Un moment vient (c’est comme cela que je pourrais décrire l’expérience qui a été la mienne) où l’on s’engage dans un chemin qui se rétrécit de plus en plus. Peut-être est-ce comparable à ce « trou de l’aiguille » dont parle le Christ ; il est évident qu’un chameau ne peut pas passer par le trou de l’aiguille et qu’un individu riche ne peut pas atteindre le Royaume des Cieux ; mais de quelles richesses s’agit-il ? De toutes les richesses intérieures – les richesses de l’ego dont la pure conscience en nous est affublée et encombrée. Ce sont ces richesses-là qui doivent être abandonnées : les richesses émotionnelles, les richesses mentales, les richesses intellectuelles, toutes les richesses dans le relatif – les richesses des différents koshas ou « revêtements du Soi ».
Le chemin paraît se rétrécir de plus en plus ; il faut encore perdre, il faut perdre encore, pour devenir de plus en plus pauvre, de plus en plus nu, jusqu’à passer même pas par le trou de l’aiguille mais par un point, le point géométrique qui n’a aucune dimension. La seule réalité qui demeure, c’est la conscience, dépouillée de tous ses revêtements. Si vous allez jusqu’au bout, au moment où vous avez tout donné, la réalité se révèle, l’éveil se produit, l’ego a perdu sa magie et son pouvoir, c’est fini : vous êtes libre ! Mais vous ne pouvez rien garder...
Si vous voulez aller, dans cette vie, jusqu’au bout – et l’ultime réalisation, c’est le jusqu’au bout – il faudra tout lâcher – TOUT
Arnaud Desjardins
Au-delà du moi À la recherche du soi II
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