Quand Sarkozy exhibe « le meilleur de lui-même »

Publié le 11 août 2008 par Lozsoc
août 11th, 2008 Posted in France, Sarkozisme et bling bling, Vidéos

Il y a des phrases, apparemment anodines, dont l’intérêt se révèle a posteriori. Ainsi de ces quelques mots de l’ectoplasme présidentiel interviewé par un ectoplasme du service des sports de France Télévision :

« Le Dalaï-Lama lui-même m’a indiqué qu’il ne souhaitait pas qu’on organise une rencontre durant les jeux olympiques, pourquoi ? Parce que le Dalaï-Lama a dit autre chose, je souhaite le succès des jeux olympiques organisés par la Chine. Pourquoi il le dit ça ? (sic) Parce que c’est un homme sage qui sait très bien que dans le raidissement et la tension, on n’améliorera pas la situation au Tibet. Alors ce n’est que partie remise. Et puis euh euh j’enverrai eh ben le meilleur de moi-même puisque ma femme euh ira participer euh à l’inauguration du temple bouddhiste qui aura lieu euh dans le midi de la France, le 22. Puis d’ici la fin de l’année euh, de cette année là, on aura d’autres occasions […] »

En relisant ce passage de l’interview, on est effet frappé de constater à quel point la forme du propos permet de mieux connaître la psychologie du locataire de l’Elysée.

A cet égard, il est intéressant de noter que le Leader Minimo s’est exprimé avec une certaine facilité dès lors qu’il se référait au Dalaï-Lama pour justifier sa couardise. Le ton était assuré, le geste démonstratif, le débit de voix régulier.

Ceci, à vrai dire, n’est guère surprenant, parce qu’il s’agit d’une tactique classique de Sarkozy. Souvent, lorsque son attitude personnelle est directement mise en cause, le président de la République de l’UMP a une certaine propension à se défausser sur quelqu’un d’autre. Autrement dit, Sarkozy a trouvé la sagesse du chef spirituel tibétain commode, au point de s’en prévaloir pour tenter de dissimuler sa lâcheté et ses promesses inconsidérées tenues durant la campagne présidentielle (« Je ne crois pas à la « realpolitik »). Pourquoi ne serait-il pas allé en Chine, alors que le Dalaï-Lama en personne a souhaité que les JO soient un succès ?

En revanche, Sarkozy n’a rien dit au sujet d’Angela Merkel, Gordon Brown et George W. Bush qui ont accueilli le plus célèbre Tibétain du monde. Il faut dire que l’ectoplasme télévisuel, qui servait la soupe, a soigneusement évité de lui rappeler ces faits sur lesquels on aurait pourtant aimé connaître son sentiment. Mais en France, le journaliste est un être respectueux, qui évite généralement de parler de choses qui peuvent indisposer l’homme de pouvoir.

Et puis soudain, en l’espace de quelques secondes, un autre Sarkozy est apparu. Celui-ci s’est montré plus hésitant dans sa prise de parole. Il a ainsi ponctué plusieurs fois ses phrases d’interjections inélégantes traduisant le doute et la contradiction : «euh», «eh ben».

L’apparition de ce type d’interjections correspond souvent, chez Sarkozy, à son incapacité de réfréner le ridicule quand il se sent en mesure de faire ce qu’il pense être un bon mot ou une remarque pleine de subtilité. Là, il s’agissait de mettre en scène Carla Bruni-Sarkozy qualifiée assez étonnamment de « meilleur de [lui-même] », car on ne manquera pas de rappeler qu’en août 2007, le président n’avait pas encore divorcé et fait la connaissance du « meilleur de lui-même ».

On pourrait certes voir dans l’énormité du propos le clin d’œil d’un homme amoureux, ce qui est sans doute un peu le cas, mais Sarkozy est bien trop cynique pour qu’on minore l’utilité politique qu’il retire de ses allusions systématiques à sa nouvelle femme. Chaque fois qu’il s’agit de se sortir de moments embarrassants, Sarkozy a pris en effet l’habitude d’évoquer son épouse, dont il sait rappeler le physique avenant.

Dans cette interview, le président « bling bling » confirme donc officiellement ce que l’on savait déjà, à savoir que Carla Bruni-Sarkozy est une pièce importante, sinon essentielle, de sa communication puisque dès qu’elle apparaîtra dans les médias, les Français seront désormais priés d’y voir, en toute simplicité, « le meilleur de Nicolas Sarkozy ».


Pour voir l’extrait vidéo de l’interview de Sarkozy, cliquez ici.