Mais nous voulons tout si vite, bien que tout arrive si lentement
Une fourmi porte les graines de l’hiver qui vient
Car toujours un hiver s’annonce, car c’est toujours l’hiver je crois
Et toute saison connue a son hiver inconnu
Où la neige tombe fine, sous le plus implacable soleil
Sur des glaces perpétuelles, comme les morts qui ont péché, le corps intact au fond de la fosse
Car nous sommes tous un mort qui a péché, notre corps la nuit reste intact
Et chaque matin rejette la terre du songe et ressuscite
Se coiffe avec soin devant la photo du défunt d’hier
Dans un sourire coupable
Puis se mêle sans bruit à la foule
Car c’est un péché de vivre, de promener un corps intact
Conservé dans les glaces
De te lever depuis des siècles de ton trou
Maigre dépouille balbutiant pour un peu d’immortalité —
Car le temps ne se presse pas, tout arrive si lentement
Que la fourmi du début de ce poème
Porte peut-être encore les graines pour l’hiver
Qui pourrait bien ne pas venir.
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Andònis Fostièris (né en 1953 à Athènes, Grèce) – Anthologie de la poésie grecque contemporaine (1945-2000) (Poésie/Gallimard, 2000) – Traduit du grec par Michel Volkovitch.