Natyot écrit, dit, chante parfois. Elle a publié, à la Boucherie littéraire, un recueil de textes intitulé ils / défaut de langue. Ce titre mérite une explication : c’est ce pronom personnel, « ils », un pluriel qui n’est pas neutre et qui tantôt est masculin, tantôt tout à la fois masculin et féminin. C’est un peu comme un « nous » dont nous voudrions ne pas être et le tenir à distance. Cet « ils » est un défaut de langue, un pronom qui arrive par défaut. Et l’ensemble de ces textes nous fait nombreux dans des situations où nous sommes ensemble, pas forcément solidaires, pas obligatoirement égaux, et pas tous semblables. Le métro, regardez comme « ils » sont dans ces transports en commun. Les guichets d’une administration, voyez comme « ils » y arrivent, avec chacun.e sa convocation (il faut même respecter la limite de confidentialité qu’ « ils » ne voient pas). Les visiteurs du chantier de l’immeuble où sera leur appartement plus tard. Les invité.e.s au vernissage d’une exposition, celles et ceux qui fréquentent la piscine, etc. Tous, toutes peuvent s’y reconnaître. Sous ce pronom par défaut, cherchant un anonymat. Et pas la peine d’être nombreux : on commence à être « ils » à deux, et toutes, tous peuvent en faire l’expérience.
ils se connectent
ils regardent des photos
les vacances des uns
les exploits des autres
ils parcourent
et ils aiment
ils passent une heure à aimer la vie des autres
ils la commentent
ils font part de leur humeur
et ils attendent qu’on les aime aussi
(…)