Albert t'Serstevens publia son roman Taïa en 1929 aux éditions Albin Michel. Gabriel Marcel revint sur ce roman dans un article paru dans Sept : l'hebdomadaire du temps présent en avril 1936.
[...] Se fondant à la fois, semble-t-il, sur des confidences dont il aurait été le dépositaire et sur certains renseignements parus dans la presse, M. t' Serstevens n'a pas craint de nous présenter une vision entièrement nouvelle et du drame de Mayerling et de l' attentat de Sarajevo, ces deux grandes tragédies mystérieuses étant liées à l'en croire par une connexion secrète. On admettait généralement jusqu'à présent que l'archiduc Rodolphe et la comtesse Marie Vetsera s'étaient tués, cherchant dans un Liebestod wagnérien le refuge suprême contre les déceptions et les trahisons de la vie. D'après M. t'Serstevens, ils auraient en réalité été assassinés par François-Ferdinand, peut-être avec la complice de 1'empereur ; il savait en effet l' archiduc Rodolphe animé de sentiments à ses yeux beaucoup trop favorables aux Slaves de la monarchie, et disposé à l'établissement d'un régime politique infiniment plus libéral ; et c'est pour empêcher la réalisation de ces desseins qu'on n' aurait pas hésité à le supprimer. Mais de sa liaison avec Marie Vetsera une enfant serait née, qui plus tard, parvenue à l'âge adulte, aurait décidé de venger ses parents et aurait été l'âme du complot de Sarajevo. Je me garderai de me prononcer sur cette interprétation que son caractère ultra-romanesque ne permet pas, malgré sa totale invraisemblance, d'exclure. Une femme qui se disait la fille de l' archiduc Rodolphe et de Marie Vetsera, et fut reçue en cette qualité dans les milieux les plus aristocratiques, s'est suicidée à Londres en 1919. Était-ce ou non une aventurière ? Je l'ignore absolument. Mais il me paraît à vrai dire douteux qu'un auteur dramatique soit bien inspiré en choisissant comme donnée une aventure comme celle-ci qui est liée aux événements les plus tragiques et les plus centraux de l'histoire contemporaine, mais présente en elle-même un caractère problématique irritant pour l'esprit. Il n'est pas possible que le spectateur ne soit pas continuellement obsédé par la question : est-ce vrai ou faux ? est-ce exact ou non ? Quelles raisons a l' auteur d'adhérer à cette interprétation ? - et ces questions qui déjà, je le notais à propos des Conquérants, viennent en travers de la réalité propre au roman et la sapent par en dessous, sont plus incompatibles encore avec l'attitude de docilité et de participation qui doit être celle d'un spectateur.
[...] Albert t'Serstevens écrivait un roman et son avant-propos donne à supposer qu'il a connu directement une personne liée de fort près à la princesse, et qui lui a fait des confidences intimes. Il était dans son droit strict de romancier en prenant pour " centre d'intérêt " la tendre relation qui unit la fille de l'Archiduc à ce Français, à cet officier de marine mort à Corfou en 1925. [...]
Texte de présentation ( quatrième de couverture): Suicide, meurtre ou complot ? Depuis plus de 130 années, le drame de Mayerling fascine et enflamme les imaginations, et a fait couler beaucoup d'encre. C'est un peu de cette encre que nous avons orpaillée ici dans les fleuves de la mémoire : des textes pour la plupart oubliés qui présentent différentes interprétations d'une tragédie sur laquelle, malgré les annonces répétées d'une vérité historique définitive, continue de planer le doute.Comment s'est constituée la légende de Mayerling? Les points de vue et les arguments s'affrontent dans ces récits qui relèvent de différents genres littéraires : souvenirs de princesses appartenant au premier cercle impérial, dialogue politique, roman historique, roman d'espionnage, articles de presse, tous ces textes ont contribué à la constitution d'une des grandes énigmes de l'his toire.
Le recueil réunit des récits publiés entre 1889 et 1932 sur le drame de Mayerling, dont voici les dates et les auteurs :
Le dernier récit, celui de la princesse Fugger, amie de la soeur de Mary Vetsera, est pour la première fois publié en traduction française. Il n'était jusqu'ici accessible qu'en allemand et en traduction anglaise.