Manifestation contre la partialité de la Cour suprême [Actu]

Publié le 02 février 2022 par Jyj9icx6

"Ces juges doivent partir", dit le gros titre
en citant l'un des slogans des manifestants
dont la foule occupe ici Plaza Lavalle, devant le palais de justice
En haut, le nouveau chef du groupe kirchneriste
à la Chambre des Députés
Il remplace le fils de Cristina Kirchner,
qui a démissionné parce qu'il rejette l'accord avec le FMI
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Vivement indisposées par la tendance difficilement contestable des quatre juges qui, à eux seuls, forment actuellement la Cour suprême à tomber du côté où ils penchent, c’est-à-dire à s’efforcer de pourrir la vie de l’actuel exécutif fédéral, des foules ont répondu à divers mots d’ordres d’organisations politisées péronistes (kirchnéristes) à manifester hier dans la capitale fédérale et les grandes villes partout dans le pays.

Ces manifestations ont connu un indéniable succès, même si les quotidiens de droite sont discrets sur le sujet (il faut sérieusement fouiller les sites pour les trouver, même pour les quotidiens qui ont réservé une petite place à ce sujet sur leur une du jour). Voilà un bon moment qu’ils dénoncent ce qu’ils estiment être un acte anti-démocratique. On a même lu qu’il s’agissait d’une tentative de coup d’État, rien que ça !

En position principale : le remplaçant de Máximo Kirchner
à la tête du groupe de la majorité présidentielle à la Chambre
La manifestation est traitée en haut à droite, en bleu
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En fait, la Cour suprême ne compte plus que 4 magistrats, tous nommés par la droite, et ce n’est pas assez, surtout pour la masse des dossiers qui remontent jusqu’à eux, souvent pour faire traîner les affaires. Actuellement, ces juges suprêmes sont quatre hommes d’âge mûr et issus du même milieu social. Comme aucune limite d’âge ne leur est opposable, ils sont là pour un bon moment. Ils n’ont aucune intention de quitter leurs fonctions. Or le président Alberto Fernández va avoir du mal à nommer quelqu’un pour remplacer la magistrate qui a pris volontairement sa retraite à la fin de l’année dernière. En effet, il n’a plus la majorité au Congrès qui doit valider les nominations. Les manifestants ont donc exprimé leur hostilité par des accusations graves (corruption, prévarication) et des insultes franches.

Il se trouve que l’on vient de découvrir que lorsqu’elle était au pouvoir, de 2015 à 2019, la droite (droite libérale avec l’appoint du parti radical), qui dispose d’une courte majorité au Sénat national, n’hésitait pas à créer de toutes pièces des dossiers pénaux pour faire condamner les animateurs de la gauche de gouvernement, syndicale et politique. La gauche soupçonne depuis toujours que c’est ainsi que la justice fonctionne non seulement en Argentine mais dans beaucoup de pays de la région. Pour se convaincre que tel est bien le cas en ce moment, il suffit d’examiner la manière dont les dossiers judiciaires ont été montés et conduits contre des personnalités comme Lula au Brésil, Correa en Équateur ou Cristina Kirchner en Argentine. Certaines preuves présentées devant les tribunaux sont les unes peu convaincantes, les autres absurdes et quelques unes seulement relèvent de la réalité pénale (dossiers López ou Jaime par exemple en Argentine). Le mécanisme a été complètement et officiellement mis à jour au Brésil dans l’affaire Lula, désormais reconnu innocent et bientôt candidat ultra-favori à la prochaine élection présidentielle.

La manifestation est annoncée dans la colonne de droite
C'est le titre central
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Depuis quelques semaines, les Argentins ont trouvé à leur tour les preuves incontestable de ce système sous la forme d’une vidéo d’une réunion complotiste entre des membres d’un gouvernement provincial de droite et certains représentants du patronat, le tout dans les locaux d’une banque équipés de caméras dissimulées dans les plafonds par les services de renseignement fédéraux, placés sous les ordres d’un président lui-même de droite qui se méfiait de la charismatique gouverneure de droite qui aurait pu devenir sa concurrente. Qui plus est, le pays voit s’accumuler des affaires plus graves les unes que les autres sur cet ex-président (Mauricio Macri), objet de plaintes et de mises en cause pour toutes sortes d’agissements ayant tous pour objectif ou conséquence délibérés la dégradation (voire la destruction) du fonctionnement de l’État de droit : opposition bloquée ou discréditée par des poursuites artificielles, détournement d’argent public au profit d’intérêts privés, en particulier ceux de la holding familiale, mise sous écoute illégale, hors de toute procédure judiciaire, d’opposants (des élus, des artistes, des syndicalistes, sa propre sœur, l’un de ses cousins germains) et de plusieurs parties civiles ayant perdu un conjoint, un parent, un enfant lorsque le sous-marin ARA San Juan a disparu en mer au cours d’une mission.

La manifestation a droit ici à la photo principale
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La manifestation d’hier, en plein été, semble donc montrer que la gauche ne s’est pas laissé décourager par la défaite sévère subie en novembre aux élections de mi-mandat. Le covid et l’inflation ont beau se liguer contre elle, elle est loin d’être démobilisée. De plus, en dépit des désaccords qu’il provoque et qui, depuis lundi, éclatent au grand jour au sein de la majorité gouvernementale, le récent accord obtenu par le ministre de l’Économie avec un FMI qui a enfin renoncé à son habitude de détruire les économies de ses créanciers pourrait bien rassembler son électorat. C’est sa partie militante qui s’est sans doute mobilisée hier dans les rues des grandes villes. Cela suffira-t-il à vaincre les résistances classistes, historiques et idéologiques des membres de la Cour, à assainir le système judiciaire pour en faire une vraie branche de la démocratie argentine, dans une authentique séparation des pouvoirs ? C’est loin d’être gagné !

© Denise Anne Clavilier www.barrio-de-tango.blogspot.com

Pour aller plus loin :

lire l’article principal de Página/12
lire l’article de La Prensa
lire l’article de Clarínlire l’article de La Nación