(Carte blanche) à Claude Minière : Claro que si
Par Florence Trocmé
Claro que si
Les journalistes s’intéressent très peu à la poésie – mais pourquoi ? pourquoi si peu ? Ils tirent les marrons du feu. Ils sont prêts à reconnaître que la poésie est le foyer de la littérature, mais qu’en dire ? Qu’en dire qui ne serait pas une paraphrase. Il est beaucoup plus facile de parler des romans – et pour dire, à l’occasion, que tel ou tel de ces romans est « poétique ». Isidore Ducasse n’a pas manqué de déclarer que le roman est « un genre faux » mais depuis la fin du 19° siècle le roman a conquis les lecteurs et rempli les librairies – peut-être, précisément, parce qu’il est un genre faux (je dirai « hybride »), de l’ordre du reportage et documentaire. Le poème, n’est-ce pas, « donne l’initiative aux mots » (Mallarmé) ; ce faisant, il va vers l’inconnu. Le roman se sert du langage pour rapporter le connu (psychologique, social) et par là satisfait la curiosité des lecteurs. Je crois qu’il serait pourtant possible sans paraphrase ni redondance de rendre compte de l’œuvre d’un, d’une poète. Ce serait se demander comment il, elle, fait avec la poésie : quelle culture, quel rapport à la tradition, quelle invention…Quel bain, quel coup de balai ? Ici, les poètes eux-mêmes ont à jouer leur carte (Poezibao leur en offre l’opportunité). Ils n’y présentent pas seulement leurs actes ponctuels mais aussi la relation qu’ils entretiennent avec l’histoire de leur art.
Claude Minière
NDLR : Claude Minière fait écho ici à un tweet de l’écrivain et traducteur Claro :
« Le fait que la critique ne parle presque jamais de poésie : voilà qui dit tout sur l'amour de la littérature au temps des médias »
Publié le 14 juin 2022 à 9 h 55
Poezibao avait répondu à ce tweet :
« oui si on s'en tient aux "vieux médias" mais les jeunes médias, tenus par des jeunes critiques parfois vieux parlent eux, sans cesse, de poésie, cf Sitaudis, cf Poezibao et les autres - comme on n'en a peut-être jamais parlé non ? »
Publiée le 14 juin 2022 à 4 h 42 pm.