Focus sur Cinga Samson

Publié le 06 février 2022 par Aicasc @aica_sc

© source Artprice

Il est originaire de Cape Town où il vit et travaille toujours : Cinga SAMSON, 35 ans, a déjà accompagné ses peintures à travers le monde : Paris, New York, Londres ou Miami… Son histoire commence il y a une quinzaine d’années lorsqu’il entre dans un atelier partagé par plusieurs peintres sud-africains, Isibane Creative Arts, à la périphérie du Cap. Il n’a cessé de peindre avec acharnement depuis. Il a étudié les techniques des grands maîtres, anciens comme modernes, en autodidacte passionné et déterminé à vivre de peinture. Considéré désormais comme un pilier de la scène artistique du Cap, il y dirige un studio et participe à l’essor culturel local.

La peinture de Cinga Samson exerce un étrange pouvoir d’attraction tout en explorant l’africanité et l’identité, sujets les plus recherchés du moment par le marché de l’art.

Repéré par la galerie Blank Projects (Le Cap) en 2015, les choses sont allées très vite pour Samson : lauréat du prix Tollman pour les arts visuels en 2017, il expose à l’Armory Show de New York en 2018 avec Blank Projects, et participe à plusieurs expositions de groupe (Hacer Noche, Centro Cultural Santo Domingo (2018), Kubatana, Vestfossen Kunstlaboratorium (2019), et Mapping Black Identities, Minneapolis Institute of Art (2020).

Puis la galerie Perrotin lui ouvre son espace de New York (février-avril 2020) pour une exposition triomphale : le jeune sud africain devient alors l’un des peintres les plus en vue du marché de l’art. Quelques mois plus tard, la célèbre galerie White Cube lui fait une offre qui va changer le cours de sa carrière… L’annonce officielle de la représentation de l’artiste à travers le monde par White Cube tombe en mai 2021.

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Vanité et interférences sociales

Sur le site de la galerie Perrotin, on peut lire à propos de l’artiste que “Le désir, l’aspiration et la célébration de l’identité animent une grande partie de son travail, pour lequel il s’inspire de la mode, du patrimoine et des oeuvres de Paul Gauguin et Andrew Wyeth, entre autres.”

Cinga Samson s’inscrit effectivement dans la grande tradition de la peinture figurative, dressant des ponts entre classique et contemporain. Cette peinture sophistiquée, riche et texturée, se déploie dans une atmosphère trouble avec des personnages aux yeux vides, sans pupilles, nous fixant dans une lumière crépusculaire. Ils sont beaux, fiers, semblent maîtriser leur environnement, en imposent par l’autorité de leur présence. Ils arborent des fantaisies occidentales, vêtements ou accessoires de marques, des imitations dont les hommes et les femmes sont friands en Afrique, l’artiste le premier. Les fleurs, les plantes, les fruits, sont aussi très présents. Ces éléments séduisants servent de memento mori. Nous sommes bien face à des vanités contemporaines, qui attirent autant qu’elles mettent à distance.

Construites sur des inférences symboliques, spirituelles et sociales, les images de Cinga reflètent la complexité de la société sud-africaine et interrogent les identités. D’ailleurs, le titre de l’exposition à la galerie Perrotin n’était-il pas “Men are different, though they look alike” (Les hommes sont différents, même s’ils se ressemblent) ?

Pourquoi un tel succès?

Les peintures de Samson sont belles, certes. Surtout, elles s’inscrivent dans la lignée d’artistes tels Kerry James Marshall, Kehinde Wiley ou Lynette Yiadom-Boakye, dont les portraits d’hommes et de femmes noirs changent la narration artistique. Or, la demande est électrique pour cette “nouvelle” peinture dont les artistes sont immédiatement récupérés par le marché, surtout si le ou la jeune prodige est bien soutenu, ce qui est désormais le cas de Cinga.

Bien que nous ayons peu de recul sur les performances de l’artiste aux enchères (la première œuvre a été introduite en 2020 chez Strauss & Co Houghton, Afrique du Sud), les résultats obtenus aux enchères en 2021 laissent à penser que sa brillante carrière ne fait que commencer. En juin, déjà, Phillips vendait, à New York, la peinture Two piece 1 (2018), pour 378.000$ contre une estimation autour de 30.000$. Cette flambée des enchères peut en partie s’expliquer par l’annonce officielle, le mois d’avant de la représentation de l’artiste par la prestigieuse White Cube avec qui l’artiste organise une exposition pour 2022.

D’autres résultats ont confirmé le puissant soutien du marché cet automne, dont un prix de 440 000$ obtenu à Londres en octobre (Lift Off, 2017, Sotheby’s), suivi des 323 000$ payés fin novembre (Ivory V). Cette dernière vente s’est tenue depuis Hong Kong dans le cadre d’une nouvelle session de Phillips organisée en partenariat avec la société chinoise Poly Auction. Les acteurs du marché ont, en quelques mois, introduit Cinga Samson sur toutes les grandes places du marché mondial…

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Collections publiques intégrées :

LACMA Museum, Los Angeles County Museum of Art, Los Angeles, USA

PAMM, Pérez Art Museum Miami, Miami, USA

Minneapolis Institute of Art, Minneapolis, USA

CCS Bard, Center for Curatorial Studies, Annandale-on-Hudson, New York, USA

South African National Gallery, Cape Town, South Africa

A4 Arts Foundation, Cape Town, South Africa

Paru dans Diptyk Magazine. Texte révisé et mis à jour en décembre 2021