Ils envahissent le sang.
Ils sentent les plumes,
le dénuement,
les larmes.
Mais toi tu nourris la peur
et la solitude
comme deux petits animaux
perdus dans le désert.
Ils sont venus
mettre le feu à l’âge du rêve.
Ta vie est un adieu.
Mais toi tu étreins
comme la vipère folle de mouvement
qui ne se trouve qu’elle-même
parce qu’il n’y a personne.
Toi tu pleures sous tes larmes,
tu ouvres le coffre de tes désirs
et tu es plus riche que la nuit.
Mais il fait tant de solitude
que les mots se suicident.
*
Hija del viento
Han venido.
Invaden la sangre.
Huelen a plumas,
a carencias,
a llanto.
Pero tú alimentas al miedo
y a la soledad
como a dos animales pequeños
perdidos en el desierto.
Han venido
a incendiar la edad del sueño.
Un adiós es tu vida.
Pero tú te abrazas
como la serpiente loca de movimiento
que sólo se halla a sí misma
porque no hay nadie.
Tú lloras debajo del llanto,
tú abres el cofre de tus deseos
y eres más rica que la noche.
Pero hace tanta soledad
que las palabras se suicidan.
***
Alejandra Pizarnik (1936-1972) – Les aventures perdues (1958) – Œuvre poétique (Actes Sud, 2005) – Traduit de l’espagnol (Argentine) par Silvia Baron Supervielle.