En couverture du livre de Sophie Nauleau, une danseuse du Tanztheater Wuppertal Pina Bausch, bras levés, mains ouvertes doigts souples, visage aux yeux fermés et à la bouche ouverte dont les cheveux s’éloignent pour encercler les bras, robe blanche tenant en haut par des bretelles et tournant en bas dans un large mouvement de plis enserrant les jambes sans les enfermer, jaillissement de l’eau à la frappe du pied, une eau qui tombe en pluie et couvre toute la surface du sol, la danseuse est une flamme, un élan, une jouissance, un instant suspendu. L’instant, l’éphémère, qui pourrait s’effacer à peine aperçu mais que la photo fige et à quoi elle donne une forme de durabilité.
C’est une autre photo que l’on voit sur l’affiche du Printemps des Poètes, de la même Compagnie de danse, prise par le même photographe : une femme traverse le plateau portant sur son dos, non pas une croix de supplicié, mais un arbre déjà vert qu’elle pourrait aller planter un peu plus loin, les racines étant enveloppées pour les protéger d’une éventuelle sécheresse ; elle marche à son rythme, au rythme du printemps, une saison qui, dans cette région du monde où nous vivons, sort de l’hiver et pousse bourgeons et fleurs redessinant le paysage jour après jour jusqu’à la plénitude de l’été.
Et les textes de Sophie Nauleau ont cette révélation à faire : l’éphémère dure longtemps, qu’il s’agisse de l’insecte (féminin) ou de l’adjectif. Il faudra y revenir.