Quatrième de couverture :
Il était midi et quart quand Maigret franchit la voûte toujours fraîche, le portail flanqué de deux agents en uniforme qui se tenaient tout contre le mur pour jouir d’un peu d’ombre. Il les salua de la main, resta un moment immobile, indécis, à regarder vers la cour, puis vers la place Dauphine, puis vers la cour à nouveau.
Dans le couloir, là-haut, ensuite dans l’escalier poussiéreux, il s’était arrêté deux ou trois fois, faisant mine de rallumer sa pipe, avec l’espoir de voir surgir un de ses collègues ou de ses inspecteurs. Il était rare que l’escalier soit désert à cette heure, mais cette année, le 12 juin, la P.J. avait déjà son atmosphère de vacances.
Pour ce rendez-vous autour de Simenon, j’avais sous la main ce court roman, offert à l’achat de deux livres de poche il y a deux ou trois ans. Je n’ai pas l’impression que ce soit le Maigret le plus palpitant mais je m’en suis contentée.
Le patron de quatre cabarets de Montmartre a été assassiné : Emile Boulay a été retrouvé étranglé, déposé sur le trottoir devant une de ses boîtes de nuit. L’autopsie révélera qu’il a été tué quelques jours avant. C’était un homme sans histoire, un mari et un père de famille tranquille, un patron correct, aux habitudes précises, qui menait ses affaires avec bon sens. Maigret passe du temps à reconstituer l’emploi du temps de la victime le jour de sa mort et s’intéresse à sa famille, à ses proches, à ses collaborateurs, à son avocat… Rien de suspect, sauf un retrait à la banque d’une somme assez importante et des coups de téléphone sans succès. La mort de Boulay a-t-elle quelque chose à voir avec l’exécution d’un racketteur quelques semaines auparavant ? Maigret va résoudre l’enquête à force de tâtonnements, en épluchant d’anciennes affaires, en grommelant des bouts de phrases presque incantatoires qui aideront son cerveau à faire toute la lumière sur l’affaire. C’est la découverte du coupable qui déclenchera cette colère du titre.
On retrouve donc ici le fonctionnement classique du commissaire Maigret, de ses enquêtes avec les inspecteurs de son équipe, Lucas, Torrence et Lapointe, ses habitudes bien ancrées de déguster une bière bien fraîche ou un petit blanc dans une brasserie du quartier, de passer le week-end à pêcher en banlieue sous le regard de madame Maigret. Ici, on peut s’étonner du comportement du commissaire face au coupable à la toute fin de l’enquête : sans rien vouloir dévoiler, c’est comme si le divisionnaire décidait déjà de la manière dont justice doit (ou non) se faire. Il a vraiment beaucoup de pouvoir, ce commissaire…
Georges SIMENON, La colère de Maigret, Le Livre de poche, 2019 (première parution : 1963)
Le Mois belge 2022 – catégorie Noir Corbeau (un polar) Rendez-vous autour de Simenon ce 29 avril