tout ce qu’il a vêtu de pluies et de cœurs corrodés
la nuit le reconnaît
avec ses aiguilles d’espérance
et sa cendre humide de crachats.
Ne demandez à personne
où se trouve le cri végétalement seul
ni le bouquet de fleurs mortes
ni les cœurs coupés par l’orgueil
ni les innombrables couronnes rachetées par le sang
ni les dents de bois
ni les étoiles d’os
car seuls le solitaire et ses tableaux détiennent la réponse.
Avant de contempler son œuvre
nous ne savions pas que la terre flaire la sueur et les baisers
qu’un chemin de fer de velours chargé de rats et d’extermination parcourt
les jardins de la fidélité
qu’un océan de panthères se transforme en printemps
et les horloges rageuses en asthme de la sensibilité.
Comme un témoin qui ne cherche pas asile
il nous a montré :
la tendresse des cerisiers sauvages
les fleuves d’épis de la mémoire
le plâtre et la mousse de la mélancolie
les vieilles larmes des illusions
le ciel gris déserté par l’enfance
et le pus et le pollen des souvenirs.
En ses toiles se donnent rendez-vous
toute la peine
et toute la furie
du monde.
***
Fernando Arrabal (né en 1932 à Melilla, Espagne) – Humbles paradis (Christian Bourgois, 1985)