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La loi chez Hayek : un outil rationnel de l’ordre spontané

Publié le 29 mars 2022 par Magazinenagg

 Par Raphaël Roger

Dans un précédent article a été abordée la vision du juge selon Hayek, notamment qu’il conçoit le juge comme étant au service de l’ordre spontané, se devant de corriger les erreurs et de résoudre les conflits qui apparaîtraient en son sein.

Pour autant, bien que le juge ait pour Hayek une place importante, le législateur ne voit pas son rôle réduit à peau de chagrin. Au contraire, il se voit confier d’importantes missions pour garantir le bon fonctionnement de l’ordre spontané. Pour traiter cette partie, on se référera à deux livres de Hayek, Droit, législation et liberté et L’idéal politique de l’État de droit.

La loi selon Hayek

Selon Hayek, si faire le droit est un processus continu où chaque action génère des conséquences imprévues et produisant aussi une évolution que personne ne veut comme telle, l’instrument principal du changement délibéré dans la société moderne est la législation (p.175). Il arrive souvent que le juge, et plus généralement le juriste, neutralise l’effet d’une loi voire ne l’applique pas car il considère qu’elle aurait des effets trop négatifs ou bien qu’elle risquerait de rompre avec l’harmonie de l’ordre juridique existant. Dans ce cas, le législateur a pour mission de dépasser ces blocages par une loi. Il a un rôle de premier plan dans un ordre spontané.

En effet, il peut arriver que la jurisprudence soit confuse et qu’elle crée par elle-même une certaine forme d’incertitude. Dans ce cas, le législateur doit rectifier le droit issu de la pratique. L’intervention du juge sera alors nécessaire pour permettre cette correction. Sans cette correction opérée par le législateur, l’ordre spontané se verrait fortement affaibli, car la certitude permettant l’anticipation des individus, disparaîtrait (p.219). La législation est inhérente à tout ordre juridique étatique, où l’État exerce un monopole dans la production normative. Dès lors, même dans un ordre spontané, il n’est pas possible de se dispenser de la législation (p.220).

Si on laisse la jurisprudence opérer par elle-même, elle pourrait se corriger, s’améliorer sur le long terme. Cependant, à court terme, la raison des juges peut se montrer défaillante. C’est dans ces cas-là que l’intervention du législateur est nécessaire. Hayek va en effet dresser une liste de situations pour lesquelles l’intervention du législateur est nécessaire à la bonne conduite de l’ordre spontané.

Selon Hayek, il existe trois situations dans lesquelles le législateur devra intervenir (p.220) :

La société demande un changement rapide 

En effet, la loi permet une adaptation rapide du droit, ce que ne peut pas faire la jurisprudence.

La société demande un changement en profondeur du droit 

En effet, la législation peut changer en profondeur le droit du fait de son intervention rapide et directe. A contrario, la jurisprudence est l’œuvre du temps long, de la recherche de la rationalité et de la cohérence, visant une harmonie des normes juridiques. Or, la jurisprudence ne peut modifier en profondeur le droit, elle ne peut le changer que graduellement lorsqu’une règle a été solidement établie, mais elle ne pourrait, sous peine de commettre une profonde injustice, changer en profondeur la règle de droit avec comme conséquence une perturbation de l’ordre spontané.

Le droit est confus

Ici aussi, l’intervention du législateur est souhaitée pour assurer une meilleure lisibilité du droit toujours dans la perspective d’accroître l’anticipation des individus dans un ordre spontané. La loi doit être claire et stable.

Quelles qualités la loi doit-elle avoir ?

Pour répondre à cette question, on pourra s’appuyer sur L’idéal politique de l’État de droit.

Selon Hayek, les lois doivent être générales, égales et certaines (p.81). Il s’agira de voir ces trois points séparément.

La qualité générale de la loi est sa qualité première

En effet, par générale, il y a l’idée que la loi, émanant de l’autorité législative, ne doit s’occuper que de cas généraux et « ne doit pas se référer à des cas particuliers ». En ce sens ici, « la règle doit prescrire un comportement, su de tous, aux gens à qui elle s’applique, elle ne doit se référer qu’aux circonstances qui peuvent être présumées être connues par ces personnes et à aucune autre circonstance ».

Le principe de l’égalité devant la loi

C’est selon Hayek, la qualité la plus importante d’une loi (p.83). Elle doit être la même pour tous, avoir une application uniforme et ne pas tenir compte, à première vue, des différences. Hayek admet cependant que la loi puisse établir des distinctions, mais elle ne doit pas être « dirigée au bénéfice de certaines personnes en particulier »(p.84).

La certitude de la loi

En effet, selon Hayek, la certitude de la loi permet le fonctionnement harmonieux des sociétés et du système économique. Quand la loi est stable, elle permet à la société entière d’avoir une ligne directrice pour l’accomplissement de ses actions.


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