Médéric Collignon par Juan Carlos HERNANDEZ
Paris, Ile de France, France
Samedi 22 janvier 2022, 20h30
Médéric Collignon: cornet
Pierrick Pédron: saxophone alto
Yvan Robilliard: piano, Fender Rhodes
Emmanuel Harang: contrebasse
Nicolas Fox: batterie
Lectrices distinguées, lecteurs raffinés, ce blog vous a déjà chanté les louanges de Médéric Collignon et son Jus de Bocse jouant Miles Davis. C'était lors d'un concert à Paris au le samedi 2 octobre 2021. 3 mois après, Médéric Collignon est de retour au Sunside pour jouer Miles Davis avec le même pianiste et claviériste mais il a changé de contrebassiste et de batteur et a inclus dans le groupe le Breton Pierrick Pédron, saxophoniste alto très favorablement connu de nos services. J'y retourne aussi.
Miles Davis (1926-1991) était très fort pour diriger un groupe mais aussi pour s'approprier les oeuvres des autres. Médéric le surnomme le " pompositeur " car, comme les Shadoks, Miles Davis pompait.
" Fran Dance " ouvre le concert. Cf extrait audio au dessus de cet article. Ce morceau a été composé en hommage à la danseuse Frances Taylor (1929-2018), épouse de Miles Davis, la première danseuse noire invitée à danser avec le corps de ballet de l'Opéra de Paris. Il est donc possible qu'il l'ait composé. Début assez classique et très élégant. Pierrick Pédron sonne comme Julian Canonball Adderley le sax alto de " Kind of Blue ", l'album le plus vendu de l'histoire du Jazz (Miles Davis, 1959). Médéric se met à chanter ajoutant son grain de folie. Solo de sax alto dans la veine Hard Bop. Assis, Médéric ajoute un son de trompette par en dessous. Je ne le vois pas mais je l'entends. Solo de piano délicatement ponctué par la contrebasse et le batteur aux baguettes. Les souffleurs y ajoutent une légère brise. Yvan Robilliard lance et relance le Blues comme Wynton Kelly. Le contrebassiste se prend pour Mr P.C, Paul Chambers. Pas aussi majestueux cependant.
" Eighty One " (Miles Davis + Ron Carter). De la fin des années 50 nous sommes passés à la fin des années 60. Transition vers le Jazz Rock. La rythmique groove terrible comme il faut. Ah ce chant des cuivres avec ces lignes qui s'étirent puis se brisent et repartent. La surprise, fondement de l'art du Jazz. La rythmique tourne solidement alors que le cornet se déploie sinueux. Je bats la mesure de la jambe droite. Ron Carter est le contrebassiste le plus enregistré de l'histoire du Jazz. Sa pulsation est toujours aussi efficace même quand ce n'est pas lui qui la joue. Au tour du sax alto ponctué par les interventions de Médo. Ca sonne, sapristi! La rythmique monte la pression. Pierrick est lancé, chauffé. Médéric est parti dans le numéro vocal dont il a le secret. Avec scat, gargarismes, borborygmes, claquements de joues et de langues. La créativité dans le respect des Anciens, c'est beau. " La tradition, ce n'est pas la vénération des cendres mais la préservation du feu " (Gustav Malher). Ca balance toujours aussi bien.
" Joshua " (Victor Feldman). Victor Feldman, le plus grand Jazzman produit par l'Angleterre, pianiste de studio de Miles Davis de 1961 à 1963. Il refusa de le suivre en tournée, Hollywood le payant bien mieux sans avoir à bouger. Contrebasse et batterie installent la tension. Pendant ce temps, le cornet ondule en parallèle de la mélodie. Retour groupé au thème. La tension descend doucement jusqu'au final. " Ca peut durer des heures " nous prévient Médéric.
" All Blues " joué en mode mineur. La contrebasse commence et Médéric commente. La fameuse ligne de basse d'All Blues (Paul Chambers) jouée en mode mineur. Ca change tout même si le thème reste reconnaissable. Bel exercice de style. Solo de sax alto passionné avec des stridences et des moments de calme. Solo de cornet majestueux en mode mineur. Retour au thème et au came en quintette.
" Four " (?). A l'oreille, je n'entends pas le thème de " Four " mais c'est bien un Blues, à la Miles Davis. Ca tourne toujours mais m'intéresse moins.
PAUSE
Médéric demande l'aide du public pour faire revenir sa section rythmique sur scène. Ca marche. Les trois hommes reviennent au travail. " New Circle " (Miles Davis). La rythmique commence tranquille. Ca donne l'impression de tourner en rond mais fort agréablement. Normal, c'est " New Circle ". Une ballade tranquille, rêveuse. Bonne vague et bon massage. Médéric Collignon nous chante la ballade avec des surprises vocales de son secret.
" Directions 2 ". (Miles Davis). C'est le début de la période électrique de Miles Davis. L'oeuvre était collective et il signait de son nom parce que le chef c'était lui. Yvan Robilliard, comme Herbie Hancock à l'époque (1968) , est passé du piano au Fender Rhodes, au jouet comme disait Herbie qui s'amuse encore avec. Musique cinglante comme il se doit. Contrebasse et batterie pulsent terrible. Le sax alto flamboie. Solo de batterie plutôt Rock et binaire dans le style. Très efficace. Médéric remet la pulsation avec la voix sans soutien de la contrebasse. Trop puissant. Le sax alto remet ça. Le quintette repart et ça dépote.
" Tout de suite " (Miles Davis). En français dans le texte. Tiré de l'album " Filles de Kilimanjaro " (1968) dont tous les titres sont en français. Un Blues lent malgré le titre. Clavier électrique. Le batteur reste aux baguettes mais tout en douceur. La rythmique nous berce doucement alors que les souffleurs entretiennent tranquillement la flamme. Solo de clavier brillant et paisible. Contrebasse et batterie ponctuent doucement. Ca sonne comme du Miles Davis. Avec les coups et les feintes du boxeur qu'il était aussi.
RAPPEL
Excellente musique, excellent groupe auquel Pierrick Pédron apporte son feu personnel. Un seul regret: qui interdit au batteur Nicolas Fox de se servir d'autre chose que des baguettes pour jouer? Balais, maillets, mains nues sont-ils tabous pour lui?
Les photographies de Médéric Collignon & Pierrick Pédron sont l'oeuvre du Stupéfiant Juan Carlos HERNANDEZ. Toute utilisation de ces images sans l'autorisation de leur auteur constituent une violation du Code de la propriété intellectuelle passible de sanctions civiles et pénales.