez de nous exposer la feuille de route que vous fixez au Gouvernement. Il me revient, en tant que présidente du principal groupe de l'Assemblée, de préciser nos intentions et l'état d'esprit qui nous anime alors que nos concitoyens s'interrogent légitimement sur notre capacité, majorité comme oppositions, à adapter les pratiques parlementaires à la nouvelle donne politique qu'ils ont choisie. Nous sommes collectivement dépositaires d'un héritage, la Constitution de la Ve République ; moi-même comme l'ensemble des députés de mon groupe y restons fidèles. Fidèles à celui qui l'a inspirée : le général de Gaulle. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Fidèles à ceux qui l'ont fait évoluer : Jacques Chirac, Lionel Jospin, Nicolas Sarkozy. Fidèles au subtil équilibre des pouvoirs prévu par notre texte fondamental : un président légitime, un gouvernement qui a les moyens d'agir, une Assemblée nationale ayant la capacité à légiférer en toute liberté. Voilà notre cadre commun : non pas le blocage ni l'idée bien peu républicaine que les résultats des élections peuvent être contestés dans la rue (Applaudissements sur les bancs du groupe RE) ,...

M. Guillaume Kasbarian.
Bravo !

Mme Aurore Bergé.
...mais cette Ve République qui nous fait, qui nous tient et que, dans cette majorité présidentielle, nous voulons faire vivre. Face aux temps présents, nous devrons de nouveau en faire évoluer l'usage car les attentes de nos concitoyens sont fortes, notamment s'agissant de leur association aux processus de décision. Mais faire évoluer, ce n'est pas déconstruire ; améliorer, ce n'est pas trahir les intentions des constituants de 1958. Le débat d'aujourd'hui nous offre l'occasion de clarifier et de définir un cap et un chemin.
Que les opposants acharnés à la Ve République s'en offusquent, rien de plus normal : ils sont dans leur rôle. Mais que des représentants de partis de gouvernement, qui ont exercé le pouvoir en respectant l'esprit de la Constitution, feignent de s'en indigner, voilà qui est plus surprenant. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

M. Sylvain Maillard.
Eh oui !

Mme Aurore Bergé.
Il y a ceux qui veulent abattre la Ve République et ceux qui veulent la faire vivre pleinement ; nous sommes de ceux-ci. Nos institutions constituent le socle de notre action. Elles sont, bien au-delà des bancs de la majorité présidentielle, notre bien commun. Les 10 et 24 avril, puis les 12 et 19 juin, les Français ont fait leur choix : celui d'un président fort, largement réélu (Exclamations sur les bancs du groupe LFI - NUPES. - Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem) , et, pour la première fois hors cohabitation, celui d'un parlement fort où les lois non seulement se votent, mais s'élaborent. Il n'y a pas les Français qui votent bien et ceux qui votent mal : il y a le choix souverain des Français dont nous sommes collectivement dépositaires.

M. Alexis Corbière.
Dites-le à Darmanin !

M. Aurélien Pradié.
C'est ce qu'on appelle des traîtres !

M. Sylvain Maillard.
Eh oui !

Mme Aurore Bergé.
Car précipiter notre pays dans la crise par des décisions déraisonnables et des dépenses sans contrainte reviendrait à faire porter à nos entreprises des charges insupportables au prix de la baisse de leur compétitivité (Applaudissements sur les bancs du groupe RE) , à abdiquer notre objectif de plein-emploi, à appauvrir les Français et, in fine , à obérer la capacité de l'État à faire face à ses responsabilités. Pas d'augmentation de la dette, pas d'augmentation des impôts : voilà le seul cadre responsable dans lequel nous pouvons mener notre action. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.)

M. Sylvain Maillard.
Très bien !

Mme Aurore Bergé.
La renaissance que nous incarnons imposera de protéger le pouvoir d'achat et donc de poursuivre le travail entamé pour une fiscalité allégée. Trop d'impôt tue l'impôt ; on ne combat pas l'inflation en l'alimentant - souvenons-nous des mots si justes de Pierre Bérégovoy. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.) La renaissance que nous voulons contribuer à faire émerger exigera de préserver les générations futures, donc de tenir l'objectif d'une dette publique contenue puis réduite. Il faut continuer à renforcer notre Europe, une Europe plus forte et plus souveraine, capable de résister aux nouveaux empires et aux nouveaux défis environnementaux, technologiques, sanitaires, migratoires, qui ne connaissent pas les frontières. La présidence française de l'Union européenne a démontré notre capacité d'action collective sous l'impulsion du Président de la République : taxe carbone aux frontières, régulation des grandes plateformes numériques et solidarité indispensable avec le peuple ukrainien qui lutte pour sa liberté. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Quelle émotion de voir le drapeau européen entrer au cœur du parlement ukrainien, alors qu'ici, certains voudraient l'en chasser ! (Vifs applaudissements et " Bravo ! " sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) Je suis fière de m'exprimer devant ce drapeau, notre héritage et une part indispensable de notre avenir.
Enfin, la renaissance républicaine passe par la réaffirmation de la laïcité comme fondement de notre bien commun, par la capacité à faire renaître le goût du métier chez les enseignants qui se sentent déconsidérés en tant que figures d'autorité et finissent par se sentir mal protégés.

M. Alexis Corbière.
Ils sont surtout mal payés !

M. Aurélien Pradié.
Vous avez raison, c'était trop aimable ! En réalité, c'était pire. ------------------Cette partie de la séance est en cours de finalisation---------------------------------------------

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Cette transformation va s'imposer à tous : à l'État, aux collectivités et dans la vie quotidienne de chacun d'entre nous. Le temps presse. Parfois, la transition écologique peut percuter des citoyens, des salariés, des entreprises. Tous les arbitrages ne sont pas si simples. Ma conviction est que, dans ce cas, seules peuvent nous sortir de l'ornière la transparence vis-à-vis de nos concitoyens et une démarche résolue. C'est celle qui a présidé à l'action du Gouvernement depuis 2017 (Dénégations sur les bancs du groupe Écolo - NUPES) ; c'est celle que je souhaite, au-delà des caricatures, que nous construisions ensemble.

Mme Émilie Bonnivard.
Qu'avez-vous fait pour le fret ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Le président Vallaud a présenté, tout en nuances, un plaidoyer pour une politique alternative. Manifestement, ce n'est pas celle que la majorité des Français a choisie. (Exclamations sur quelques bancs des groupes SOC et Écolo - NUPES.) Les Français sont des citoyens profondément éclairés et, s'ils ne supportent pas les arguments d'autorité, ils n'acceptent pas davantage les approches caricaturales ou illusoires. Non, la retraite à 60 ans n'est pas une perspective crédible, vous le savez. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. - Protestations sur les bancs des groupes LFI- NUPES, SOC et Écolo - NUPES.) Non, sortir de l'OTAN ne nous rendra pas plus forts, contrairement à ce que vos alliés insoumis soutiennent à longueur de temps. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.) Il faut parfois accepter la complexité et la contrainte (Exclamations sur les bancs du groupe LFI- NUPES) , non pour se résoudre à ne rien faire mais, au contraire, pour bâtir autre chose que des châteaux de sable.
Je le veux dire aussi au groupe socialiste : je sais ce qu'il a défendu dans le passé et je connais sa culture de gouvernement. Je suis convaincue que nous pourrons trouver des points de convergence. (" Ah ! " sur les bancs du groupe LFI- NUPES. - Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.)

M. Thibault Bazin.
Les camarades ! C'est la gauche plurielle !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Le président Pancher a indiqué, à juste titre, que le pays était parfois au bord de la rupture et il nous a appelés à dépasser les défiances. Je partage son envie d'audace ainsi que son attention à la méthode et au dialogue. Je crois avoir dit clairement que j'étais prête à ce renouveau démocratique ici, au Parlement, et dans les territoires.

Mme Alma Dufour.
Alors, demandez la confiance !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Je sais que l'intergroupe NUPES entend déposer une motion de défiance. (" Oui ! " sur les bancs des groupes LFI- NUPES, SOC, Écolo - NUPES et GDR - NUPES. ) Mais ce n'est pas à d'aussi fins connaisseurs de la Constitution que je vais rappeler que cet objet juridique et politique n'existe pas : ce que vous allez voter, c'est une motion de censure.

M. Alexis Corbière.
C'est vrai ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI- NUPES.)

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Vous cherchez à censurer un gouvernement qui commence son travail avec quelques principes de fond que j'ai rappelés - pouvoir d'achat, valorisation du travail, transition écologique, égalité des chances, souveraineté - et avec pour méthode le dialogue et l'échange ; la confrontation aussi, sans doute. (" Bravo ! " et applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

Mme Raquel Garrido.
Et le principe de responsabilité ?

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
Je ne sais pas si c'est pour ce motif que vous proposez à vos collègues de nous censurer. Je ne sais pas s'il s'agit de faire croire qu'il existerait une majorité alternative cohérente ; si c'était le cas, j'espère que vous auriez le courage de le formuler.
Je crois que nous pouvons, projet par projet, construire des majorités d'action. J'y crois profondément car nous savons que notre pays ne peut s'enfermer dans le surplace. Je le répète : la confiance, je suis certaine que nous la construirons.

Plusieurs députés du groupe LFI - NUPES.
Vous ne l'avez pas !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre.
" Un homme est la somme de ses actes, de ce qu'il fait, de ce qu'il peut faire. Rien d'autre ", écrivait Malraux. Ce doit être aussi vrai pour les femmes. Je demande à être jugée sur les actes et sur l'engagement du Gouvernement que j'ai l'honneur de diriger. (Mmes et MM. les députés des groupes RE, Dem et HOR se lèvent et applaudissent longuement.)

Mme la présidente.
Le débat est clos.
4 * Ordre du jour de la prochaine séance


Source : Assemblée Nationale.
https://rakotoarison.over-blog.com/article-srb-20220706-discours-elisabeth-borne.html


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