La nature est dans l’assiette, le talent est en cuisine.
Le nom, déjà. Toya. Il faut aller au Japon pour en trouver l’origine. Un lac au nord du pays dans le parc national de Shikotsu-Toya. Un écosystème (presque) parfait, protégé, de l’eau, des herbes, des plantes, des poissons sauvages, et de l’élevage en harmonie avec la nature environnante au même titre que les cultures, raisonnables et extensives. Il semblerait qu’après cette découverte, Loïc Villemin ne fut plus jamais le même.
Revenu dans sa Moselle natale, il n’eut de cesse de vouloir recréer cette harmonie essentielle et de mettre en œuvre la cuisine qui la reflèterait au mieux. Tout est pensé, organisé, pour respecter ce qui est pour lui essentiel, vital pour la qualité de sa cuisine et de travailler dans un respect de tous les instants de la nature qui l’environne pour qu’elle lui offre le meilleur. Cette philosophie, cet de vivre et de travailler au premier sens du terme lui a permis d’obtenir l’étoile verte Michelin, nouvelle « récompense » bienvenue du guide rouge. Il est, comme nous, sensible à la démarche zéro déchet, du chef, zéro plastique, pas de poissons de mer à cause de la surpêche, travail sur des pièces entières de viande, et légumes cultivés dans un jardin spécialement dédié au restaurant.
Loïc Villemin a choisi et créé un décor qui s’harmonise avec l’ensemble. Une vaste salle claire, aux tables espacées, ouverte sur le verdoyant d’un terrain de golf et d’un étang grâce aux grandes baies vitrées qui l’entourent.
Le chef propose trois menus, tous en fonction de thématiques environnementales. Il vient d’ailleurs lui-même, à chaque table, pour les présenter. Chaque plat est pensé, construit, et réalisé de mains de maitre. Un festival de saveurs…
Tout commence par des amuses-bouche qui font beaucoup plus qu’amuser. Ils sont d’une créativité époustouflante et de haute tenue avec des saveurs très marquées et des alliances osées mais réussies. On peut citer la Foccacia à l’huile de sapin ; la tartelette radis et groseille ; l’asperge blanche glacé au lait, posée sur une gaufre, et caviar ; le petit Ris d’agneau laqué, jus de veau, petit lait (une merveille !) ; le Bœuf cru, épinards, vinaigre, caviar, petit lait (un peu vinaigré), et un délicat beurre fumé au foin. Le pain est fait sur place à la farine de levain.
Le premier plat est magnifique ! Escargots, asperges fermentées, ail des ours, herbes, beurre blanc aux asperges fermentées. Esthétique, finesse, perfection de l’alliance en une explosion de saveurs.
Omble chevalier, caviar, raviole de fromage frais, bouillon d’omble chevalier fumé, qui donne un coté salin trop présent, en léger déséquilibre par rapport à la finesse du reste. Dommage car la construction du plat est très subtile sur la complémentarité des produits.
Un plat tout en couleur sombre que ce Boudin de brochet, sang du brochet et de volaille, betteraves, pommes brulées, petit lait, jus d’écrevisse. Un ensemble assez « sucré » (la betterave ?), un boudin génial, et ces pommes fruits rustiques où le « brulé » rehausse le goût. Un plat très fin et rustique à la fois.
Une belle et dodue Asperge verte cuite au sautoir, fromage frais de brebis, purée de petits pois, vinaigrette de petits pois, vinaigre. Trop de vinaigre qui emporte tout avec une asperge à peine cuite, plus qu’al dente, qui n‘apporte rien au goût. Un plat un peu déséquilibré.
Le chef refuse de travailler des veaux de lait dont il a vu l’élevage et ce qu’ils subissent. Il propose un jeune broutard (qui a commencé à manger de l’herbe), excellent jus de cuisson, ail frais, béarnaise, pour un plat fort savoureux.
Chef d’œuvre autour du lait pour le premier dessert : caramel, glace meringue et lait, mousse de lait. Fin et goûteux. Splendide !
Tout aussi impressionnante : Rhubarbe, blanc manger, fleur d’oranger.
En prime, deux tartelettes, l’une pistache, l’autre fraise/vanille à tomber de sa chaise !
Un festival, disais-je. On en arrive presque à s’étonner d’une telle continuité dans l’excellence. On découvre des assiettes splendides, emplies de saveurs rares et d’alliances mûrement pensées. Tout cela servi par une technique et une précision diabolique mais sans oublier une chaleur et une sensualité dans chacune des assiettes.
Loïc Villemin est un homme entier, décidé, volontaire, sachant qui il est et où il veut aller. Un chef de convictions, intransigeant sur ses fournisseurs, sur la qualité et l’origine des produits. Il surveille avec autant d’amour l’élevage des escargots que celui des ombles chevaliers voisins.
Etoilé depuis neuf ans maintenant, il est sans doute à la porte de la deuxième étoile mais ne frappe pas pour y entrer à tous prix. L’essentiel est ailleurs. Il est dans la découverte d’un talent unique dont les plats vous laissent pantois autant qu’ils vous régalent.
Avenue Jean Monnet
57380 Faulquemont
Tél : 03 87 8934 22
reservation@toya-restaurant.fr
Fermé dimanche, lundi & mardi
Menu Plaisir : 57 € (3 plats)
Menu Histoire : 100 € (5 plats)
Menu Nature : 130 € (7 plats)