Il est des mythes fondateurs, primordiaux, telle la geste de Chronos, celle de Romulus et Rémus, ou encore le récit gallois des Quatre branches du Mabinogi, porteurs d'une vision d'ensemble énoncée comme telle, et des mythes secondaires, héroïques, dont l'objet est le plus souvent de rendre sensible à l'individu le type de relation au monde ou la place de chacun en société. C'est à cette seconde catégorie qu'appartient le mythe de Tristan et Iseult, hélas trop peu connu du public français et européen en général. Primauté du groupe et de l'intérêt général sur l'individu, sens du devoir et du sacrifice, goût pour le dépassement, l'absolu, le passionnel : voilà quelques unes des valeurs que met en relief la légende des amoureux insulaires et de leurs compagnons.
S'il existe de nombreuses éditions des récits médiévaux (dont les textes originaux sont cependant difficiles d'accès, car tous fragmentaires) et de l'oeuvre lyrique de Richard Wagner (1865), il n'y avait pas eu, depuis les années 1970, d'adaptation cinématographique de ce beau mythe du monde celtique occidental ; une nouvelle version a été conçue par l'Américain Kevin Reynolds (2006). Le film que propose ce dernier est une relecture du mythe, adpaté aux exigences du cinéma grand public contemporain, mais il en conserve les éléments principaux, et permettra à ceux qui aiment le 7ème art de se plonger dans un univers peu habituel, ou les héros ne recherchent pas la gloire, mais l'honneur et l'intérêt des leurs. Dans tout ce que produit Hollywood, ce n'est sans doute pas le pire.
Arthur L.