film d' Allan Dwan (1916)
avec Douglas Fairbanks
Fondation Jérôme Seydoux - PathéParis, Ile de France, France
Mardi 4 janvier 2022, 19h
Bienvenue à la 62e abonnée de ce blog. Que les Dieux et les Muses la protègent!
Louis Sclavis: clarinettes, harmonica, flûte
Benjamin Moussay: piano, clavier électrique
" The Half Breed " est un film de 1916 si moderne qu'il fut un échec à son époque et nous parle encore aujourd'hui.
Douglas Fairbanks y joue un métis de père Blanc et de mère Cherokee, abandonné à la naissance (son père ne le reconnaît pas et sa mère se suicide), recueilli par un Blanc, naturaliste âgé qui vit dans la forêt de Californie et élève son fils adoptif comme un Indien tout en lui apprenant à lire, écrire et compter comme un Blanc.
A la mort de son père, chassé par les Blancs, il entame une vie d'errance, rencontre deux femmes blanches qu'il séduit toutes deux, des femmes aux personnalités riches et complexes, une blonde vaporeuse bien plus maligne qu'elle ne le fait croire à ses admirateurs, fille de pasteur et une brune qui ne se laisse pas faire (elle poignarde le sheriff (père biologique du héros) et le charlatan, vendeur de potion magique, dont elle est l'associée.
Un Blanc idiot et alcoolique vaut toujours plus qu'un Indien intelligent et sobre. Un pasteur Blanc qui fait un sermon sur la tolérance refuse de venir en aide à une femme en détresse qui n'est pas de son église et en chasse le métis. Les Indiens eux sont ravagés par l'alcool, problème toujours d'actualité en 2022, la drogue s'y étant ajoutée. Dans le saloon, Blancs, Asiatiques et Noirs jouent aux cartes et boivent ensemble mais les Indiens sont en dessous de tous. Les sequoias géants de Californie sont magnifiquement filmés. L'incendie final est réel. Il n'y a pas de happy end. Ceci, joué et écrit dans un film de 1916! Pas étonnant qu'il ait échoué à l'époque d'autant plus que Douglas Fairbanks joue sobrement, sans ses cascades et sourires habituels. J ean Paul Belmondo, son disciple français, eut le même problème lorsqu'il joua " Le voleur " de Louis Malle puis " L'affaire Stavisky " d'Alain Resnais.
L'histoire de la reconstitution du film, fruit d'une coopération franco-américaine, est racontée dans la vidéo ci-dessous enregistrée au SFSFF: San Francisco Silent Film Festival. Réservée aux cinéphiles anglophones.
Mais, à San Francisco, les spectateurs n'ont pas eu la chance de voir le film accompagné en direct par Benjamin Moussay & Louis Sclavis. Ce grand délice était réservé à Paris et aux spectateurs de la séance lors du festival Douglas Fairbanks à la Fondation Jérôme Seydoux - Pathé le mardi 4 janvier 2022 à 19h. La musique est composée par Louis Sclavis. Mes notes prises dans l'obscurité de la salle de cinéma et en regardant le film sont absolument illisibles. Voici ce que j'ai retenu.
La musique souligne l'action. Elle ne la surligne jamais. Quand le héros a le Blues, l'harmonica vient ajouter sa note bleue au piano. Quand les chevaux galopent, piano et clarinette basse filent comme le vent. Quand l'ambiance est plus légère, c'est au tour de la clarinette. Pour ajouter de l'étrangeté, il y a le clavier électrique de Benjamin ou la flûte de Louis, taillée dans une corne de chèvre corse. Après le ciné concert, Louis Sclavis m'a expliqué qu'il achète plein de bidules dont il se sert quand il a l'occasion. Il a acheté cette flûte chez un artisan de Piana, village dont les calanques sont classées au Patrimoine mondial de l'humanité par l'UNESCO. Ce ciné concert était pour lui l'occasion d'en faire usage.
Madame L et moi sommes restés stupéfaits par la modernité et la puissance du film, la beauté et la finesse de son accompagnement musical par Louis Sclavis & Benjamin Moussay. Merci à la Fondation Jérôme Seydoux - Pathé de l'avoir organisé. A refaire.