Parfois tu voudrais t’allonger sur un banc visage vers le bas,
dans l’allée principale, dans un square du centre-ville,
qu’ils s’interrogent donc : tu es mort, voilà tout,
ou malade ou simplement saoul pour le moins.
Sauf que ce n’est ni l’un ni l’autre ni rien, juste comme ça,
un corps immobile est toujours un mystère
pour un corps en mouvement qui chantonne au rythme
de ses pas, inspire sans retenue
tout l’oxygène, expire tout le gaz carbonique,
à la joie des feuilles vertes de droite et de gauche.
Toi tu restes couché et nourrissent ton ouïe et tes yeux
épluchures et mégots, une chanson sans refrain.
Et quelqu’un te secoue, posant la paume
entre tes omoplates : l’ami, pousse-toi donc un peu…
Tout va bien. Tu n’as pas bu, tu n’es pas souffrant et surtout tu vis.
Dommage qu’il n’y ait plus rien à attendre. Car le temps presse.
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Boris Khersonski (né en 1950 à Tchernivtsi, Ukraine) – Anthologie de la poésie russe contemporaine 1989-2009 (Bacchanales, N° 45, Février 2010) – Traduit du russe par Christine Zeytounian-Beloüs.