Élysée 2022 (50) : Macron II succède à Macron I

Publié le 07 mai 2022 par Sylvainrakotoarison

" Nous défendons l'idée de progrès, scientifique, technique, et intellectuel. Nous défendons la liberté comme condition première de toute évolutin et de chaque avancée, économique comme sociale. (...) La France est porteuse d'un modèle de société et de développement humain qu'il faut accepter de réformer pour faire face aux défis qui nous attendent, pour en conserver l'ambition et la force. " (Extrait de la Charte des valeurs d'Ensemble, majorité présidentielle, novembre 2021).

Ce samedi 7 mai 2022 à 11 heures, le Président de la République Emmanuel Macron procède à sa nouvelle investiture au palais de l'Élysée. Cérémonie plus courte qu'il y a cinq ans en raison de l'absence de la passation des pouvoirs avec son prédécesseur et de la remise du cordon de grand-croix de la Légion d'honneur.
En revanche, on regardera avec attention qui a été invité, même s'il ne faut pas compter sur cette journée pour connaître le nom du prochain Premier Ministre. Le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal avait indiqué le 4 mai 2022 que Jean Castex resterait en fonction jusqu'au 13 mai 2022, date de la fin officielle du premier quinquennat (à minuit).
On peine cependant à comprendre pourquoi la fin du premier quinquennat ne concorde pas avec le début du second quinquennat. Une tentative de réponse peut être la fête de l'Europe, le 9 mai 2022. En effet, il est de tradition que le nouveau chef de l'exécutif, investi ou réinvesti, en France et en Allemagne, fasse son premier déplacement international chez l'autre, en Allemagne et en France. Olaf Scholz avait ainsi réservé sa première visite diplomatique en rendant visite au Président français Emmanuel Macron. Ce dernier va donc rendre la pareille après sa seconde investiture de ce week-end.
Le mauvais procès de venir chercher ses ordres à Berlin est stupide puisque c'est une tradition amicale systématiquement réciproque. Angela Merkel avait fait de même en 2018 lorsqu'elle a été confirmée à la tête de son quatrième gouvernement. Toutefois, Emmanuel Macron a été habile puisqu'en se rendant à Berlin le jour de la fête de l'Europe, le 9 mai 2022, il prononcera un discours pro-européen tant en qualité de Président français nouvellement réélu qu'en celle de Président du Conseil de l'Unions Européenne qu'il est toujours jusqu'au 1 er juillet 2022.
Évacuons aussi le mauvais procès du Président de la République le plus mal élu, ce qui est faux, une assertion fausse martelée par Jean-Luc Mélenchon. Avec 58,5% des voix, Emmanuel Macron ferait bien des envieux, d'abord parmi les candidats ayant échoué (dont Jean-Luc Mélenchon dès le premier tour), ensuite parmi les élus de la Cinquième République qui, à l'exception de Jacques Chirac en 2002, n'ont jamais eu un aussi bon score (pas même le Général De Gaulle !).
Et ne venons pas parler des inscrits, car d'une part, en prenant en compte les abstentionnistes et en les supposant comme des opposants, on fait de la très grossière manipulation politique, et d'autre part, même pris en tant que tel, Georges Pompidou a eu, avec 37,5% des inscrits, moins de pourcentage par rapport aux inscrits qu'Emmanuel Macron et François Hollande, avec 39,1% des inscrits, a eu un pourcentage sensiblement égal. Emmanuel Macron, avec 38,5% des inscrits, n'est donc pas "mal élu". Ou alors, que dire, le 18 juin 2017, de l'élection de Jean-Luc Mélenchon, député de la 4 e circonscription des Bouches-du-Rhône, avec seulement 20,0% des inscrits ? ou encore de Marine Le Pen avec seulement 24,0% des inscrits ?
En revanche, oui, on peut parler de "flottement" au plus haut niveau de l'État. À ma connaissance, aucun Président de la République n'a mis aussi longtemps pour désigner un Premier Ministre et un gouvernement à la suite d'une élection présidentielle. On peut imaginer qu'Emmanuel Macron attendait justement de voir comment les choses évolueraient du côté socialiste et du côté LR pour se faire une idée du prochain quinquennat.
Les nombreuses supputations sur l'identité du prochain Premier Ministre (à ceux déjà cités, il faut rajouter en particulier : Valérie Rabault, Véronique Bédague, Carole Delga, Pascal Canfin, Olivier Dussopt, Christelle Morençais, Nicolas Notat, Catherine Vautrin, Marisol Touraine, etc.) ont laissé un parfum d'indécision assez étonnant pour celui qui se fait régulièrement qualifié de Président "autocrate".
Ce flottement du côté de la majorité présidentielle et une désertion politique du côté de Marine Le Pen (qui est en vacances !) ont laissé pendant dix jours le terrain médiatiquement vide au profit de Jean-Luc Mélenchon qui a réussi à imposer, avec humiliation, la reddition du parti socialiste et à laisser croire qu'une majorité de gauche est possible à l'Assemblée Nationale (alors que le premier tour de l'élection présidentielle du 10 avril 2022 a montré qu'elle était au contraire ultraminoritaire).
Ce flottement a pris fin le jeudi 5 mai 2022 avec la conférence de presse de quatre des grands responsables de la majorité présidentielle en cours de restructuration. Effectivement, le mouvement Ensemble Citoyens créé le 29 novembre 2021 à la Mutualité de Paris est devenu le 5 mai 2022 Ensemble (tout court), comprenant tous les partis et formations ayant soutenu Emmanuel Macron dès le premier tour.
À savoir : LREM (qui a été renommé Renaissance, comme le nom de la liste aux élections européennes de 2019), le MoDem de François Bayrou, Horizons de l'ancien Premier Ministre Édouard Philippe, le parti radical de Laurent Hénart, Agir issu de LR et l'UDI de Franck Riester (avec Claude Malhuret, Fabienne Keller, Laure de La Raudière, Frédéric Lefebvre, Pierre-Yves Bournazel, etc.), et aussi des mouvements issus du parti socialiste, Territoires de progrès mené par Olivier Dussopt (avec Jean-Yves Le Drian, Olivier Véran, Clément Beaune, Émilie Chalas, Florence Parly, Élisabeth Borne, Emmanuelle Wargon, Agnès Pannier-Runacher, Brigitte Bourguignon, Stéphane Travert, Anne-Christine Lang, Francis Chouat, François Pupponi, etc.), En commun regroupé autour de Barbara Pompili (avec Hugues Renson, Jacques Maire, Cécile Rilhac, etc.), et la Fédération progressiste créée très récemment par François Rebsamen (avec Juliette Méadel, Thierry Repentin, Pascal Terrasse, etc.).
La construction de cette majorité présidentielle a été laborieuse, en particulier parce qu'il y aurait eu une "crise" entre Édouard Philippe et Emmanuel Macron en janvier 2022. Le Président de la République aurait refusé la fusion d'Agir dans Horizons, fusion qui aurait été logique (ce sont surtout d'anciens LR ou UDI devenus macronistes) mais dont la puissance aurait présenté un danger pour LREM.

Dans cette conférence, quatre personnalités ont pris la parole : Richard Ferrand, président d'Ensemble, Édouard Philippe et François Bayrou, vice-présidents d'Ensemble, et Stéphane Guérini, secrétaire général d'Ensemble, ce dernier annonçant la transformation de LREM en Renaissance. Ces responsables ont également annoncé que le programme électoral d'Ensemble était le projet présidentiel d'Emmanuel Macron (là encore, c'est logique).
Bien entendu, le plus important était les investitures aux élections législatives. Regardons d'abord l'existant : dans la législature sortante, 346 députés sortants se réclament de la majorité présidentielle (il en faut au moins 289 pour avoir la majorité absolue), dont 267 de LREM, 57 du MoDem et 22 d'Agir. Le principe de cette coalition Ensemble, c'est qu'il n'y ait qu'une seule candidature de la majorité présidentielle dans chaque circonscription, et que les candidats élus députés s'engagent à s'inscrire à l'un des trois groupes de la majorité : LREM, MoDem et Horizons. Cela signifie aussi qu'Agir et le parti radical ne devront pas créer de groupe autonome à l'Assemblée Nationale. Et cela signifie enfin qu'un intergroupe sera créé pour rassembler toute la majorité présidentielle. Il ne faut pas négliger tout l'enjeu d'une cohésion de la majorité présidentielle à l'Assemblée Nationale. Entre 1974 et 1981, ce fut une épine pour Valéry Giscard d'Estaing qui avait confié à Olivier Guichard cette tâche.
Une première liste de 187 noms des candidats investis par Ensemble a été publiée le 5 mai 2022. En tout, LREM se réservera 400 circonscriptions, le MoDem entre 101 et 110, et Horizons 58. Ne seront pas candidats Ensemble notamment : Bruno Le Maire, Éric Dupond-Moretti, Jean-Jacques Bridey, Pacôme Rupin, Pierre Person, Mounir Mahjoubi.
Sont notamment candidats (sont indiquées les circonscriptions seulement pour ceux qui n'étaient pas élus en 2017 ou qui changent de circonscription) : Gérald Darmanin, Richard Ferrand, Jean-Michel Blanquer (4 e circonscription du Loiret), Emmanuelle Wargon (8 e circonscription du Val-de-Marne), Clément Beaune (7 e circonscription de Paris), Élisabeth Borne (6 e circonscription du Calvados), Gabriel Attal, Amélie de Montchalin, Olivier Dussopt, Manuel Valls (dans la 5 e circonscription des Français de l'étranger : Espagne, Portugal, Andorre et Monaco, mais le député sortant LREM Stéphane Vojetta maintient sa candidature), Thierry Benoit (ex-UDI), Éric Woerth (ex-LR), Laurent Saint-Martin, Florian Bachelier, Marie Guevenoux, Paul Midy, directeur général de LREM (5 e circonscription de l'Essonne, celle de Cédric Villani, ex-LREM), Astrid Panosyan (4 e circonscription de Paris), Benjamin Haddad (14 e circonscription de Paris), Thomas Cazenave (1 e circonscription de Gironde), Violette Spillebout (9 e circonscription du Nord), Julien Bargeton (6 e circonscription de Paris), Élise Fajgeles (5 e circonscription de Paris), Mohamad-Lamine Gassama (15 e circonscription de Paris), Yanis Bacha (16 e circonscription de Paris), Kolia Benié (17 e circonscription de Pairs), Pierre-Yves Bournazel, Jeanne Dromard (1 e circonscription de Seine-Saint-Denis), Anaïs Brood (2 e circonscription de Seine-Saint-Denis), Nabil Aït Akkache (5 e circonscription de Seine-Saint-Denis, celle de l'UDI Jean-Christophe Lagarde), Stéphane Testé, Sylvie Charrière, Frédéric Descrozaille, Jean-François Mbaye, Maud Petit, Philippe Hardouin (10 e circonscription de Sainte-Saint-Denis), etc.
De ces 187 candidats déjà investis par Ensemble, 94 sont des femmes et 93 des hommes, 101 députés sortants et 86 nouveaux candidats, dont 43 déjà élus locaux. Les investitures complémentaires seront annoncées d'ici au 10 mai 2022 (le dépôt de candidature doit se faire officiellement entre le 16 et 21 mai 2022). Dans certaines circonscriptions, Ensemble ne devrait pas présenter de candidat pour aider certains députés sortants, comme Damien Abad (LR) et David Habib (PS), écarté de l'accord avec FI dans les Pyrénées-Atlantiques. Ancien député du MoDem, Jean Lassalle fait aussi l'objet d'un traitement particulier de la part de François Bayrou.
Le prochain Premier Ministre aura du mal à devenir le chef de la majorité et le chef de la campagne de la majorité présidentielle pour les élections législatives parce qu'il aura été complètement absent de ce long et minutieux processus sur les investitures. La semaine qui vient a des chances d'être cruciale pour les cinq prochaines années.
Aussi sur le blog.
Sylvain Rakotoarison (06 mai 2022)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Élysée 2022 (50) : Macron II succède à Macron I.
Élysée 2022 (49) : vers une quatrième cohabitation ?
Élysée 2022 (48) : qui sera le prochain Premier Ministre d'Emmanuel Macron ?
Élysée 2022 (47) : la victoire historique d'Emmanuel Macron.
Emmanuel Macron réélu Président de la République le 24 avril 2022.
Discours du Président Macron le 24 avril 2022 au Champ-de-Mars à Paris (texte intégral et vidéo).
Interview d'Emmanuel Macron le 22 avril 2022 sur France Inter.
Résultats du second tour de l'élection présidentielle du 24 avril 2022 (Ministère de l'Intérieur).

https://rakotoarison.over-blog.com/article-sr-20220505-macron.html
https://www.agoravox.fr/actualites/politique/article/elysee-2022-50-macron-ii-succede-a-241385
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