"Réouverture de l'affaire de la plus atroce attaque montonera"
aboie le gros titre en lettres rouges
Cliquez sur l'image pour une haute résolution
C’est un vieil attentat que les guérilleros montoneros (1) avaient monté en 1976 contre les forces de la police fédérale, en faisant sauter la cantine de son quartier général. Des personnes avaient été arrêtées en leur temps mais l’affaire avait fini par être classée devant l’horreur des crimes de l’autre camp, ceux de l’État sous la dictature militaire de 1976-1983, ce que par la suite les militants démocratiques allaient appeler, non sans raison, le terrorisme d’État.
Hier, une chambre fédérale
siégeant à Buenos Aires, où les faits se sont produits, a annulé
ce classement. Ce qui revient à exiger qu’un juge (en
l’occurrence, c’est une femme) rouvre le dossier et relance
l’instruction.
L'info est traitée dans la colonne de droite
à mi-hauteur de la page
Cliquez sur l'image pour une haute résolution
Página/12, furieux, dénonce la démarche d’un condamné pour crimes contre l’humanité (un sbire de la dictature) et d’autres qui allaient dans le même sens et qui viennent, selon la rédaction, de groupes idéologiques qui restent fidèles au régime anticonstitutionnel mis en place par les militaires putschistes de 1976.
Le reste de la presse, qui est de
droite, se félicite de cette décision qui semble, selon leur
analyse, rétablir l’équilibre en faveur de leur côté de
l’échiquier politique national puisque les criminels de la
dictature sont poursuivis, encore aujourd’hui, à un âge avancé,
sans relâche par une justice argentine poussées par les militants
de la démocratie et surtout par les exigences juridiques, politiques
et diplomatiques des traités internationaux que l’Argentine a
signés et qu’elle a violés pendant la dictature.
Même traitement ici
mais les foules de manifestants à Buenos Aires
remplacent les suppositions gratuites et sensationnalistes
sur l'avenir du pape François
Cliquez sur l'image pour une haute résolution
Certains rédacteurs se régalent à l’idée que le journaliste, qui fut l’un de plumes de Página/12, et président (un soupçon sectaire) du CELS, un organisme de droits de l’homme très actif dans la chasse aux crimes de la dictature, Horacio Verbitsky va à nouveau devoir répondre à des juges. Il est soupçonné d’avoir participé directement ou non à l’attentat.
Il va falloir regarder désormais comment la juge reprend l’affaire et comment les parties prenantes interagissent avec elle au fil de l’instruction.
© Denise Anne Clavilier www.barrio-de-tango.blogspot.com
Pour aller plus loin :
(1) Ce mouvement péroniste armé très ancré à gauche a choisi pour se désigner une allusion aux partisans populaires de la guerre d’indépendance qui ont soutenu la liberté du pays dans le nord entre 1812 et 1820 environ puis ont continué le combat cette fois-ci dans la guerre civile et du côté fédéraliste, de nature sociale et politique plus nettement populaire que l’unitarisme, essentiellement soutenu par les grands propriétaires et par Buenos Aires, dont cette centralisation de l’État devait soutenir les intérêts. Ces partisans étaient contenus comme les « montoneros » non pas parce qu’ils n’avaient aucune discipline militaire et formaient donc des tas (montón) comme le dit une étymologie des plus fantaisistes mais répétée à l’envi même par les historiens en apparence les plus sérieux. La montonera, c’était en fait et c’est toujours l’estive des porcs noirs du nord de l’Espagne dans les Pyrénées pour la belle saison. En Argentine, devant les forces coloniales qui regagnaient du terrain entre 1813 et 1816, les villageoises indépendantistes prétendaient que leurs hommes étaient partis en estive, pour justifier l’absence de ceux qui en réalité avaient pris le maquis.