"On reconnait la valeur des fesses quand on veut s'asseoir"Arsène Moses
"Il faut choisir entre le préférable et le détestable"Raymond Aron
"Dans cette matinée je jardin est brillant
Les arbres sont tordus ils sont tout ce que j'ai
Dans cette matinée les arbres sont tordus
Et leur feuillage est roux, je parle en fouBientôt le soir viendra le jardin sera là
Sans personne dedans moi je sera couché
Le jardin sera là moi je serai couché
Et je dormirai saoul, je parle en fouLes années ont passé je ne sais plus dans quel ordre
Je n'ai pas trop parlé il y avait tant à dire
Les années ont passé, je n'ai pas trop parlé
Je n'avais pas le goût, je parle en fouJ'ai aimé une femme qui passait par ici
Qui portait une robe et qui portait un sac
Qui passait par ici, et qui portait ce sacJ'ai embrassé sa joue, je parle en fouJe n'ai eu qu'un pays, et j'ai eu quatre frères
Ils sont là quelque part chacun est dans sa ville
Je n'ai eu qu'un pays, chacun est dans sa ville
Chacun est dans son trou, je parle en fouUne odeur vient à moi, et je peux en pleurer
Le gasoil dans la pluie qui baise la lumière
Une odeur vient à moi qui baise la lumière
Où va celui bout, je parle en fouÇa hurle dans la cour où?? une guerre
Le vent pique mon cou, je parle en fou
Ça hurle dans la cour, le vent pique mon cou
Les enfants ont leurs poux, je parle en fou"Bertrand Belin
"Dieu est grand ! répondit le mendiant. Mais qu’importe les affaires. Il y a tant de joie dans l’existence. Tu ne connais pas l’histoire des élections ?
- Non, je ne lis jamais les journaux.
- Celle-là n’était pas dans les journaux. C’est quelqu’un qui me l’a racontée.
- Alors je t’écoute.
- Eh bien ! Cela s’est passé il y a quelque temps dans un petit village de Basse-Égypte, pendant les élections pour le maire. Quand les employés du gouvernement ouvrirent les ruines, ils s’aperçurent que la majorité des bulletins de vote portaient le nom de Barghout. Les employés du gouvernement ne connaissaient pas ce nom-là ; il n’était sur la liste d’aucun parti. Affolés, ils allèrent aux renseignements et furent sidérés d’apprendre que Barghout était le nom d’un âne très estimé pour sa sagesse dans tout le village. Presque tous les habitants avaient voté pour lui. Qu’est-ce que tu penses de cette histoire ?
Gohar respira avec allégresse ; il était ravi. « Ils sont ignorants et illettrés, pensa-t-il, pourtant ils viennent de faire la chose la plus intelligente que le monde ait connue depuis qu’il y a des élections. » Le comportement de ces paysans perdus au fond de leur village était le témoignage réconfortant sans lequel la vie deviendrait impossible. Gohar était anéanti d’admiration. La nature de sa joie était si pénétrante qu’il resta un moment épouvanté à regarder le mendiant. Un milan vint se poser sur la chaussée, à quelques pas d’eux, fureta du bec à la recherche de quelque pourriture, ne trouva rien et reprit son vol.
- Admirable ! s’exclama Gohar. Et comment se termine l’histoire ?
- Certainement il ne fut pas élu. Tu penses bien, un âne à quatre pattes ! Ce qu’ils voulaient, en haut lieu, c’était un âne à deux pattes."Albert Cossery extrait de "Mendiants et orgueilleux"