Encore faucher des vies au nom d’abstractions : nation, pays, frontières… L’acharnement du belliqueux Poutine comme du résistant Zelensky va faire s’affoler le compteur cadavérique. Les obstinations réciproques retardent à coups de ruines tombales l’inéluctable survenue des négociations.
A l’inverse de la gestion mondiale de la Covid-19 qui nous avait démontré que la préservation des vies passait enfin devant les contingences bassement économiques, la guerre entamée impose l’infâme et multiséculaire modèle du territoire avant la vie : devoir attendre un, deux, trois millions de morts pour, à la fin, finir autour d’une table. Le coût des vies payées n’est-il pas outrageusement disproportionné par rapport aux gains obtenus dans ce combat sans merci ?
Le coup d’éclat salvateur d’un Zelensky, ayant appris des morbides leçons de l’histoire, consisterait à oser déclarer la reddition d’un pays qui, au contraire de ce que développent de fumeux experts, ne peut militairement pas vaincre l’armée russe. Le tragique de l’histoire c’est l’entêtement à faire empirer la situation en remettant à plus tard l’issue négociée.
A l’obscène pouvoir d’un Poutine lançant sa machine de guerre répond l’héroïque jusqu’au boutisme du Président ukrainien qui shakespearise les perspectives : la dignité d’une nation par la mort de ses habitants. L’OTAN a clamé dès le premier jour de guerre qu’elle n’interviendra pas ; l’Ukraine doit se montrer plus civilisée que l’autocrate qui l’agresse. Une reddition unilatérale aurait une salutaire saveur alors que tout n’est qu’escalade guerrière avec sa floppée de charognes innocentes. Prendre le contrepied de la tentation du talion, faisant ainsi taire les armes, est le seul risque louable à tenter pour échapper au sombre crescendo.
Tant à perdre dans l’obstination que cela vaut bien une volte-face. Songer à tous ces massacres inutiles, à ces ravages insensés, aux haines démultipliées qui servent les semeurs de mort ; oser tout de suite le courage de la reddition, plutôt que d’être submergé par les corps de ceux qui n’aspirent qu’à une tranquille existence, loin des fracas géopolitiques, et reconnaître la vanité des voies guerrières.
L’humanité est-elle vraiment en âge de dépasser cette sempiternelle mécanique de la surenchère sacrificielle ? Ecouter les larmes de son peuple plutôt que les armes de l’ennemi.