Le verbe Anéantir signifie au sens propre, réduire à néant des choses ou des êtres; au sens figuré, abattre quelqu'un. Dans ce roman, Michel Houellebecq l'emploie dans les deux acceptions.
Le récit commence à la fin de 2026 et du deuxième quinquennat du président. Paul Raison, bientôt 50 ans, est proche collaborateur de Bruno Juge, le ministre de l'Économie, successeur présumé.
En effet le président ne peut pas se représenter. Il lui faut céder la place, ne serait-ce que pendant cinq ans, avant de pouvoir revenir à l'Élysée. Ainsi le veut la constitution politique du pays.
Le quinquennat a été une réussite sur le papier en matière économique, puisque les soi-disant économistes ne s'intéressent qu'au PIB et à la balance commerciale et n'ont cure du chômage.
L'autre zone d'ombre, c'est bien sûr l'immigration. C'est ce qui donne le vent en poupe au candidat du Rassemblement National, qui cette fois-ci ne porte pas le nom néfaste de Le Pen.
C'est dans ce contexte des élections présidentielles qui auront lieu au mois de mai 2027, que se produisent plusieurs événements, qui ont des conséquences politiques et personnelles.
Un groupe de spécialistes informatiques met sur les réseaux sociaux trois vidéos d'attentats fictifs, mais qui démontrent une maîtrise hors normes de la simulation réaliste, à ne pas croire.
La signature de ces vidéos, qui se diffusent sans qu'il soit possible de l'empêcher, sont de mystérieux polygones et des messages qu'il semble impossible de décrypter, vu leurs caractères.
Tous les pays occidentaux sont en état d'alerte pour tenter de démasquer les activistes, soupçonnés de vouloir anéantir leur monde. Dans leur dernière vidéo, Bruno Juge est guillotiné...
La fratrie de Paul Raison, qui comprend sa soeur Cécile et son frère Aurélien, est anéantie par l'AVC qui touche leur père, Édouard. Il a fallu le transporter à l'hôpital pour le sauver in extremis.
Paul se rend en Beaujolais au chevet de son père où se trouve sa compagne, Madeleine, quinze ans de moins, toute dévouée, peut-être encore plus après cet accident qui les a anéantis.
Si Cécile et son mari Hervé s'entendent bien, il n'en est pas de même de Paul et de Prudence qui vivent ensemble l'un à côté de l'autre, et d'Aurélien et d'Indy que tout oppose dans la vie.
Les événements se précipitent. Les personnages, surtout Paul Raison, sont confrontés à des situations qui soulèvent le problème du sens de la politique et, davantage, celui de la vie personnelle.
Qui dit vie, dit également mort. Bien involontairement, Paul est amené à se poser la question. Ses rêves, fréquents, difficiles à interpréter, le laissent sans réponses quand ils l'évoquent.
Le vrai sujet est donc la mort - la petite permettant d'oublier momentanément la grande -, qui est aussi celui de toute religion. Face à elle, Paul s'ouvre d'autres vues que celle de Pascal qu'il cite:
Le dernier acte est sanglant, quelque belle que soit la comédie en tout le reste: on jette enfin de la terre sur la tête, et en voilà pour jamais.1
Francis Richard
1 - Pensée 210, édition Léon Brunschvicg
Anéantir, Michel Houellebecq, 736 pages, Flammarion
Livres précédents:
Chez Flammarion:
Sérotonine (2019)
Soumission (2015)
Configuration du dernier rivage (2013)
La carte et le territoire (2010)
A L'Herne:
En présence de Schopenhauer (2017)