Un autre héritage à réformer

Publié le 24 avril 2022 par Patriceb @cestpasmonidee
Quand les institutions financières s'engagent (sincèrement) dans une mutation « digitale », le premier obstacle qu'il leur faut franchir est la modernisation de leurs systèmes informatiques (pré)historiques. Mais, comme le relate le directeur technique de NAB, un autre héritage, presque aussi ancien et plus pernicieux, doit également être évacué.
C'est une réalité dans la plupart des grands groupes, à laquelle personne ne prend vraiment garde et qui, pourtant, constitue un facteur d'immobilisme et de conservatisme probablement plus puissant encore que le recours aux mêmes ordinateurs qu'il y a 50 ans (les « mainframes »), avec leur cohorte de pratiques dépassées (dont le langage de programmation Cobol) : l'externalisation, engagée au début des années 90 pour des raisons d'efficacité opérationnelle et qui domine plus que jamais dans les DSI.
Ainsi, lorsque les responsables de NAB ont commencé à réfléchir à sa transformation, ses effectifs technologiques ne comprenaient que 30% de collaborateurs internalisés, le reste étant comblé par des partenaires divers et variés. Si ce taux semble disproportionné, il reflète une situation généralisée. Les entreprises qui fournissent l'essentiel des compétences, souvent via des contrats mirobolants, disposent de la sorte d'un pouvoir exorbitant, dont elles usent sans vergogne pour maintenir le statu quo.
Concrètement, Steve Day explique que, sous cette pression invisible, les modes de fonctionnement en vigueur dans la banque australienne étaient restés figés à ce qu'ils étaient un quart de siècle auparavant. Les velléités d'adoption de méthodes agiles, par exemple, n'avaient aucune chance d'aboutir quand le rôle des salariés se réduisaient à des tâches de pilotage et de suivi, les véritables spécialistes exerçant hors de l'organisation, encadrés par des cahiers des charges obligatoirement rigides.

Forte de ce constat, NAB a choisi de renverser totalement son approche à partir de 2018. Désormais, 69% de ses équipes informatiques sont internes et ses efforts de recrutement se poursuivent à un rythme soutenu (1 500 embauches sont prévues cette année). Durant la période de transition, elle a en outre mis en place des guildes thématiques (sur l'infonuagique, les données…) afin de remettre à niveau ses milliers d'employés qui avaient perdu de vue les enjeux concrets de la technologie.
La démarche, relevant d'une révolution culturelle, produit désormais des résultats visibles, autant dans le déploiement d'une vraie stratégie « digitale » que dans l'optimisation de ses opérations au quotidien. Dans ce dernier registre, l'établissement évalue notamment à 30% ses gains de productivité et observe une réduction significative des incidents de production, démontrant l'effet catalytique de sa politique, dont une des clés est la migration de 60% de ses applications sur le cloud public.
À l'origine du parcours de NAB, émergeait la prise de conscience des nouvelles attentes des usagers de la banque, inspirées par leur expérience avec les plates-formes des géants du web. Il paraissait impossible d'y répondre avec les modèles hérités du siècle dernier. En particulier, il devenait impératif de se ré-approprier les pièces maîtresses (technologiques) de la construction de cette cible, non seulement pour gagner en flexibilité et en réactivité mais aussi parce que l'exigence de proximité avec le client l'impose.