Je me rappelle – instant de grâce :
Quand tu parus à mes côtés,
Je fus saisi, – vision fugace
Du pur génie de la beauté.
Dans la langueur désespérante,
Dans le fracas des vanités,
Longtemps vibra ta voix pressante,
Longtemps, tes traits m’ont habité.
Les ans passèrent. Dans l’orage
Mes rêves furent emportés,
Et j’ai perdu ta douce image,
Ta voix pressante m’a quitté.
Claustrés au fond d’un lourd silence,
Paisiblement passaient mes jours,
Sans poésie, sans transcendance,
Sans vie, sans larmes, sans amour.
Mais l’âme a retrouvé la grâce,
Tu reparais à mes côtés,
Divinité, vision fugace
Du pur génie de la beauté.
Et, de nouveau, la renaissance,
Et la lumière est de retour –
La poésie, la transcendance,
La vie, les larmes et l’amour.
1825
***
Alexandre Pouchkine (1799-1837) – Le Soleil d’Alexandre (Actes Sud, 2011) – Traduit du russe par André Markowicz.