La dernière analyse du genre réalisée par la FCA remontait à 2018 et elle montrait alors une emprise inébranlable des acteurs historiques sur l'ensemble des services financiers, maintenu par l'avantage de l'antécédence et la transmission des habitudes de générations en générations. À l'occasion de cette réactualisation, l'aiguille bouge visiblement, en particulier en ce qui concerne les comptes de dépôt de particuliers et de petites et moyennes entreprises (sur lesquels les nouveaux entrants sont les plus présents).
Sur l'échantillon retenu pour l'étude, les néo-banques « digitales » représentent, à la fin 2021, 8% du marché des particuliers et 10% du côté des PME, alors qu'elles ne dépassaient pas 1% il y a 4 ans, au détriment des « Big 4 » et, dans une moindre mesure, de leurs challengers classiques. Bien sûr, en parallèle, le multi-équipement a progressé, relativisant la variation observée. Mais il n'en reste pas moins que les usages se déplacent et entraînent avec eux une part des flux traités et des revenus associés.
L'évolution est (facilement) explicable par la convergence de plusieurs facteurs. D'abord, l'ancienneté et la maturité des jeunes pousses britanniques (Revolut, Starling, Monzo, Atom…) fait qu'elles ont acquis une visibilité importante et qu'elles inspirent confiance. Puis la montée en puissance de la « digitalisation », catalysée par la crise sanitaire, a réduit la primauté accordé au réseau d'agences et constitué un critère de choix décisif par rapport à des établissements mal préparés à une relation 100% à distance.
Du point de vue des personnes concernées, outre la supériorité des outils mis à leur disposition, notamment mobiles, dont ils apprécient l'expérience qu'ils leur procurent, les trublions sont également plébiscités pour leur capacité à les aider à mieux gérer leur argent. La démonstration serait ainsi faite, encore une fois, que les clients attendent dorénavant de leur banque un accompagnement de proximité et que celui-ci devient un différenciateur majeur dans un paysage où les produits proposés sont tous identiques.
Si le régulateur se félicite du développement de la concurrence, qu'il cherche à stimuler depuis des années et qui aboutit à une amélioration mesurable de la perception de la qualité de service, il en découvre simultanément les inconvénients. En l'occurrence, la tendance prend une ampleur suffisante pour qu'il s'inquiète des risques, qu'elle pourrait attiser, de disparition de l'accès aux agences et aux automates sur le territoire, alors qu'il reste pourtant indispensable à une partie conséquente de la population.
Naturellement, les spécificités du contexte outre-Manche permettent de moduler l'hypothèse d'un impact du même ordre dans un pays tel que la France. Cependant, la désinvolture qui persiste largement vis-à-vis de la menace de la FinTech mériterait de laisser place à un minimum de circonspection : les pionnières montrent que, grâce à leur ténacité et à une indéfectible obsession du client, elles peuvent acquérir une position de confiance et, dès lors, rivaliser sérieusement avec les grands groupes centenaires…