Serge Diaghilev (Серге́й Па́влович Дя́гилев - 1872 - 1929) est enterré sur l'île cimetière San Michele de Venise. Diaghilev est inhumé dans le carré orthodoxe du cimetière, où il sera rejoint plus tard par Igor Stravinsky, enterré quelques tombes plus loin.
Les tombes d'Ìgor et de Vera Stravinsky
Crédit photos @ Luc-Henri Roger La tombe de Diaghilev, extrait d'une chronique vénitienne de Gérard Bauër publiée le 16 octobre 1932 par Paris-Soir.[...] Et Diaghilew, promenant [à Venise] les débris de sa troupe et de son faste dans ce décor de ballet, Diaghilew, l'air d'un satrape triste, le corps avide et rêveur, songeant on ne savait à quoi ; passé, avenir, tout prenant peut-être dans son esprit une ardeur à la fois violente et poétique - comme il était lui-même. Il y a trois ans, il a achevé a Venise sa vie d'animateur nomade, " roman comique " où il avait renouvelé, dans un exil forcé, le destin des anciennes troupes. Venise et ses surprises devaient lui plaire, lui plaisaient jusque dans ses grâces trop chantées.
Il est mort une fin d'été, et s'en est allé, accompagné par quelques amis, vers San Michele. Une de ces gondoles corsetées pour la mort, cygne lent et noir, l'a conduit au cimetière de la même façon qu'il avait rêvé de traverser la vie : sans toucher terre.
Parce qu'il était différent, que je l'avais apprécié pour cette différence, qu'il avait charmé notre temps de ses inventions, c'est à lui d'abord que j'ai voulu rendre visite, cette saison.
Un matin, j'ai demandé au gondolier de traverser la lagune jusqu'à 1'île San Michele. J'ai revu San Giovanni et Paolo, le Coleone sur son cheval, salué les Jésuites au passage, et connu le soleil accablant de midi sur les fondamente nuove. Le cimetière est un lieu très calme, île trop étroite, bien sûr, pour tout ce qui meurt à Venise depuis des siècles, et qui doit n'y faire qu'un séjour mesuré. Mais Diaghilew est encore là, dans le petit enclos réservé aux " orthodoxes ".
Des amis lui ont assuré une sépulture digne, et veilleront sans doute à sa durée. La chaleur accablait ce parc, attiédissait les marbres, et jetait dans l'enclos une inquiétante fécondité. Des fleurs s'épanouissaient et d'autres séchaient sous les croix blanches. Quel sacre mystérieux doit se célébrer devant cette tombe, et quelles figures masquées ne viennent pas la nuit tenir leur concile auprès de celui qui les a tant aimés !
Ce fut une de mes premières démarches vénitiennes durant ce mois de septembre. En règle avec les ombres - rare pays où on peut les rejoindre sans tristesse - j'allai regarder les vivants, comme il faut les voir à Venise, insoucieusement.