En réaction au billet intitulé « La Politique est aussi une affaire d’oreilles », le Fer Railleur a cette remarque pertinente qui résume le drame du PS :
« Il faut un idéal capable de réveiller l’espoir collectif. Et il faut que cet idéal s’incarne: symboles, personnes… »
Or, cette incarnation fait cruellement défaut depuis bien longtemps. Dans le parti, il y a une kyrielle de petits semblables, mais point de grand Autre, c’est-à-dire de leader ou de chef qui incarne symboliquement l’opposition à Nicolas Sarkozy.
La place est vide depuis la réélection de François Mitterrand en 1988. Et depuis 20 ans, c’est le bordel.
A Reims, il importe donc que cette place soit attribuée à quelqu’un. Le pire serait en effet d’aboutir à une synthèse foireuse dans le seul but de permettre aux petits semblables de continuer à faire leur petit cinéma et à se tailler mutuellement des croupières.
Ségolène Royal a prévenu : «Il vaut mieux une bonne querelle qu’une mauvaise synthèse.» C’est d’ailleurs la seule qui, parmi les prétendants à la direction du PS, tienne ce discours lucide, hors de tout arrangement stratégique visant à construire en interne des alliances de circonstances qui, sitôt le Congrès passé, se déliteront pour laisser à nouveau la place au cirque dont nous pâtissons.
Sans leader bien identifié sachant allier respect de la démocratie interne avec l’autorité nécessaire pour faire respecter la ligne politique décidée, la masse militante ne tardera pas à se décomposer dans une résignation généralisée dont sauront profiter les gardes rapprochées des petits semblables, tandis que, de leur côté, les citoyens lassés s’emmureront dans l’indifférence, ainsi que Maxime Pisano l’a observé sur le terrain :
« Sur le terrain, en action, en porte-à-porte, je vois des citoyens blasés, fatigués, et cette réappropriation de la politique que j’avais cru voir en 2005 et en 2007 laisse place non à une défiance, mais à une indifférence. »
Le grand Autre, ce n’est pas l’homme providentiel, le deus ex machina, celui qui pense et agit à la place de tous.
C’est celui qui, par sa fonction de leader, fédère autour de son nom toute la masse militante, pour incarner auprès des Français la promesse d’une alternative à l’Etat UMP et à la politique sarkoziste.
Autrement dit, le grand Autre est celui qui a pour fonction de réunir toutes les bonnes volontés militantes qui, sans lui, se disperseraient dans de stériles querelles d’écuries présidentielles. C’est celui qui portera l’alternative politique aux élections présidentielles de 2012.
Rappelons à cet égard les propos de Robert Navarro, premier fédéral de l’Hérault, tenus à Mende, le 25 mai dernier, lors du Comité régional du Parti socialiste :
« Vous croyez que si Delanoë, Strauss-Kahn, Fabius ou Jospin avaient fait 47 % en 2007, en réunissant 17 millions de voix, on se poserait la question de savoir qui doit être candidat en 2012 ? »